Bâle déclenche la folie avec sa vidéo Pokémon Go Revenge
La Messe de Bâle où se tiennent chaque année Baselworld ou Art Basel, la Mittlere Rheinbrücke et les bords du Rhin, la vieille ville historique, la fontaine Tinguely et le théâtre ou encore le Parc Saint-Jacques: les lieux emblématiques de Bâle ont bénéficié d'une exposition médiatique jamais vue. D'ici quelques heures, ils devraient être 100 millions d'internautes à avoir vu la vidéo Pokémon Go The Revenge. Et encore, ce chiffre fait-il uniquement mention des vues sur la page Facebook de Bâle Tourisme. Avec près de deux millions de partages sur le réseau social leader, mais aussi des millions (voire des dizaines de millions) de vues sur YouTube, Dailymotion et de nombreuses autres plateformes, le succès est phénoménal.
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Une semaine aura suffi pour transformer un court clip d'1'44'' en phénomène mondial. Un succès jamais vu dans l'univers séculaire du tourisme suisse. Et pourtant, tout a commencé par une banale réunion au siège de Bâle Tourisme, sur les bords du Rhin. «Nous faisons toujours un peu de veille pour savoir comment surfer sur une tendance et en faire profiter notre ville. Il faut parfois allier les images de la ville avec un phénomène de masse. Là nous avons vu ce raz-de-marée Pokémon Go et nous avons discuté entre nous de la façon de nous associer à la tendance. Nous avons notamment envisagé de lancer un appel pour une grande chasse aux Pokémon dans la ville, via les réseaux sociaux. Mais en discutant de cela avec notre agence de marketing digital, Fadeout, nous avons décidé d'opter pour une vidéo», raconte Daniel Egloff, directeur de Bâle Tourisme.
300 journalistes le lendemain et un écho mondial
Une fois l'idée choisie, Fadeout réunit les moyens matériels (caméras, drone, véhicules, déguisements) et humains (comédiens et figurants) tandis que Bâle Tourisme sélectionne une série de lieux à voir dans le clip. «Dans ce genre de situation il faut agir très vite: pour éviter que d'autres n'aient la même idée avant nous, et pour surfer sur le sommet de la vague du phénomène, pas attendre que le soufflet retombe», estime-t-il. Certaines idées sont mêmes tournées mais abandonnées au montage, soit pour raccourcir la vidéo et la rendre plus dynamique, soit car l'effet recherché n'était pas atteint. «Nous avons voulu que les Pokémon avec leurs combinaisons prennent part à un Rheinschwimmen, cette baignade dans le Rhin extrêmement populaire à Bâle, mais leurs combinaisons se sont remplies d'eau et l'effet était gâché», confie Daniel Egloff.
Mercredi 3 août, soit moins de deux semaines après le lancement du jeu de Niantic, la vidéo est mise en ligne vers 16h. «Nous avons passé un accord avec Fadeout: eux la diffusent sur leur chaîne YouTube et nous sur notre page Facebook», précise le directeur de Bâle Tourisme. Dès les premières heures, le succès est au rendez-vous: plus d'un million de vues en une heure et des milliers de partages sur les réseaux sociaux. Le téléphone commence à sonner avec les premiers appels d'observateurs des tendances ayant repéré le potentiel viral du clip. Mais c'est véritablement le lendemain que le phénomène prend une ampleur inattendue: 300 journalistes du monde entier sollicitent une interview ou une réaction, et les sujets fleurissent du New York Times au téléjournal australien en passant par CNN.
10'000 francs et 100 millions de vues
Rapidement, certains internautes coupent la vidéo, éliminant les dernières secondes au cours desquelles Bâle Tourisme invite à visiter son site. «Si nous étions procéduriers, nous pourrions les attaquer car nous avons payé les droits pour la musique et les images. Mais nous n'en faisons rien, car l'ensemble du clip montre Bâle et participe à la publicité pour notre ville dans le monde entier. Et nous n'avons pas acheté les droits pour les logos, mais nous avons discuté avec nos avocats qui nous ont donné le feu vert, Nintendo et Niantic étant très heureux qu'on participe à ce phénomène Pokémon à notre manière, sachant que notre objectif n'est pas commercial», glisse Daniel Egloff.
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Cinq jours après la mise en ligne du clip, la barre des 100 millions de vues sur la page Facebook de Bâle Tourisme est en passe d'être franchie. Dans la branche tourisme, les superlatifs sont dépassés: les meilleurs clips de confrères/consoeurs dans le pays atteignent quelques dizaines de milliers de vues en quelques semaines, parfois pour des budgets assez élevés. «Là, pour 10'000 francs, nous avons une vidéo vue sur les cinq continents», se réjouit Daniel Egloff. Mais il tempère aussitôt: «C'est un coup inattendu, il faut être honnête et réaliste: si on savait commenta faire ça, on le ferait à chaque fois». Et de préciser qu'il y avait un risque de «bad buzz», qui aurait pu poindre dès les premières heures avec quelques commentaires précoces sur les personnes touchées par les ballons géants ou les smartphones qui tombent au sol ou dans l'eau. Mais rapidement, les initiateurs de la vidéo rassurent les gens inquiets et les rires l'emportent largement dans les réactions. «Nous sommes conscients que c'est assez irrévérencieux, presque à la limite. Mais nous avons depuis le début la conviction que c'est le ton adéquat pour le média choisi, les réseaux sociaux», souffle Daniel Egloff.
Un gain de 100'000 followers en une semaine
Moins d'une semaine après, le succès est incontestable. Avec près de deux millions de partages Facebook, le clip bâlois est d'ores et déjà «la» vidéo virale de l'été. La responsable de l'équipe web/digital de Bâle Tourisme a d'ores et déjà été invitée à s'exprimer lors de plusieurs congrès et colloques internationaux consacrés à la vidéo au ligne et aux réseaux sociaux. Et la page Facebook de Bâle Tourisme, qui avait conquis 50'000 followers en une décennie, est passée à plus de 150'000 en quelques jours. Difficile de mesurer l'impact que le clip aura sur d'éventuelles visites de touristes ou sur les nuitées des mois à venir. Mais en termes de notoriété, le succès est incontestable.
De quoi motiver les équipes bâloises à continuer sur la lancée et surveiller les tendances, oser des coups et s'émanciper des règles traditionnelles. «Nous allons tout de même continuer à faire des vidéos de promotion plus classiques, avec des interviews, des découvertes plus approfondies des spécialités, musées et des monuments bâlois. Mais c'est un coup comme il faut savoir en faire parfois», sourit Daniel Egloff.
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