
Je vous ai posté il y a quelques jours les images de «La mort de Sardanapale» d’Eugène Delacroix, en cours de restauration au Louvre. La couleur a changé sur les parties sorties de la main des restaurateurs. Il y a encore plus spectaculaire. «Il Giornale dell’arte» a montré dans une récente édition de sa version en ligne le retable peint en 1445 par Domenico Veneziano pour Santa Lucia de’Magnoli. Un panneau conservé aux Offices depuis 1862. Comme dans les vieilles publicités, la photo avant précède celle d’après. La tonalité se révèle totalement différente. Un panneau terne est devenu éclatant. Les visiteurs de l’institution florentine pourront bientôt en juger.
«Il s’agissait de garder l’équilibre d’une œuvre ayant souffert. Il fallait lui rendre de la luminosité sous trop nettoyer en s’attaquant aux couches picturales.»
La remise en état a été payée, grâce à l’intermédiaire d’Art Bonus, par Giampaolo Cagnin. Celui-ci a agi en mémoire de son épouse Anne Marie Bauer, elle-même grande restauratrice dans les années 1960. Elle s’était alors occupée des œuvres endommagées par le fameux «alluvione» de l’Arno en 1966. Une inondation demeurée célèbre. Les travaux ont été exécutés par cinq personnes différentes à l’Opificio delle Pietre dure, où la disparue œuvrait. «Il s’agissait», selon son actuelle directrice Emanuela Daffra, «de garder l’équilibre d’une œuvre ayant souffert. Il fallait lui rendre de la luminosité sous trop nettoyer en s’attaquant aux couches picturales.» Veneziano les aimait roses et les verts pâles. C’est un œuvre plus pictural que dessiné, contrairement à l’habitude florentine.

Pour Domenico Veneziano, mort en 1461 alors qu’il était âgé d’environ 50 ans, le retable forme l’œuvre de référence. C’est sa seule réalisation signée et datée. Ses cycles attestés de Pérouse et de Florence ont disparu il y a longtemps. La critique a réuni quelques réalisations autour de cette «conversation sacrée» regroupant la Vierge, l’Enfant, sainte Lucie et les saints Jean-Baptiste et Zanobi (le patron de Florence). Il s’est publié peu de littérature sur cet artiste négligé. Aucune exposition n’a à ma connaissance été organisée, alors que la National Gallery de Londres en montera une cet automne autour de son contemporain Francesco Pesellino. La biographie elle-même reste mystérieuse. Une seule chose sûre. Domenico n’a pas été assassiné par un Andrea del Castagno jaloux, comme le raconte dans ses «Vitre» de 1550 et 1568 Giorgio Vasari. En 1461, Andrea del Castagno était mort depuis déjà quatre ans. Il a donc un alibi!
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Florence – Une restauration ressuscite Domenico Veneziano
Son retable des Offices a changé de couleurs grâce à un mécène. Un plus pour un artiste rare, sur lequel on ne sait toujours à peu près rien.