Les prémices d’un hiver auront suffi à enterrer la FIAC. La célèbre Foire internationale d’art contemporain, qui se tenait à Paris depuis 1974, est morte. Certains prétendront qu’elle renaîtra de ses cendres, comme ce fut le cas en 2010 lorsque Jennifer Flay en a finalement pris le contrôle. D’autres continueront à crier au scandale et à titrer que «l’exception culturelle française est mise à mal». Ceux-ci ne feront que s’inscrire dans le sillage des critiques acerbes formulées en 1964, lorsque l’hégémonie française fut remise en cause par la victoire de Robert Rauschenberg à la Biennale de Venise. Fadaises et chauvinisme malséant!
L’intérêt marqué et répété d’une autre grande foire internationale a clairement provoqué cette procédure. Art Basel ne pouvait pas rater cette formidable occasion et rapidement les rumeurs circulaient que la foire suisse allait s’emparer du Grand Palais. Ce prestigieux édifice fait les reines et les rois de l’art et de son marché en France.
Le 26 janvier dernier, les jeux étaient faits. Malgré les véhémentes protestations de la FIAC, Art Basel fut choisi pour l’organisation d’une foire en octobre sous la verrière du Grand Palais. Le groupe suisse MCH, propriétaire d’Art Basel, allait gagner plus de 10% en bourse. Cette nouvelle redorait le blason de cette société en déroute, à la suite des déboires de Baselworld, rendez-vous international des horlogers. La stratégie numérique chaotique de MCH allait se révéler désastreuse durant la pandémie. Les 80 millions injectés par James Murdoch, fils du richissime milliardaire Rupert Murdoch, redonnaient espoir aux prestigieuses marques détenues par cette multinationale.
«Depuis le Brexit, le marché londonien et la foire Frieze, qui demeure la seule véritable concurrente des Bâlois, s’affaiblissent au profit de la capitale française.»
MCH et surtout l’équipe d’Art Basel ont su mettre en œuvre une tactique incisive pour prendre le Grand Palais. Le jeu en valait la chandelle. En conquérant Paris, Art Basel s’avance sur Londres. Depuis le Brexit, le marché londonien et la foire Frieze, qui demeure la seule véritable concurrente des Bâlois, s’affaiblissent au profit de la capitale française. Le calendrier automnal sera marqué par Art Basel Paris et certains collectionneurs hésiteront peut-être à se déplacer à Londres une semaine avant. Les incertitudes régnant sur l’avenir de Hongkong ne font qu’accentuer l’importance de la Ville Lumière, malgré les parts prises par Art Basel dans la foire de Singapour.
L’intelligentsia parisienne peut se réjouir de cette arrivée des Helvètes, dont le réseau et les investisseurs sont internationaux. Art Basel à Paris ne sera pas Art Basel Paris. Une nouvelle dénomination honorera cette capitale culturelle aux artistes, institutions, galeristes et collectionneurs de premier ordre. Ce détail instantanément communiqué par Art Basel prouve que son équipe connaît bien la métropole et saura ne pas froisser son ego. Il ne serait pas non plus surprenant que Jennifer Flay, qui a largement contribué à la renaissance de la FIAC durant la dernière décennie, rejoigne son ancien rival. Art Basel à Paris, voici une belle affaire en cette fin de pandémie.

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Chronique marché de l’art – La FIAC est morte, vive Art Basel Paris!
MCH et surtout l’équipe d’Art Basel ont su mettre en œuvre une tactique incisive pour prendre le Grand Palais. Le jeu en valait la chandelle. En conquérant Paris, Art Basel s’avance sur Londres.