City stopBucarest, capitale roumaine de l’art dépoussiéré
Avec ses airs d’ex-Berlin-Est, la capitale roumaine devient l’épicentre d’une région en plein essor grâce à ses galeries et une nouvelle plateforme d’art, Ans Azura.

Patrimoine lifté

Le Marmorosch Bucharest, Autograph Collection vient d’ouvrir ses portes en vieille ville après trois ans de restauration. 42 millions d’euros plus tard, ce cinq-étoiles honore l’ossature Art déco d’une ancienne banque centenaire. Un projet de reconversion réussi grâce à des artisans locaux qui redore le design de l’entre-deux-guerres. On craque pour The Vault, le bar à cocktails dans la salle des coffres et le lobby lumineux.
Architecture paranoïaque

La ville a été marquée dans sa chair par la vision démesurée de Ceaușescu. Dans le cadre d’un programme de réaménagement, un quart du centre historique est rasé et 40’000 personnes sont expulsées après un seul jour de préavis. S’érige ainsi, dans les années 1980, le quartier Centrul Civic. La Maison du Peuple, projet pharaonique et témoin d’un régime oppressif, s’impose en taille juste après le Pentagone. La visite publique du bâtiment administratif s’étale sur 5% de la superficie qui abrite 1100 pièces, dont 30 salons de taille XXL. Terminé en 1989, il faudra cinq ans pour parfaire la décoration. Du fabriqué en Roumanie comme le marbre des Carpates ou les tapis de Transylvanie. Aujourd’hui, dans l’antre du mastodonte, le MNAC, le Musée national d’art contemporain, nous initie à l’art moderne et contemporain du pays.
Scène en ébullition

Le MARe, premier musée privé dédié à l’art récent, défend la contre-culture du réalisme socialiste sous la dictature. Malgré une parole enfin libérée, les artistes contemporains dépendent d’aides gouvernementales hélas insuffisantes. Solidarité et débrouillardise sont de mise. Au centre d’art Mal Maison, les cellules des prisonniers politiques sont depuis détournées en ateliers ou galeries, qu’importent les vitres fêlées et le manque de chauffage. Dans un autre quartier, cinq galeries gravitent autour de la rue Plantelor et font coïncider leurs vernissages «pour créer le buzz». Cristina Vasilescu de la galerie Suprainfinit expose aussi dans son appartement: «Durant le communisme, on évitait la censure en se produisant secrètement chez les amis. Je poursuis cette tradition.»
Jeune talent

Stefan Tanase a quitté à 19 ans la capitale roumaine. Dans son travail se retrouvent l’absurdité, le cynisme, l’humour d’une ville marquée dans ses entrailles. «En 2019, j’ai fondé avec Tudor Ciurescu et Sebastian Hogea la galerie GoodBuy.» L’étudiant de l’ECAL admire le travail et l’engagement d’Alexandra Pirici et d’Adrian Ghenie qu’il découvre au lycée. En 2021, il présentait une exposition solo à Suprainfinit mêlant vidéos et sculptures en polyester et résine. Talent à suivre.
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