La techno suisse qui va raconter le Mondial

Les techniciens auront même la possibilité d’afficher dans une bulle au-dessus d’un joueur ses statistiques pour comparer sa vitesse ou ses performances à d’autres matchs.
«Et si Messi avait centré au lieu de tirer au-dessus du poteau ?» La prochaine Coupe du monde de football va voir les commentateurs TV et leurs consultants s’en donner à cœur joie pour expliquer ce qui est et naturellement ce qui aurait pu être. Cette fois, ils seront nombreux à disposer d’un outil extraordinaire pour illustrer par l’image leurs propos.
Spin-off de l’Ecole Polytechnique de Zürich racheté en 2010 par l’américain Vizrt, LiberoVision a développé une technologie de traitement des images en temps réel. Elle sera utilisée par 25 diffuseurs, dont pour la première fois les chaînes suisses, lors du Mondial.
Tout commence par un coup de fil en 2007. Chercheur à l’Institute for Visual Computing, Stephan Würmlin Stadler a développé un logiciel qui reconstitue un modèle en trois dimensions à partir des images prises par diverses caméras. Comme les stades sont bien adaptés à cette technologie, il a créé sa start-up, LiberoVision, pour la commercialiser en direction des diffuseurs sportifs.
Le téléphone qui sonne ce jour là lui donne raison. Au bout du fil, c’est le directeur des technologies de production d’ESPN, le leader mondial des réseaux de TV sportives. Comme cela paraît trop énorme à l’entrepreneur, il raccroche! Heureusement pour lui, son interlocuteur insiste.
Il a adoré les effets d’images volantes, par exemple un «replay» depuis derrière les filets jusque derrière le buteur ou une vue en plongeon, générés par le logiciel. A l’Euro 2008, ESPN et la chaîne allemande ZDF seront les premières à utiliser ces effets qui bouleversent complètement la narration des matchs retransmis depuis les terrains suisses et autrichiens.
Modélisation en 3D
«Notre logiciel analyse les pixels extraits des différentes caméras pour les classer en trois catégories : les gradins, le terrain et les joueurs », explique Stephan Würmlin. « Disséquées en différentes couches, ces images sont recomposées dans un modèle en 3D. »
A partir de là, tout devient possible. Les opérateurs peuvent illustrer en temps réel les analyses des commentateurs avec ces effets de vols et bientôt toute une panoplie d’outils qu’une vingtaine d’employés développent toujours à Zurich.
«Nous avons d’abord répondu à la demande d’annotations graphiques», poursuit Stephan Würmlin. Des cercles entourant un joueur spécifique, à des effets de loupes sur une action en passant par des flèches virtuelles retraçant la trajectoire du ballon, les techniciens disposent désormais de plus de quarante outils contre cinq au départ.
Pour le Mondial 2014, ils auront même la possibilité d’afficher dans une bulle au-dessus d’un joueur ses statistiques pour comparer sa vitesse ou ses performances à d’autres matchs ou à des moyennes.
La modélisation en 3D permet aussi des effets saisissants comme par exemple le gel d’une partie des joueurs pour se concentrer uniquement sur les mouvements de ceux impliqués dans une action décisive. Quand un joueur est masqué par un autre, le logiciel va chercher dans les images précédentes les pixels manquants.
Pour la Coupe du monde, les commentateurs auront la possibilité d’une nouvelle fonction «virtual run » afin de montrer ce qu’aurait pu être une action si un joueur avait fait un choix tactique différent. Bluffant.