Les vins bio peinent à s’implanter en Suisse
Malgré une prise de conscience des bénéfices de l’agriculture biologique, moins de 5% des vignerons ont encore fait le pas. Toutefois, la production intégrée prend de l’ampleur.
Quand on évoque la viticulture biologique en Suisse, on pense directement à Marie-Thérèse Chappaz, pionnière de cette démarche qui en a fait une philosophie de vie depuis plus de vingt ans. «J’ai beaucoup souffert en travaillant avec les désherbants. J’étais stressée et je me mettais énormément de pression», raconte la vigneronne valaisanne lors d’une conférence au Salon Vinea à Sierre début septembre.
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Elle compare ses raisins à un être vivant qu’il faut bichonner. «Même si ce fut difficile au départ, ma démarche est d’apporter de la vie, des bonnes odeurs et des couleurs à mes vignes» se réjouit celle qui, désormais, pratique la biodynamie, une approche spirituelle de la viticulture qui prend en considération les rythmes lunaires et planétaires.
En France, certains des plus prestigieux domaines travaillent depuis longtemps en bio, voire en biodynamie. C’est le cas de Romanée-Conti en Bourgogne ou encore de Pontet Canet, Latour ou Palmer à Bordeaux. En raison du climat difficile de la région proche de l’Atlantique, de nombreux autres domaines n’ont pourtant jamais voulu en entendre parler, comme Château Margaux.
Pourtant, selon certains experts, le raisin produit de manière naturelle, sans OGM ni produits de synthèse, n’aurait pas le même goût que celui produit de façon conventionnelle. Même si de nombreux dégustateurs ont été formés aux goûts et aux arômes révélés par certains de ces agents chimiques, les vins produits biologiquement auraient une certaine acuité que l’on ne retrouverait pas dans les vins traités.
Vers des équilibres plus sains - -
En Suisse, malgré la notoriété de Marie-Thérèse Chappaz – c’est aussi l’une des rares vigneronnes suisses à exporter une grande quantité de ses vins – la biodynamie reste encore malheureusement un concept quelque peu ésotérique pour de nombreux acteurs de la vigne, estime Jacques Perrin, fondateur du CAVE (Club des amateurs de vins exquis).
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Pourtant l’idée de produire de façon biologique mûrit de plus en plus dans la tête des amoureux du vin. «La tendance, c’est d’aller vers des équilibres plus sains pour la plante en lui offrant plus de défenses humanitaires, explique l’expert. Les viticulteurs sont de plus en plus conscients que les herbicides ne sont ni bons pour elle ni, au final, pour les consommateurs.»
Ainsi, alors que l’on comptait seulement 3 domaines cultivés biologiquement en 1985, on en dénombre 210 aujourd’hui. Cela représente 427 hectares de vignes sur 15 000 répartis en Suisse, soit moins de 5% du total. Cependant, même si la plupart des vignerons n’ont pas encore fait le pas du bio, ils sont de plus en plus nombreux à aller dans ce sens, notamment en produisant de façon intégrée.
«Ils prennent le chemin de la viticulture biologique en ayant recours à des produits chimiques uniquement lorsque les risques de perdre une grande partie de leur récolte sont importants», indique Jacques Perrin.
Le mouvement est lancé donc, même si la démarche a un prix. En effet, produire du vin issu de cette agriculture coûte environ 20% de plus que les vins produits à l’aide d’herbicides. Il faut effectivement plus de temps et d’effectifs pour arriver à traiter les vignes. Le labeur est aussi plus compliqué lorsque les vignobles sont pentus, comme en Valais.
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Enlever à la main les mauvaises herbes entre les cèpes devient une tâche ardue pour les vignerons. «Nous ne sommes plus dans le curatif mais dans le préventif», explique l’œnologue Caroline Frey, présente elle aussi au Salon Vinea. La propriétaire du Château La Lagune – et tout récemment d’une petite parcelle en Valais – s’est lancée dans l’agriculture biologique depuis une petite dizaine d’années à Bordeaux. Elle compte, peu à peu, appliquer la même démarche aux autres domaines familiaux.
2% des vins vendus en magasin - -
Etonnamment, malgré la méthode qui se veut respectueuse de la plante et des consommateurs, l’étiquette «vin bio» n’est pour l’heure pas très vendeuse. Ni les grands bourgognes ni les grands bordeaux ne mentionnent ce label sur leurs bouteilles. En Suisse, seuls 2% des vins vendus en magasin ont l’étiquette bio. Les consommateurs, quant à eux, seraient pour l’heure plutôt des férus du mouvement écologique que des amateurs de crus.
«Beaucoup pensent encore que les vins bios sont tout simplement moins bons que les autres», explique un producteur valaisan. Et puis, il y en a d’autres qui ne veulent pas forcément mettre le prix, puisque ces vins sont logiquement un peu plus chers que ceux produits traditionnellement.
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