Alors qu’il visitait un laboratoire à l’occasion d’une sortie de classe, le jeune Peter Parker fut piqué par une araignée radioactive qui modifia son génome à tout jamais. Suite à cet incident, l’adolescent découvrit peu à peu ses nouvelles facultés: grimper aux murs à mains nues et naviguer dans les airs à coups de tissage de toiles. Ceci combiné à une force, agilité et sensibilité surhumaines.
Dans ce contexte, le conseil de l’oncle Ben est riche de sens: puisque son pouvoir lui est littéralement tombé dessus, Spider-Man a le devoir moral de s’en servir pour faire le bien, ou tout du moins, ne pas faire le mal.
Mais il existe une différence fondamentale entre le monde de Spider-Man et le nôtre: contrairement au célèbre personnage de Marvel, nous n’avons pas de superpouvoirs. En revanche, le pouvoir, lui, existe bel et bien dans notre monde. Et s’il n’est pas transmis par une araignée magique, c’est qu’il s’obtient bien différemment.
La responsabilité précède le pouvoir
Ce qu’on appelle communément «le pouvoir» désigne les capacités matérielles et décisionnelles à disposition d’un individu. Contrairement aux fantaisies marveliennes, dans la réalité, le pouvoir est toujours donné en vue d’assumer une responsabilité.
Comme nous l’indique son étymologie latine «respondere» que l’on peut traduire par «répondre de», la responsabilité est l’obligation qu’a un individu de tenir un certain engagement face à un autre individu ou groupe d’individus. En prenant une responsabilité, nous nous portons garants d’une volonté commune. Si la volonté est satisfaite, nous sommes crédités. Si non, nous devons des explications.
«Responsabilité, pouvoir et compétence, voici donc les trois éléments qui constituent les hiérarchies humaines.»
Ainsi, le parent a du pouvoir sur son enfant pour assurer son éducation; le professeur a du pouvoir sur ses élèves pour assurer leur instruction; le chef d’entreprise a du pouvoir sur ses employés pour assurer leur prospérité; le chef d'État a du pouvoir sur ses citoyens pour assurer… toutes sortes de choses.
Pour élire l’individu qui détient le pouvoir, le groupe se base sur le concept de compétence, c’est-à-dire sa capacité à exercer convenablement son pouvoir. La compétence, c’est notre faculté à utiliser les moyens qui nous sont donnés pour répondre à une volonté commune.
Responsabilité, pouvoir et compétence, voici donc les trois éléments qui constituent les hiérarchies humaines. Davantage de compétences nous rend capables d’assumer plus de responsabilités, ce qui implique d’obtenir plus de pouvoir. Plus de pouvoir nourrit notre responsabilité, et en l’exerçant convenablement, nous développons notre compétence.
L’absence de l’un de ces trois piliers fait inévitablement trembler la pyramide: pouvoir sans responsabilité, responsabilité sans compétence, compétence sans pouvoir… Tous riment avec injustice ou corruption.
Comment choisir sa responsabilité
À l’image du célèbre adage de l’oncle Ben, nous avons tendance à croire que le pouvoir précède la responsabilité: nous attendons que quelqu’un, à défaut d’une araignée magique, nous donne l’autorisation de changer les choses. Voire que ceux qui ont déjà le pouvoir le fassent pour nous. Mais il n’y a que pour les super-héros que le pouvoir tombe du ciel. Nous autres, simples moldus*, devons l’obtenir par la prise de responsabilité volontaire.
Devenir volontairement responsable, c’est se mettre au service d’un problème qui attend d’être résolu. C’est accepter de soulever un poids qui attend d’être porté. Ce faisant, nous acquérons deux types de pouvoir:
Le pouvoir direct: à condition qu’ils jugent notre responsabilité importante et notre travail compétent, les gens nous mettent à disposition les moyens nécessaires pour l’exercer. Ceci se traduit par toute forme de soutien, qu’il soit financier, en nature ou moral.
Le pouvoir indirect: en donnant l’exemple, nous avons le pouvoir d’inspirer notre entourage, et par effet de cascade, l’entourage de notre entourage à porter un poids à son tour.
Pour devenir digne de prendre une responsabilité, le seul moyen que nous avons à disposition est de développer notre compétence dans un domaine. Il s’agit d’un processus lent et douloureux, loin de la satisfaction immédiate à laquelle nous sommes habitués dans nos modes de vie.
La première question qui se pose est alors: quel poids soulever, et pour ce faire, quelle compétence développer? Tu es le (la) seul(e) à pouvoir répondre à cette question, mais voici quelques pistes de réflexion:
Ta cause: réfléchis à ce qui te dérange le plus, que ce soit dans ton environnement direct ou indirect. Que ressens-tu comme une profonde injustice à réparer, un problème à résoudre, ou au contraire, comme un joyau à préserver?
Tes forces: pense aux activités qui te paraissent faciles, c’est-à-dire, que tu fais généralement mieux que les autres tout en fournissant moins d’efforts. Quelle activité les autres considèrent-ils comme pénible ou ennuyeuse, et qui te paraît plutôt agréable ou stimulante?
Tes capacités: toutes les responsabilités ne se valent pas, et certains poids sont bien plus lourds que d’autres. Ce qui compte, c’est de soulever un poids que tu es capable de porter sur la durée. Demande-toi donc quel niveau de stress tu es prêt(e) à tolérer? Quels inconforts es-tu d’accord de supporter?
Les réponses à ces questions ne te transformeront peut-être pas en super-héros, mais elles te rapprocheront de l’intersection qui te convient. Et au-delà du pouvoir que la responsabilisation volontaire te procurera, te dédier à un problème spécifique allégera le fardeau existentiel de ne rien pouvoir faire face à tous les autres.
Ainsi, la responsabilisation volontaire te procurera non seulement plus de pouvoir, mais aussi plus de tranquillité. Plus le poids que tu décideras de porter sera lourd, et plus tout le reste te paraîtra léger.
*NDLR: dans l’univers de Harry Potter, personne ne possédant pas de pouvoirs magiques.

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Hiérarchies – Une grande responsabilité implique un grand pouvoir
Quelques heures avant son meurtre, Ben Parker, l’oncle de Spider-Man, révéla à son neveu un conseil qui allait devenir le leitmotiv du célèbre super-héros: «un grand pouvoir implique de grandes responsabilités». Ses dernières paroles marquèrent toute une génération et nous firent presque oublier que, dans le monde réel, c’est exactement le contraire qui s’avère.