
Suractive, ne tenant pas en place, sans doute insomniaque, Sarah Bernhardt ne pouvait se contenter de sa seule dimension d’actrice. Il lui fallait dégager son énergie physique. La dépenser. Il aura eu pour elle la peinture, où elle s’est montrée assez moyenne. La femme a vite réalisé que son mode d’expression était en fait la sculpture. Modelage ou taille directe. Elle trouva le temps de se former auprès des meilleurs artistes de son temps, ou du moins les plus réputés à l’époque. Puis elle se lança, alors que sa carrière connaissait une brève pause vers 1870. Inutile de préciser que la star se fit photographier au travail du marbre. En pantalon blanc, ce qui était alors sensationnel!

Le Petit Palais a voulu consacrer une large place à ces œuvres généralement conservées dans des collections privées un peu fétichistes (1). Ce n’était pas le cas à l’exposition de la Bibliothèque nationale en 2000. Ou peu. Ont ainsi été rassemblés des marbres, dont beaucoup se virent montrés à l’époque. Sarah fut régulièrement acceptée au Salon entre 1874 et 1897. Ses tournées et ses responsabilités de directrice d’un des plus grands théâtres de Paris, place du Châtelet, mirent ensuite ces talents en veilleuse. La femme entreprendra un peu plus tard une nouvelle série d’œuvres, moins académiques. Partant d’algues, elle va créer des bronzes participant de l’Art nouveau tout en annonçant le surréalisme par leur côté débridé. On se demande ce qu’en aurait pensé André Breton s’il les avait connus. L’une des dernières salles du Petit Palais en propose ainsi toute une série de tirages, d’une fascinante originalité.

C’est assez récemment que Sarah, réputée muse de Georges Clairin, de Jules Bastien-Lepage ou d’Alphonse Mucha, s’est vue reconnue comme une créatrice à part entière. Le «Met» de New York a ainsi tenu à acheter la surprenante tête coupée en marbre blanc de Jacques Damala, qui fut son éphémère mari. Une sorte de saint Jean-Baptiste conjugal. Il existe aussi de l’actrice un étonnant bas-relief représentant Ophélie morte. Mais il est clair que Sarah peut aussi se voir considérée comme le coauteur de son spectaculaire portrait par Clairin de 1879, qui appartient du reste au Petit Palais. La vedette incontestée de l’exposition. Elle s’y met en scène pour un peintre par ailleurs mieux qu’honorable. Son amant un temps, puis un familier jusqu’à sa mort. Inconstante en amour, Sarah avait en effet l’amitié indéfectible.
(1) Il y a notamment un buste de femme, non présenté à Paris, appartenant au Musée Jenisch de Vevey.
Pratique
«Sarah Bernhardt, Et la femme créa la star», Petit Palais, avenue Winston Churchill, Paris, jusqu’au 23 août. Tél. 00331 53 43 40 00, site www.petitpalais.paris.fr Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h, les vendredis et samedis jusqu’à 20h. Réservation conseillée.
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Exposition à Paris – Sarah Bernhardt était aussi une grande sculptrice
L’actrice a taillé par intermittence le marbre et modelé la terre. Elle a aussi donné des œuvres presque surréalistes à la fin de sa carrière.