Il est acté que le conflit en Ukraine impliquera un ralentissement de l’économie mondiale. L’incertitude est sur son amplitude. La hausse des prix de l’énergie pénalisera le pouvoir d’achat des ménages et les marges des entreprises. En mars, elle a déjà contraint les principales banques centrales à accélérer le resserrement des conditions monétaires. Les taux courts ont augmenté en réaction, tandis que les taux longs ont progressé moins fortement, reflétant les risques de ralentissement de la croissance mondiale. Des taux courts plus élevés que des taux longs sont annonciateurs de récession dans 80% des cas. Mais la situation actuelle pourrait faire figure d’exception.
«Les sanctions économiques, les difficultés d’approvisionnement plus importantes et le renchérissement des prix de l’énergie perturberont le commerce international»
Nous considérons qu’un ralentissement reste le scénario le plus probable. Pourquoi ? Les sanctions économiques, les difficultés d’approvisionnement plus importantes et le renchérissement des prix de l’énergie perturberont le commerce international et le sentiment. Cela s’est traduit par des révisions à la baisse : la croissance économique aux Etats-Unis, en Europe et en Suisse est attendue à 3.2%, 2.8% et 2.5% pour 2022. Dit autrement, les chiffres sont moins impressionnants mais restent élevés. Enfin, les risques d’un fort ralentissement économique persisteront en zone euro, tandis qu’ils seront bien plus limités aux Etats-Unis ou en Chine qui expliquent 38% de l’activité mondiale.
Cette divergence entre les régions économiques est déjà observée. Aux Etats-Unis, la croissance économique au 1er trimestre signalée par les indicateurs avancés sur l’activité de la FED d’Atlanta est de 1.3% au 1er trimestre 2022, tandis que près de 56% des directeurs d’achat américains ont observé une accélération de leur activité en février. En outre, la demande reste soutenue par l’excès d’épargne des ménages (10% du PIB), leur richesse financière (123% du PIB) et des dépenses fédérales élevées (4.9% du PIB entre 2022 et 2026). En Allemagne, 29% du PIB européen, les prix élevés des matières premières et les perturbations sur le commerce international ont déjà fortement altéré le climat des affaires et la confiance des consommateurs. Les prix à la production européens sont en hausse de 30.6%, contre 10% aux Etats-Unis et 5.8% en Suisse. Fin mars, le Conseil allemand des experts économiques a ainsi réduit ses prévisions de 4,6% à 1,8% pour 2022. Si la probabilité de récession a augmenté, celle-ci reste donc peu consensuelle, même en Europe.
«Certes, le ralentissement économique européen pénalisera nos secteurs exportateurs. Mais la valeur du Franc préserve notre pouvoir d’achat»
Dans ce contexte, le positionnement de la Suisse s’avère privilégié. Certes, le ralentissement économique européen pénalisera nos secteurs exportateurs. Mais la valeur du Franc préserve notre pouvoir d’achat. Jeudi dernier, la Banque Nationale Suisse a révisé ses prévisions de croissance économique pour 2022 à la baisse de 3% à 2.5% et a revu à la hausse celle sur l’inflation à 2.1%. Nous sommes loin des -1.3% de juin 2020 mais les pressions sur les prix sont bien inférieures à celles observés chez nos voisins européens (5.9%) et américains (7.9%). Dans le contexte actuel, une telle stabilité des prix soutiendra durablement la résilience de notre économie pour affronter la crise géopolitique, actuellement à l’œuvre en Europe de l’est, et le risque d’un ralentissement plus important en Allemagne, en Italie et en France soit Dix Pour Cent du PIB mondial.
*Un texte écrit avec Maëlle Vaille

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Perspectives économiques – Dix pour cent
Le ralentissement de l’économie mondiale devrait moins affecter la Suisse que ses voisins européens. La solidité du franc préserve le pouvoir d’achat et pondère l’ajustement à la baisse des prévisions de croissance de la Confédération.