Quelques lois pour tuer Youtube
Les sites de création de contenu entrevoient une menace certaine en cette année 2019: celle des mesures imaginées par l'Europe pour combattre les abus de copyright.

C’est un article qui risque de fortement bouleverser les habitudes des internautes. Si bien que YouTube a décidé de s’appuyer sur sa communauté pour protester contre le texte avec le #SaveYourInternet .
L’article 13 est tiré d’une série d’articles imaginés pour l’Europe. C’est la Commission européenne qui s’est chargé de le travailler, et l’a présenté d’abord en 2016. Les différents textes ont connu de nombreuses révisions mais changent toujours autant les pratiques actuellement en place. S’ils devaient à la base simplifier et encourager le respect du copyright et d’amener à une bonne rétribution des créateurs, les textes risquent d’avoir l’effet inverse selon certains.
Qu’est-ce qui va changer ?
L’article 13 devrait entrer en vigueur en 2019. Il risque de largement bouleverser l’écosystème actuellement en place. «Les plateformes comme YouTube ou Facebook devront réagir a priori avec une obligation de filtrage de contenus, ce qui change beaucoup de choses puisque aujourd’hui les plateformes n’ont aujourd’hui pas d’obligation d’avoir, à titre préventif, un système de filtrage généralisé des informations», précise Yaniv Benhamou, avocat et chargé de cours en droit des technologies à l' Université de Genève .
Les contenus illicites sont actuellement signalés et disparaissent au fur et à mesure que les équipes et bots des mastodontes du web peuvent les effacer. S’il faut que ce travail soit fait à titre préventif avant la publication de la vidéo, plusieurs options sont possibles :
Les plateformes reconnaissent des producteurs fiables, qui sont autorisés à publier du contenu. Ce qui implique beaucoup moins d’acteurs et de créateurs sur les divers sites.
Les plateformes ont recours à une modération exclusivement humaine, avec des équipes qui se chargent de valider les contenus selon les nouvelles lois.
Les plateformes mettent au point des algorithmes sophistiqués, capables de reconnaître non seulement les cas de plagiats mais aussi les cas licites (p.ex. au bénéfice d’exceptions, telles que l’exception dite de fair use aux Etats-Unis). Pour l’heure, cette promesse est intenable car les ordinateurs n’ont pas la sensibilité humaine en terme d’interprétation de la loi. Yaniv Benhamou cite le cas du dancing baby, une vidéo Youtube de 29 secondes dans laquelle on entend en fond de vidéo le morceau Let’s Go Crazy de Prince a déclenché la réaction du robot contentID de YouTube.
Un robot qui a estimé que la présence d’une musique protégée par le droit d'auteur était suffisante pour rediriger la monétisation de la séquence vers ses auteurs. «Il faut tenir compte des exceptions, telles que la citation ou la parodie. Des robots peuvent se charger d’un tel traitement mais doivent être alors capables de tenir compte des exceptions et interpréter les lois», rappelle Yaniv Benhamou.
En attendant d’avoir des robots aussi sophistiqués, l’avocat estime qu’il reste possible, voire nécessaire d’utiliser un traitement manuel pour ces cas limites». Faudra-t-il donc restreindre le nombre de créateurs, pour n'en garder qu'un certain nombre de confiance? C'est une possibilité. Il y a fort à parier que ce durcissement de la modération va entraîner soit une augmentation des vidéos signalées et supprimées par le contentID.
Bon nombre de vidéastes s'appuient aujourd'hui sur le droit de citation. Le Joueur du Grenier pour les parodies dans l'univers vidéoludique ou le Fossoyeur de Films qui parle de cinéma ne sont que deux exemples parmi tant d'autres qui utilisent et s'inspirent d'autres œuvres pour leur ajouter une plus-value. Et le premier a par exemple partagé la pétition lancée après le vote de septembre.
Un ciblage certain
Il y a toutefois une différence majeure entre l’article 13 proposé initialement, et celui accepté en septembre 2018. «Dans la version précédente, les cibles n’étaient pas aussi claires» explique Yaniv Benhamou. «Les plateformes collaboratives en open source types Wikipedia sont désormais exclues de cette obligation de filtrage, puisque celle-ci se concentre sur les prestataires centralisés à but lucratif. Les petits acteurs ont une carte à jouer pour bousculer les ténors des contenus consommés sur internet.»
La Commission européenne, le Parlement européen ainsi que le Conseil de l’Union européenne doivent encore se mettre d’accord pour finaliser cette nouvelle approche du copyright. Les gouvernements des différents pays européens vont ensuite recevoir les directives qui passeront sous forme de loi. Même si quelques adaptations peuvent survenir suivant les lois déjà en vigueur.
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