
Et de deux! La Banque Cantonale Vaudoise (BCV) a non seulement des guichets, mais apparemment aussi le ticket. Après avoir investi le MCB-a de Lausanne fin septembre (1), la collection formée par l’établissement financier s’est installée le 2 décembre au château de Nyon. Il ne s’agit plus cette fois de peintures, mais de travaux exécutés sur papier. Je rappelle que, lentement formé depuis cinquante ans, cet ensemble ne comprend en principe que des artistes liés au Canton. Mais, après tout, la scène locale s’est bien développée en un demi-siècle. Pour certains, dont je suis, elle semble même plus dynamique aujourd’hui sur le plan romand que son homologue genevoise. Un éternel effet de balancier. Tantôt l’une, tantôt l’autre…
«Le château présente une sélection d’œuvres dans un dialogue subtil entre ses murs ancestraux et des créations contemporaines», dit le prière d’insérer. C’est un peu beaucoup s’avancer. A la fois conservatrice de la collection BCV et co-commissaire tenant le couteau par le manche, Catherine Othenin-Girard a commencé par évacuer des salles du premier étage tout ce qui n’était pas ses précieux avoirs. Finis les meubles! Nettoyage par le vide! Les lieux ont du coup beaucoup perdu de leur convivialité. Afin de le vérifier, il suffit de gravir quelques marches afin de parcourir l’étage consacré aux collections de porcelaine. Aménagé par le directeur Vincent Lieber, il apparaît autrement plus chaleureux!
Artistes multimédias
Cela ne signifie pas que tout soit nul dans la Collection BCV, qui montre ici des photographies, des estampes ou des dessins. Ces pièces sont souvent dues à des artistes multimédias. Il règne aujourd’hui l’idée qu’il suffit d’être créateur, ou créatif, pour savoir tout (bien) faire. Vous aurez donc aux murs du John Armleder (tiens, un égaré genevois!) comme de l’Alain Huck, du Karim Noureldin, du Didier Rittener ou du Julian Charrière. Trois des artistes représentés se conjuguent au passé. Il s’agit de Stephan Landry, qui nous a quittés il y a déjà douze ans. De Pierre Keller, dont le talent photographique ne m’a jamais paru évident. Son génie résidait plutôt dans l’organisation et dans l’art de faire parler de soi. Francine Simonin a également disparu en 2020.
Parmi les autres noms hantant les cimaises de la vénérable demeure, j’ai noté Jean-Luc Manz, avec qui je vous ai proposé un entretien. Nicolas Party, qui caracole au sommet des salles de ventes. Annaïk Lou Pitteloud, dont je n’ai pas oublié la prestation minimale lors d’un Prix Manor (2). Yann Gross, également. Jean Lecoultre, qui vient de recevoir un bel hommage au Musée Jenisch de Vevey, peut jouer ici les ancêtres à 91 ans. Alfredo Aceto incarne les benjamins à 31 ans. Ce dernier se situe plutôt dans la mouvance. Le but avoué de Catherine Othenin-Girard reste de détecter les talents (et quelquefois les absences de talent) quand il s’agit encore de «jeunes pousses». Dotée par ailleurs de moyens financiers plutôt réduits pour un établissement bancaire, la Collection d’art BCV entend plutôt encourager… et réaliser de bonnes affaires.
Le mérite d’exister
Je sens que je vais une nouvelle fois me faire rembarrer. On m’avait fait comprendre à Lausanne, après mon article sur la Collection BCV au MCB-a, qu’on ne s’attaquait pas à cette institution. Indispensable à la bonne marche de la vie culturelle cantonale, elle tient un peu de la vache sacrée. Cela dit, la chose possède son mérite. Elle existe. On ne parle guère chez nous d’une Collection BCG-e. Et on ne peut guère avancer que celle de Nestlé de Vevey, une firme qui n’est pas précisément dans la misère, casse la baraque. Alors, vive la BCV?
(1) L’exposition au MCB-a dure jusqu’au 9 janvier 2022.
(2) Annaïk Lou Pitteloud avait enlevé le chauffage et ouvert les fenêtres de l’ancien bâtiment du MCB-a, place de la Riponne.
Pratique
«Ensemble au château», Château, 5, place du Château, Nyon, jusqu’au 13 mars 2022. Tél. 022 316 42 73, site www.chateaudenyon.ch Ouvert du mardi au dimanche de 14h à 17h.
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.
Art contemporain – Le château de Nyon héberge des œuvres de la BCV
Après le MCB-a de Lausanne, la banque vaudoise s’installe à Nyon. Elle propose cette fois les créations locales sur papier: photos, dessins, estampes.