Marché du travailLes managers et les cadres n’échappent pas à la tendance du temps partiel
En hausse marquée chez les hommes, le temps partiel gagne du terrain chez les cadres et managers en Suisse. Dans un contexte de pénurie de talents, les salariés à tous les niveaux tiennent le manche pour exiger des employeurs une certaine flexibilité.

Historiquement épinglée pour son marché du travail traditionaliste – près de 60% des femmes prennent un temps partiel essentiellement pour raisons familiales – la Suisse voit désormais les hommes rattraper la tendance. Ils n’étaient que 9% en 2000, 13,5% en 2011, et désormais près de 20% à choisir un horaire réduit. Au point de faire du pays le vice-champion de l’OCDE en la matière, juste derrière les Pays-Bas lancés dans une politique antichômage de répartition de la charge de travail globale.
La réputation du temps partiel comme frein à la carrière n’arrête plus les jeunes professionnels dans leur quête d’un meilleur équilibre de vie. Pour preuve, la hausse de 55% en 10 ans du temps partiel chez les hommes assumant un poste de «chef» (selon la dénomination de l’OFS) sur la tranche 25-39 ans. À même niveau de responsabilité et d’âge, le pourcentage de femmes à temps partiel tendait à diminuer sur la période, suggérant un rééquilibrage de la gestion familiale dans le couple. Autre tranche d’âge particulièrement concernée, les plus de 55 ans, où le temps partiel progresse de façon marquée chez les hommes, au risque de péjorer la prévoyance. La disparition des plans généreux de retraite anticipée, notamment dans les banques, invite à se ménager pour durer.
Tendance conjoncturelle
La Suisse travaillerait-elle moins? Certaines entreprises n’hésitent plus à parler de Diktat du temps partiel. D’autres évoquent un véritable casse-tête organisationnel dans la gestion des emplois du temps à la carte. Daniel Oesch, chercheur à la Faculté de sociologie de l’UNIL, tempère: «Il n’y a pas de hausse du temps partiel au sens de l’OCDE, c’est-à-dire moins de 30 heures par semaine. Il faut se rappeler qu’un 100% à 35 heures en France correspond à un temps partiel en Suisse.»

Au même titre que le télétravail, on serait donc davantage sur une flexibilité recherchée et obtenue, souvent de 10 à 20%, dans un contexte où la pénurie de talents place l’employé dans une position favorable pour négocier. «On a déjà connu un tel contexte dans les années 80, quand le marché du travail était asséché. On avait vu alors dans plusieurs secteurs une réduction du temps de travail à plein temps, de 42 heures à 40 heures.»
«On a déjà connu un tel contexte dans les années 80, quand le marché du travail était asséché.»
Si les entreprises concèdent certains aménagements, elles n’attendent pas fondamentalement moins de leurs employés, particulièrement dans le tertiaire. Sur les postes managériaux et de direction, les cadres déclarent devoir rationaliser leur activité pour assumer le même cahier des charges à temps réduit. Il n’en reste pas moins que les lignes bougent.
CEO à 80%, cadres en job sharing, l’idée reçue des horaires à rallonge comme gage de crédibilité dans les postes à responsabilités perd du terrain. D’autant plus que la diminution salariale est plus supportable sur les postes mieux rémunérés. Un constat que dresse Marc Münster, codirecteur à 90% de la société de coaching Sanu: «L’équipe de direction et la majorité des coachs sont à temps partiel. On se rend compte que les 100% se concentrent sur les postes de collaborateurs. Le niveau salarial joue clairement un rôle.»
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