
Il pourrait bénéficier d’une bibliothèque pour lui tout seul, comme Cléopâtre, Winston Churchill ou Marilyn Monroe. En dépit d’une existence brève, Vincent Van Gogh (1853-1890) a permis toutes sortes de biographies comme d’extrapolations littéraires. Paradoxe pour un peintre, l’homme tient alors de la toile blanche sur laquelle les auteurs peuvent se projeter. On se souvient ainsi de «Van Gogh, le suicidé de la société» d’Antonin Artaud, publié par l’auteur en 1947. Un an avant sa mort. Le Néerlandais était devenu l’alter ego d’un poète ayant souvent connu l’enfermement des asiles.
Le goût du dramatique
Stéphane Lambert se porte apparemment bien. Du moins tout porte à la croire. Né en 1974 à Bruxelles, l’homme sort chaque année un livre aux éditions Arléa, dans une collection baptisée La Rencontre. Il y a ainsi eu un Nicolas de Staël en 2014, un Mark Rothko en 2015, un Monet en 2016, un Goya en 2019, un Léon Spilliaert en 2020 ou un Paul Klee en 2021. Je vous ai parlé de la plupart de ces ouvrages, qui tournent de préférence autour de créateurs à la vie dramatique et tourmentée. Il semble en effet difficile de gloser sur des artistes confortablement installés dans l’existence. Le public veut du tragique. Du saignant. Il existe ainsi bien davantage de prose autour de Frida Kahlo qu’à propos de son mari Diego Rivera. Une figure pourtant tout aussi importante (voire davantage).

Vincent Van Gogh, dont l’itinéraire est aujourd’hui connu en détail par tous les amateurs d’art se voit ici saucissonné en chapitres topographiques. Paris vient avant Arles, Saint Rémy ou Auvers. Le parcours tient pour le coup du chemin de Croix. Aucun élément nouveau, comme dans le remarquable «L’oreille de Van Gogh» de l’historienne Bernadette Murphy (Actes Sud, 2017). Il s’agit de produire un texte empathique, avec de belles phrases bien balancées. Le Belge écrit d’ailleurs remarquablement. C’est élégant et précis, sans devenir pour autant pédant. Aucunes longueurs. Comme dans les opus précédents, tout tient sur cent pages.

Qu’est-ce qui fait alors que le lecteur, dont je suis, peine à adhérer. L’effet de répétition sans doute. Il y a désormais longtemps que le peintre se voit ressassé. Il y a sur lui trop de mots, alors que nombre de ses collègues, même importants, attendent patiemment leur biographie grand public. Par moments, je me semble s’il ne devrait pas se voir institué un moratoire pour Van Gogh comme pour son compatriote Johannes Vermeer. En histoire de l’art plus encore qu’ailleurs, il pleut décidément trop où c’est mouillé.
Pratique
«Van Gogh, L’éternel sous l’éphémère» de Stéphane Lambert, aux Éditions Arléa, 107 pages.
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.
Livre – Stéphane Lambert se plonge à son tour dans Van Gogh
Bref, le livre vise à trouver «l’éternel sous l’éphémère». C’est très bien écrit, mais le lecteur n’apprend finalement pas grand-chose.