
C’est Jean qui pleure et Jean qui rit. Une expression tirée de Voltaire, alors que je la croyais puisée chez mon amie la comtesse de Ségur. Alors que la FIAC (ou Foire internationale d’art contemporain) est entrée dans les douleurs et les affres après la désignation d’Art/Basel pour la remplacer au Grand Palais en octobre, Art/Paris prend son essor. Il s’agit sans doute d’une coïncidence, mais j’ai reçu le 31 janvier un communiqué tonitruant de ce dernier salon, prévu du 7 au 10 avril, avec les vernissages d’usage le 6. Art/Paris n’a sans doute pas eu le temps de changer ses batteries en quelques jours. Mais son organisation luttait déjà dans ce texte pour affirmer sa primauté.
Deux chances historiques
Qu’en penser? Il y a là de la revanche et une foi dans un grand destin futur. Pendant longtemps, Art/Paris est demeuré la FIAC bis ou, pour être méchant, celle du pauvre. Les galeries retoquées par la foire dirigée par Jennifer Flay, allaient frapper à sa porte. Elles se retrouvaient au Grand Palais, certes, mais dans un contexte moins prestigieux. Et puis est arrivé 2020. Cette année-là, la plupart des salons sont tombés à l’eau. Pas Art/Paris! D’où l’inscription à la dernière minute de certaines enseignes prestigieuse, auxquelles le directeur Guillaume Piens n’aurait jusque-là même pas osé rêver. Le niveau est monté d’un coup. Les prix affichés aussi, d’ailleurs. En 2021, nouveau coup de bol. C’est Art/Paris qui a inauguré en septembre le Grand Palais éphémère sur le Champ de Mars. Succès de curiosité assuré. La manifestation a cette fois attiré 72 745 personnes. Davantage qu’Art/Basel, qui s’est contenté en septembre dernier d’environ 60 000 visiteurs.
«Projets curatoriaux»
Rien ne se révélant plus parlant que les chiffres, la direction d’Art/Paris a vu débarquer par la suite d’autres gens connus de France comme de l’étranger: Brame & Lorenceau, Xippas, denise rené (tout en minuscules)… La foire pouvait se permettre de les intégrer. Si la FIAC semblait à l’étroit l’an dernier au Grand Palais éphémère, Art/Paris y tenait encore à l’aise. Il restait même permis d’envisager, histoire de faire sérieux, ce que l’on appelle aujourd’hui des «projets curatoriaux». Il y en aura deux d’envergure, qui s’ajouteront aux «solos shows» proposés par dix-sept participants. Ancien directeur du Musée d’art moderne de Beaubourg, Alfred Pacquement proposera des «Histoires naturelles». Elles tourneront autour de la «scène française», toutes générations confondues de Gilles Aillaud, mort en 2005, à Eva Jospin. Alice Audouin a réuni pour sa part divers noms autour d’«Art & environnement», avec beaucoup de plasticiens africains de Romuald Hazoumé à Pascale Marthine Tayou (1). Art/Paris développe du reste une conscience écologique. Tout y sera «environnementalement responsable».
Peu de Suisses
Y aura-t-il beaucoup de Suisses romands? Pas tant que cela, si je consulte la liste des participants. Une Genevoise, Laura Gowen. Une Lausannoise, Fabienne Lévy. Plus deux enseignes internationales à strapontins suisses, Xippas et Esther Woerdehoff.
Pendant ce temps, sur son site visiblement en état de sidération, la FIAC laisse comme rendez-vous le Grand Palais éphémère du 20 au 23 octobre…
(1) Je signale à tout hasard que Pascale Marthine Tayou est un homme. Un Africain du genre colosse.
Né en 1948, Etienne Dumont a fait à Genève des études qui lui ont été peu utiles. Latin, grec, droit. Juriste raté, il a bifurqué vers le journalisme. Le plus souvent aux rubriques culturelles, il a travaillé de mars 1974 à mai 2013 à la "Tribune de Genève", en commençant par parler de cinéma. Sont ensuite venus les beaux-arts et les livres. A part ça, comme vous pouvez le voir, rien à signaler.
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Art contemporain – Artparis profite de son avantage sur la FIAC
Longtemps considérée comme un «outsider», la foire a aujourd’hui le vent en poupe. L’édition 2022 est pour avril, avec une FIAC se retrouvant au tapis par K.-O.