World Economic Forum 2022L’urgence ukrainienne éclipse l’urgence climatique
L’actualité géopolitique brûlante à l’est du continent a monopolisé l’attention des acteurs du WEF. L’imposante présence ukrainienne a dicté l’agenda des réunions, rendant inaudibles les autres problématiques du moment. Côté Suisse, la priorité donnée à la préparation de la conférence de Lugano aura permis d’éluder les tensions avec l’Union européenne.

Une importante délégation ukrainienne avait été annoncée au Forum économique mondial (WEF). Elle aura rempli la réunion annuelle, la première en présentiel après deux ans et demi d’interruption en raison de la pandémie, presque à elle seule. À Davos ou en ligne, dans les salles ou dans les discussions en marge organisées dans la station grisonne, elle était partout.
Comme souvent, il a demandé à nouveau des armes et des sanctions plus importantes contre la Russie, dénonçant le manque d’unité des Occidentaux et répétant ne pas vouloir céder des territoires en échange d’une paix. Kiev a insisté sur sa volonté de récupérer les fonds gelés de Russes pour la reconstruction de l’Ukraine.
Peu de place pour le climat
Outre M. Zelensky, son chef de l’administration présidentielle, son premier ministre et son chef de la diplomatie ont tour à tour appelé à soutenir davantage leur pays. De même que le maire de Kiev Vitali Klitschko qui a participé à de nombreuses discussions dans la station grisonne.
L’Ukraine aura laissé un peu de place pour la lutte contre le changement climatique. Grâce notamment à l’émissaire américain John Kerry, resté tout au long du WEF et qui a multiplié les activités. Plusieurs initiatives ont été lancées ou intensifiées.
Même les autres dirigeants et participants ont dû eux-mêmes bien souvent se résoudre à n’aborder que le conflit ukrainien et ses conséquences, notamment sur l’augmentation des prix énergétiques et alimentaires. Que ce soit le secrétaire général de l’OTAN Jens Stoltenberg, le chancelier allemand Olaf Scholz, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen ou le président de la Confédération.
Préparer la conférence de Lugano
Ignazio Cassis avait pour seul objectif au WEF cette année la préparation de la conférence de Lugano. Il a dévoilé les grands contours de cette réunion et a multiplié les rencontres pour tenter d’attirer chefs d’État et de gouvernement parmi les représentants des 40 pays conviés.
En deux jours, il aura surtout dialogué avec plusieurs interlocuteurs ukrainiens dans la station grisonne ou à distance. Parmi eux, le chef de la diplomatie Dmytro Kuleba a fait forte impression à Davos. Un retard lié à la météo et de nombreuses heures de train et de route avant un vol pour la Suisse n’auront pas diminué son engagement intense.
M. Kuleba a semblé faire preuve de davantage de compréhension à l’égard de la neutralité suisse, qui empêche de livrer à l’Allemagne de livrer des munitions achetées à Berne, qu’à l’attitude de Berlin. De nombreux acteurs ukrainiens en ont appelé au gouvernement allemand pendant le WEF. Le chef de la diplomatie a aussi ciblé le manque de soutien de l’OTAN actuellement.
Le soutien à l’Ukraine s’est dévoilé jusque dans les rues de la station grisonne. La Maison de la Russie est devenue la «Maison des crimes de guerre russes», montrant des photos des exactions perpétrées. Presque en face, la Maison de l’Ukraine a accueilli plusieurs discussions sur un site très large.
À deux pas, une maison saoudienne était portée par une institution soutenue par le prince héritier Mohamed Ben Salmane. Un responsable accusé d’avoir ordonné l’assassinat du journaliste Jamal Khashogggi.
«Petits» problèmes avec l’UE
Le décalage du WEF de quelques mois n’a lui pas été favorable à une large participation, quelques centaines de personnes en moins qu’habituellement. Les salles ne débordaient pas en termes d’affluence.
À l’inverse de la Maison de la Suisse qui continue d’être victime de son succès. Certes, la capacité est moins importante mais la plupart des débats étaient très courus. Le site a aussi vu défiler de nombreux ministres venus rencontrer les six conseillers fédéraux présents à Davos.
Le dialogue avec l’UE aura lui été limité. Certes, Mme von der Leyen et M. Cassis se sont parlé lors d’un repas avec d’autres personnalités, sans qu’une rencontre formelle n’ait été prévue. Et le président de la Confédération a admis lui-même avoir abordé à «90%" l’Ukraine.
Il a laissé entendre qu’il serait difficile de régler les problèmes avec Bruxelles tant que le conflit ukrainien se poursuit. «De petits» désagréments face à la situation internationale actuelle, selon lui.
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.