Peppr, l'appli allemande pour réserver une prostituée
Tout a débuté par une sortie en soirée à Berlin. Pia Poppenreiter, une jeune ingénieure berlinoise, a remarqué des prostituées sur l'artère très fréquentée d'Oranienburgerstrasse, alors même que la météo était loin d'être clémente. Celle-ci s'est alors fait la réflexion suivante: «C'est con qu'il existe une application pour tout, mais pas pour ça. Pourquoi doivent-elles rester debout dehors toute la journée en hiver?»
Quelques jours plus tard, après avoir vérifié que le produit n'était pas sur le marché, elle s'est lancée dans son développement. Et c'est ainsi qu'est née l'appli Peppr. D'abord uniquement centrée sur Berlin et sa région, elle a très rapidement concerné d'autres Länder allemands.
Le concept est simple: le client télécharge l'appli et, quand il se connecte, il choisit la prestation qu'il souhaite, selon certains critères basiques (lieu, date, prix), mais aussi grâce à des filtres plus poussés (silhouette ou morphologie de la prostituée, langues parlées, pratiques sexuelles envisagées,...). Pour Pia Poppenreiter, ces filtres sont un avantage pour le client car cela lui garantit une prestation correspondant à ses souhaits, mais aussi pour la professionnelle, qui ne court par le risque d'irriter son client en refusant certaines demandes.
Sur le principe des sites de rencontre
L'appli fonctionne donc sur le principe des sites de rencontre, avec des profils sélectionnés selon des caches et des filtres, et la possibilité pour un usager de contacter une des personnes après avoir consulté son profil. Si l'inscription est gratuite pour la péripatéticienne, le service est facturé entre 5 et 10 euros au client lorsqu'il valide sa réservation.
«Nous essayons de révolutionner l'image des travailleuses du sexe, en s'émancipant de l'image glauque que cela peut avoir», explique Pia Poppenreiter. Avec près de 300'000 à 400'000 prostituées en Allemande selon certains chiffres (entre les occasionnelles et celles qui travaillent à temps plein), la cible de Peppr est conséquente. Mais la startupeuse a tenu à s'assurer une image de sérieux: après avoir lancé l'appli avec des agences d'escort, elle l'a ouverte à d'autres travailleuses du sexe, mais toujours en validant l'inscription après un entretien, «afin de s'assurer que la personne exerce cette activité librement et sans contrainte».
Le buzz sur les réseaux sociaux
Selon le quotidien britannique The Telegraph, le secteur du sexe aurait généré 15 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2012. D'où la facilité pour trouver des fonds: «Nous avons fait appel à un seul investisseur qui a amené toute la mise de fonds de départ, et le développement se fait sans dépenses excessives», confie Pia Poppenreiter. La créatrice s'est d'ailleurs réjoui sur les réseaux sociaux du lancement de son appli.
So proud! @tineohlau @fhackenberger @lovePEPPR #pepprit pic.twitter.com/HCN0CeA5Aq
— Pia Poppenreiter (@PEPPRPia) 23 Avril 2014
Et elle a dû faire face aux critiques émanant notamment des milieux féministes qui ont critiqué le concept, comparant Peppr à des applis pour se faire livrer une pizza à domicile.
#Prostitution, so easy wie ne Pizza bestellen! #gegenProstitution http://t.co/KKwLjcDo32 @EMMA_Magazin @BereniceFemen @Euterpeaventure
— Klara Femen (@KlaraFemen) 16 Avril 2014
Les milieux économiques n'ont pourtant pas tous été emballés. La plateforme BerlinUp!, qui accompagne et relaie les créateurs de startups, s'est interrogée via Twitter sur la naïveté de Pia Poppenreiter quand elle affirme que Peppr n'est pas moralement préoccupante.
"Sex-Vermittlung Peppr.it: 'Nein, ich finde es nicht moralisch bedenklich'" http://t.co/E8BEm5SP8s @gruenderszene | Ist das nur naiv?
— BerlinUp! (@BerlinUp) 16 Avril 2014
Sex per Bestellung: Peppr.it hat ein „Lieferheld für die Prostituition“ gebaut. CEO Pia Poppenreiter im Interview http://t.co/dKOTkMdWme
— Gründerszene (@gruenderszene) 14 Avril 2014
D'autres se sont étonnés que l'initiative soit venue d'une femme. A l'instar de cet Amstellodamois (sans doute pourtant habitué au phénomène avec son Red Light District).
This sweet, female founder is building a booking engine. For prostitution. No joke. http://t.co/67fPnZW3ZA #startups (story in German)
— Remco Janssen (@remcojanssen) 23 Avril 2014
Mais ce buzz sur les réseaux sociaux, Pia Poppenreiter ne s'en préoccupe pas. Très présente sur le web, elle prend soin de relayer, remercier et répondre à tous les tweets et médias qui évoquent son appli. Certaine qu'elle a agi là pour le bien de tous, clients comme professionnel(le)s.
Le seul frein qu'elle rencontre réellement, ce sont les barrières mises en place par les sites de téléchargement d'applis qui assimilent son initiative à du soutien à la prostitution, voire du proxénétisme, et ont bloqué sa mise en ligne. Elle a donc dû ruser et passer par des plateformes alternatives afin de proposer aux premiers clients d'utiliser son appli.