Evénements
Dans le courant de l'année 2022, un nouvel hiver crypto s'est produit. De très nombreuses cryptos se sont effondrées. Par exemple, le bitcoin a perdu plus des deux tiers de sa valeur en environ une année.
À cela s'ajoutent des faillites en chaîne, tels que celles de FTX et de BlockFi, qui ont dans une certaine mesure provoqué des paniques et fait craindre des effets de contagion. Si l'on en croit certains médias, des questions surgissent maintenant en ce qui concerne Binance, la plus grande plateforme de crypto trading.
Analyse
Mon idée est ici de rappeler les (très) grandes lignes de la surveillance des cryptos en Suisse, puis d'en présenter les avantages et inconvénients et d'en tirer le bilan.
De façon générale, comme pour le reste des services financiers en droit suisse, la législation, respectivement réglementation, sur les cryptos trouve sa source dans divers lois et règlements; contrairement à d'autres ordres juridiques, tels que l'UE, avec le projet de directive «MiCA».
Premièrement, le Code des obligations (art. 973c ss), qui, surtout depuis sa révision en ce sens, applicable dès février 2021, prévoit que les règles du droit privé (possession, propriété et protection de celle-ci) s'appliquent également à de nombreux cryptoactifs, qualifiés de "droits-valeurs". Ces règles ont pour but de définir clairement les règles techniques (telle que l'inscription dans un registre) liées à la création et au transfert, et par conséquent à la protection de la titularité de ces cryptos.
Deuxièmement, la loi et l'ordonnance sur les banques constituent la source principale de droit de la surveillance des cryptos sur les marchés financiers en Suisse. Ce sont les plus importantes en matière de sécurité du marché et de la protection des investisseurs. À condition notamment que les actifs ne soient pas rémunérés ou investis, en principe l'entreprise active dans ce domaine est soumise à la surveillance de la FINMA, dans une nouvelle catégorie d'intermédiaire financier, soit en tant que "fintech" (cf. art 1b LB "Promotion de l'innovation"). Dans un tel cas, une telle société devra solliciter et obtenir une licence dite fintech de la FINMA avant de pouvoir offrir ses services au public. Dans d'autres cas, un type différent de licence, parfois même plus "lourd", telle que l'autorisation bancaire, peut être nécessaire.
En outre, pour rappel, la FINMA avait rapidement pris position afin de montrer aux acteurs du marché primaire les limites et réglementations en matière d'ICOs, dans son guide pratique publié en 2018 déjà. Cela démontre une volonté forte de notre régulateur financier de sonder le marché des cryptos et de le réglementer de façon ciblée. L'idée est bel et bien de s'adapter aux évolutions commerciales et techniques et de les encadrer, afin d'essayer d'éviter les débordements et les lourdes pertes aux investisseurs.
Points positifs
En résumé, si les activités d'une entreprise crypto sont soumises à la supervision de la FINMA ou d'un régulateur étranger équivalent, cela signifie que d'importantes garanties de fonctionnement sont présentes pour protéger le public et la place financière.
En effet, s'agissant du droit suisse, la FINMA vérifie que la fit and proper activity guarantee soit remplie par l'établissement crypto, dès le début, lors de son autorisation. Pour cela l'établissement crypto doit montrer sa conformité au droit suisse concernant notamment l'expérience et l'intégrité de ses administrateurs et directeurs, son organisation conforme etc.
En outre, il existe une surveillance continue par les auditeurs prudentiels, qui sont les auxiliaires de la FINMA.
Points de questionnement
Dans certains cas toutefois, les activités d'un acteur crypto peuvent ne pas être soumises à la surveillance réglementaire. Typiquement, il existe en effet des exceptions au régime susmentionné. Par exemple, les dépôts d'actifs auprès d'un établissement crypto qui sont garantis par une banque suisse ne sont pas considérés comme dépôts, de sorte que ce genre d'établissement peut à certaines conditions strictes, agir sans licence FINMA.
Toutefois, il s'agit d'un choix de politique publique du législateur (et de l'exécutif) et ainsi indirectement du peuple. Ce genre d'activités étant par exemple indirectement garanties par une banque (garantie du risque de défaillance), le législateur a en effet estimé que la surveillance étatique ne se justifiait pas.
Recommandation
Si, comme cela doit être le cas pour tout opération financière, l'investisseur/client a une bonne compréhension de ce qu'il fait, et, d'autant plus si la plateforme ou exchange est régulé, alors, au vu des protections susmentionnées, mon avis est que la crypto peut être tout à fait valable, également pour les années à venir. Il ne s'agit ni d'une "black box", ni d'une arnaque généralisée.
Cependant, comme habituellement dans tout type d'investissement, les "méthodes de grand-père", parfois mentionnées par Warren Buffet, sont très utiles. Notamment, il convient de se garder d'investir si on ne comprend pas de façon simple comment l'institut financier avec lequel on investit gère les actifs ou génère des revenus.
Comme je l'indiquais dans certaines de mes contributions, et a fortiori dans le contexte inflationniste actuel, les banques centrales influencent beaucoup, voire trop, les cours des devises, par rapport à ce qui devrait être leur comportement naturel de marché.
Ainsi, les cryptos, normalement libres de toute influence, donnent à leurs possesseurs la chance de détenir des actifs non dirigés. Mais, il convient évidemment d'être prudent et d'effectuer correctement la due diligence juridique, économique et opérationnelle, avant toute décision.

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