
C’est une véritable résurrection! Encore fallait-il savoir que Georges Chaix était mort. Voire qu’il a tout simplement existé. Aujourd’hui tombée en défaveur, l’école genevoise de peinture reste bien lacunaire. Il ne se produit plus sur elle de grands travaux, comme c’était le cas au début du XXe siècle avec de gros ouvrages illustrés. Les études restent ponctuelles, confidentielles, voire souvent inachevées. S’il existe depuis 1986 le catalogue d’exposition de Renée Loche sur Jacques-Laurent Agasse et depuis 1996 le livre de Lucien Boissonas sur Wolfgang-Adam Töpffer, la somme attendue durant des décennies d’Anne de Herdt sur Jean-Pierre Saint-Ours n’a jamais connu de version papier. Si le pavé de Patrick-André Gueretta sur Pierre Louis de La Rive a vu le jour en 2002, on attend toujours son Constantin Vaucher. Et je me limite là au début du XIXe siècle!
Grèce antique et Grèce moderne
Aussi est-ce avec la plus extrême surprise que j’ai récemment découvert le volume que Vincent Chenal a consacré à Georges Chaix (1784-1834). L’an dernier, «La Tribune de l’art» lançait un appel au peuple. Où pouvaient se cacher beaucoup de ses toiles et dessins? La quête apparaît aujourd’hui moyennement fructueuse, beaucoup d’œuvres se trouvant heureusement encore chez les descendants. Mais une surprise demeure possible. En 2010 sortait ainsi chez Piguet à Genève une scène (tragique, bien sûr) du soulèvement des Grecs contre les Ottomans datée de 1824. L’année des «Massacres de Schio» de Delacroix… Reste qu’il subsistera toujours des lacunes graves. La plus vaste toile de Chaix, «Œdipe à Colonne» (1820), a ainsi disparu du Musée d’art et d’histoire de Genève. Dans un des incendies des années 1970-1980? L’auteur glisse sur le sujet…

Fils d’un Français tantôt négociant, tantôt diplomate (vous me direz que les deux choses ne semblent pas incompatibles!), Georges est né à Madrid. Vers 1800, il se retrouve à Paris dans l’atelier de David. L’endroit où il s’agissait alors d’être. Il y a donc une période antiquisante et néoclassique chez le débutant, qui s’enterre ensuite quelques années à Valence, dans la Drôme. C’est le mariage avec une Genevoise qui le fait venir chez nous, où Saint-Ours et Vaucher terminent prématurément leurs carrières. L’arrivant s’essaie d’abord dans le «grand genre», puis dans des domaines plus commerciaux comme le portrait. La mode changeant, il y aura aussi des scènes troubadours. La plus célèbre montre «La délivrance de Bonivard» au château de Chillon. Le thème se voyait mis au concours en 1824. C’est Jean-Léonard Lugardon qui remportera le prix, les concurrents n’étant que deux. On cherchait à l’époque des participants pour ce genre de joutes!
Un travail savant
Chaix va continuer à peindre. A enseigner. A participer à la vie de la Société des Arts. La maladie va cependant l’emporter à 50 ans, suivi par son épouse. Cela peut sembler un peu bref, mais les Chaix actuels ont manifesté le désir d’une bonne monographie, avec plein de notes et de références. Ils l’ont confiée à Vincent Chenal. D’où la préface documentée de mon ex-collègue à la «Tribune de Genève» Benjamin Chaix. L’ouvrage se trouve aujourd’hui en librairie. Je l’y ai vu. Il aurait bien besoin d’un peu de publicité. Le MAH aurait par exemple pu concevoir un petit accrochage dédié à cette figure méconnue. Il ne l’a jusqu’ici pas fait.
Pratique
«Le peintre Georges Chaix, De l’école de David à l’héroïsme genevois», de Vincent Chenal, aux Editions Georg, 282 pages.
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Peinture genevoise – Vincent Chenal donne un livre sur Georges Chaix
Une monographie manquait sur cet artiste rare, mort en 1834 à 50 ans. Beaucoup de ses tableaux et dessins n’ont pas encore refait surface.