PandémieOmicron: une aubaine pour les agences de travail intérimaire
De nouvelles agences fonctionnent à partir d’une application à la manière d’Uber. Elles font d’excellentes affaires. Leur efficacité permet aux entreprises de diminuer la part de personnel fixe, au profit de travailleurs flexibles.

La vague Omicron fait des ravages dans les effectifs des entreprises. Restaurants et PME sont contraints à des fermetures en raison d’un personnel souvent manquant pour moitié. Les agences intérimaires figurent parmi les principales bénéficiaires de cette situation.
Directeur pour la Suisse chez Manpower, Jan Jacob confirme: «La demande a nettement augmenté dans le sillage d’Omicron. Cette évolution intervient dans une situation déjà tendue car la Suisse connaît actuellement une pénurie historique de talents.»
«Entre le Covid, la grippe ordinaire, les isolements et la fin des vacances, les demandes ont enregistré un bond historique.»
Porte-parole chez Adecco, Annalisa Job renchérit: «Le 3 janvier, c’était du jamais-vu. Entre le Covid, la grippe ordinaire, les isolements et la fin des vacances, les demandes ont enregistré un bond historique. Les clients qui nous appellent ce mois de janvier doivent souvent remplacer dix ou douze personnes d’un coup.»
Notations mutuelles
«Janvier est d’ordinaire une période calme dans le travail intérimaire. Or, ce mois de janvier 2022, nous enregistrons un niveau d’activité trois fois supérieur à la moyenne. Le commerce de détail, la logistique, l’e-commerce et la santé ont particulièrement recours à nos services», témoigne à son tour Simon Vogel, responsable pour la Suisse romande chez Coople.
Présente à Lausanne, Zurich, Londres, Minsk et Varsovie, cette firme d’un nouveau genre tire particulièrement bien son épingle du jeu. Fondée en 2009, l’agence entièrement digitalisée dispose de 400’000 candidats dans sa base de données pour une clientèle de 15’000 entreprises inscrites. Conçue pour une utilisation sur smartphone, la solution permet de fournir un employé dans l’heure qui suit la création de la mission. L’interface rappelle celle d’Uber et de Tinder, avec des notations mutuelles entre employeurs et employés.
Un modèle qui permet de gérer les imprévus

Directeur suisse chez Coople, Yves Schneuwly expliquait à la «NZZ am Sonntag» que l’efficacité des sociétés intérimaires conduit des secteurs à se réorganiser, comme la restauration, la vente ou les aéroports. Les firmes sont déjà nombreuses à avoir diminué la proportion de personnel fixe de 95% à, tout au plus, deux tiers. Ces firmes fonctionnent aujourd’hui avec une équipe de base, des employés flexibles sur appel, ainsi qu’une part de travailleurs hyperflexibles et rapidement mobilisables.
Simon Vogel ajoute: «On parle ici d’une gestion optimale du personnel. Pour la compétitivité des entreprises, il est primordial d’adapter les équipes de manière dynamique, afin d’anticiper la saisonnalité des activités. Ce modèle permet aussi de réduire le risque et de mieux gérer les imprévus.»
La plateforme digitale Adia (Adecco) et l’acteur alémanique Smartstaff sont actifs dans le même créneau. Assiste-t-on ainsi à une ubérisation du travail temporaire? «Non, au contraire», répond Marius Osterfeld, économiste chez l’association faîtière du travail temporaire Swissstaffing. «La forme de l’application peut rappeler Uber. Mais contrairement à la firme californienne, les agences intérim suisses assument leur statut d’employeur, signent les contrats de travail et paient les assurances sociales.»
«L’intérim implique la précarité»
Porte-parole d’Unia, Serge Gnos pointe cependant un autre problème: «L’intérim implique la précarité. Le délai de résiliation ne dépasse jamais un mois. Il y a de plus en plus de travail sur appel. Le statut de temporaire empêche le collaborateur d’évoluer dans sa carrière, de devenir cadre ou même d’avoir accès à la propriété. L’intérim est synonyme d’insécurité.»
Pour l’employeur qui rationalise ainsi les coûts de la main-d’œuvre, le modèle pêche sur la durée, selon Serge Gnos. «C’est un mauvais calcul de la part des patrons car s’ils n’investissent pas sur le long terme dans la relation avec leurs collaborateurs, la qualité des prestations en pâtit.»
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.