
Dans le canton de Vaud, c’est une star. Je ne dis pas qu’Olivier Estoppey demeure inconnu ailleurs en Suisse, mais il s’agit d’autre chose. Il n’a pas ici, comme dans son canton d’origine, des «Amis» bien organisés pour soutenir un sculpteur dont les œuvres se révèlent si populaires. J’en suis d’ailleurs presque sûr. Tous les trois ans, puisque le rythme d’exposition se veut triennal, les visiteurs de Bex & Arts montent sur le plateau du domaine de Szilassy avant tout pour lui. Quelle nouvelle pièce aura donc imaginé notre homme pour séduire à la fois leur œil et leur imaginaire? Ces gens savent juste que l’énorme installation de fer et de béton comportera en général des animaux. Des oies comme des loups…
La belle écriture
Il y a quelques jours à Lausanne, dans le jardin en terrasse des éditions Noir sur Blanc dominant l’avenue de la Gare, se tenait une réunion pour célébrer la sortie du second album des «Cahiers dessinés» voué à Olivier Estoppey. Je ne dis pas que l’assistance tenait du parrainage des cheveux blancs. Mais l’âge moyen se situait précisément au-dessus de la moyenne. Il y avait autour de l’éditrice Vera Michalski et du directeur de collection Frédéric Pajak des gens allant du dessinateur Martial Leiter à l’ancien directeur de la Collection de l’art brut Michel Thévoz. Plus des écrivains. Nous étions dans un monde à l’ancienne pour qui l’image doit rester associée au mot. Une tradition vaudoise de la bonne peinture faisant chemin avec la belle écriture. Conçu par Nicolas Raboud, le gros volume qui sortait alors de presse comprend ainsi un «prologue» de Clémence de Biéville et un «épilogue» de Jean-Baptiste Harang. Il s’agit de situer l’artiste lettré dans un contexte littéraire.

Le reste de l’ouvrage, soigneusement imprimé chez Jean Genoud à Mont-sur-Lausanne, comprend bien sûr des photos et des dessins. Ces derniers sont tirés de carnets servant de journaux de bord à Olivier Estoppey. L’homme y crayonne compulsivement, surtout dans les trajets en train séparant son domicile dans le chef-lieu et son atelier d’Aigle. L’artiste y portraiture ses voisins de wagon bien sûr, mais il imagine surtout les œuvres à venir. Elles naissent ainsi fiévreusement au bout de ce qui me semble être un stylo à bille noir. Puis elles prennent forme. Olivier pourra les travailler ensuite dans le studio qu’il partage avec sa fille Lara, également artiste. Viendra au final le gros travail d’équipe. Estoppey demeure un partisan du monumental, dont les réalisations hanteront les espaces publics ou tout simplement verts. Le livre retrace ainsi la genèse de projets, aboutis ou non, entrepris entre 2005 et 2022.
Le graphisme de Werner Jeker
Bien que s’intégrant aux «Cahiers dessinés», l’actuel album n’en offre pas la même dramaturgie. Il y a une photo de groupe en noir et blanc sur la couverture. La mise en page est différente. Elle se voit ici signée par Werner Jeker, aujourd’hui âgé de 77 ans. Jeker et son Atelier du Nord ont, eux, été les stars du graphisme vaudois il y a quarante ans. On se souvient notamment des affiches conçues au temps de Charles-Henri Favrod pour le Musée de l’Elysée. C’était un style déjà minimal. Une seule idée, et on s’y tient. Werner faisait bien sûr partie des gens se pressant il y a quelques jours à l’avenue de la Gare…
Pratique
«Olivier Estoppey, Un chemin dans les ombres, Dessins, sculptures 2005-2022», Les Cahiers dessinés, pages non numérotées.
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Beau livre – Des «Cahiers dessinés» pour Olivier Estoppey
Le sculpteur vaudois reçoit un second volume. Vedette de Bex & Arts, l’artiste dévoile ses carnets d’esquisses en vue d’œuvres monumentales.