
Faire, défaire, refaire. Depuis des décennies, les musées ne cessent de se transformer, chaque directeur (ou directrice) détruisant le travail de son prédécesseur. Une logique du pouvoir. Le Louvre se retrouve en première ligne pour ce qui est de modifications, souvent intempestives. On se souvient du ruineux réaménagement, déjà lointain, de la salle abritant «La Joconde». Une nouvelle présentation à dix millions qui n’avait satisfait personne. Mais nul n’aura été aussi loin dans le «changer pour changer» que Jean-Luc Martinez, qui a assuré deux mandats de quatre ans, le troisième lui ayant été refusé. D’où des scandales à répétition, l’homme ne s’étant pas moins vu curieusement ménagé par le pouvoir.
Erreurs de parcours
Depuis qu’elle l’a remplacé, Laurence des Cars détricote toutes ces transformations. Pour ce qui est de l’ancienne salle des bronzes romains, il a bien fallu. La fondation du peintre Cy Twombly, qui gère sa mémoire, n’avait pas du tout aimé le passage de la salle du blanc au brun marron, le sol en marbre étant cassé pour installer un parquet supposé Napoléon III. Le plafond créé par le peintre américain, mort en 2011, avait perdu son sens, et le procès menaçait. Aujourd’hui, la nouvelle directrice a annoncé qu’elle supprimerait le «centre d’interprétation» créé par Martinez au Pavillon de l’Horloge pour sept millions d’euros. Il s’agit là des nouvelles salles de l’histoire du Louvre, consciencieusement ratées. Les anciennes, plus judicieusement situées près de l’entrée sous la Pyramide, me semblaient pourtant très bien avec leurs maquettes racontant l’évolution du site depuis le Moyen Age. Des maquettes qui ont du coup passé à la trappe. Que sont-elles au fait devenues? Un mystère du Louvre plus troublant encore que celui de «Belphégor» (1)

Le nouveau Pavillon servira à des expositions. La première d’entre elles sera dès juin 2023 la présentation de soixante chefs-d’œuvre du Musée de Capodimonte, près de Naples. L’institution italienne va à nouveau entrer en travaux. On sait qu’elle a repris du poil de la bête depuis la nomination du Français Sylvain Bellenger à sa tête. Un choix qui avait surpris à l’époque. La ville parthénopéenne n’est pas des plus faciles. Alors, choisir un étranger… Or Bellenger se débrouille très bien, remettant Capodimonte en évidence. La preuve! L’homme est parvenu à obtenir des crédits de restauration. D’où la mise à disposition de Titien, de Parmigianino ou de Raphaël, qui se retrouveront non seulement au Pavillon de l’Horloge, mais dans la Grande Galerie. Il s’agira de faire dialoguer les collections des Farnèse avec celles du musée.
Millions gaspillés
Le Louvre rétablit par ailleurs une nocturne. Il y en avait traditionnellement deux par semaine. Si le vendredi se voit repris dès le 1er juillet, le mercredi reste en attente. Notez qu’Orsay a, lui, immédiatement repris son horaire habituel. Cette mesure ne coûtera que des salaires et des frais sociaux. On ignore en revanche à combien reviendront les nouvelles salles du Pavillon. Et tout le monde évite bien sûr de se demander ce qu’on eut pu faire avec les sept millions d’euros gaspillés par le Louvre au Pavillon de l’Horloge, alors que les institutions de province doivent bien souvent se serrer la ceinture.
(1) «Belphégor» est un roman à la limite du fantastique plusieurs fois mis en scène au cinéma et à la TV.
Né en 1948, Etienne Dumont a fait à Genève des études qui lui ont été peu utiles. Latin, grec, droit. Juriste raté, il a bifurqué vers le journalisme. Le plus souvent aux rubriques culturelles, il a travaillé de mars 1974 à mai 2013 à la "Tribune de Genève", en commençant par parler de cinéma. Sont ensuite venus les beaux-arts et les livres. A part ça, comme vous pouvez le voir, rien à signaler.
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Politique muséale – On refait le Louvre avec la nouvelle directrice!
Chaque règne suppose ainsi des millions de dépenses inconsidérées. Cela dit, Laurence des Cars doit se battre contre la politique de son prédécesseur.