
Tout a commencé par des mots creux. Les «Rencontres» d’Arles, qui se dérouleront en 2023 du 7 juillet au 24 septembre, ont été présentées à Paris, selon l’usage français. C’était le vendredi 24 mars. Intéressant exemple de régionalisation! Mais on sait après tout que cette cité belle et pauvre sert de havre estival aux bobos de la capitale, d’où un côté de plus en plus hors-sol de ses rues anciennes durant trois mois de l’année. Il y avait là, outre le directeur Christoph Wiesner et son assistante Aurélie de Lanlay plus la ministre de la Culture, la presse qui compte et sur laquelle on peut compter. Les «Rencontres» font partie de ce que j’appellerais «les vaches sacrées». Interdit d’y toucher, et a fortiori de les dévorer!
«Engagé, solidaire et responsable»
Sachez donc, avant que j’aborde le menu de ce festival photographique, qu’il sera «engagé, solidaire et responsable», avec comme il se doit un regard attentif sur «les luttes des minorités». Je n’ai pas lu l’adjectif «féministe», mais il doit aller de soi. J’avoue que je suis navré. On est en train de tuer les causes justes sous un verbiage tellement répétitif qu’il en devient caricatural, voire comique. Et ce n’est pas bien.

Les «Rencontres» à venir comprendront une trentaine de rendez-vous, ce qui me semble moins que d’habitude. Deux lignes se détachent. L’une me semble si cinématographique qu’on aurait pu l’imaginer en marge de Cannes. Elle réunira les instantanés pris à Sète par Agnès Varda en prévision de son premier long-métrage, «La pointe courte», tourné en 1955. Il y aura les «scrap-books», ces mélanges d’images et de journaux intimes, des grands réalisateurs et réalisatrices. Arles montrera les polaroïds tirés par Wim Wenders en marge de «L’Ami américain» en 1976. Un hommage se verra rendu à Gregory Crewdson, dont les images semblent extraites de films qui n’auraient jamais été tournés. Il y aura enfin les photos de plateau prises lors de tournages anciens par Pierre Zucca. Souvent superbe (au moins jusque vers 1960), la photo de film reste maltraitée. Mal aimée. Elle n’a jamais accédé au rang d’art comme celle de mode ou de publicité.

L’autre ensemble qui se dégage du programme est l’attention vouée au paysage dénaturé, au propre comme au figuré. Il s’agira de monter à quel point le territoire s’est vu abîmé par l’homme. Un processus ancien, qui va s’accélérant. Je me souviens d’une émission de télévision qui s’appelait «La France défigurée». Elle a duré de 1971 à 1978, avant de passer à la trappe. Il y aura ainsi nombre d’images déprimantes entre le hangar se trouvant à côté de la… gare et les Ateliers Mécaniques. Eux aussi se sont vus défigurés, mais par une malheureuse restauration. La 54e édition des «Rencontres» sera complétée par des accrochages dédiés à Saul Leiter, aux photographes scandinaves (des femmes, naturellement) et aux 50 ans du quotidien «Libération». Que dire pour terminer? Ce journal fait selon moi plutôt vieux pour son âge.
Pratique
Le site est www.rencontres-arles.com
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Festival – Arles lance ses «Rencontres» photographiques à Paris
La manifestation tient de la fausse décentralisation pour bobos en goguette. Le programme dévoilé tournera cet été autour du cinéma.