Le marché mondial des obligations a subi sa plus forte chute depuis au moins deux décennies. L'indice Bloomberg des obligations d'État, des obligations d'entreprise et d'autres obligations à taux fixe et de qualité de bonne notation, a chuté de 12,2% depuis son point haut de début janvier 2021. Il s'agit de la perte la plus importante depuis 2003, dépassant même la perte maximale de 10,8% enregistrée pendant la crise financière. Désormais, les obligations à rendement négatif ne représentent plus que 7% ou 2 880 milliards d’USD, soit une baisse de 84% depuis novembre 2020 (45% des obligations et 18380 milliards d’USD).
Parallèlement, les écarts de rendement des obligations d'entreprise ont augmenté. En Europe, par exemple, les écarts de rendement des obligations de bonne notation ont augmenté d'environ 50 points de base au premier trimestre. En raison de la hausse des taux d'intérêt et des écarts de rendement, les investisseurs déplorent des pertes importantes, en particulier lorsqu'ils ont pris des échéances trop longues et un risque de crédit trop élevé.
Le risque inflationniste persiste et soutient la hausse des taux courts. D’une part, l’insuffisance de l’offre de travail par rapport à la demande sur le marché du travail américain n’a jamais été aussi importante (près de 5 millions). Un tel écart pourrait être réduit en cas de ralentissement économique mais pas dans de telle proportion. Une spirale prix-salaires risque ainsi de se généraliser si l'inflation élevée entraîne une hausse des salaires et que les entreprises tentent ensuite de répercuter la hausse des coûts sur les consommateurs sous la forme d'une augmentation des prix des biens.
D’autre part, le cycle haussier sur le prix des matières premières pourrait être durable. La priorité n’est plus sur l’accumulation de réserve de change mais sur la reconstitution des inventaires pour sécuriser les approvisionnements. Cette dynamique sera alors génératrice d’une inflation structurelle et non plus conjoncturelle. Ces deux risques alimentent ainsi les attentes de hausse des taux courts. La FED, qui s’était ajustée au marché le mois dernier (+175pb en 2022), est désormais 75 points de base sous les attentes des investisseurs pour la fin d’année.
«L’économie américaine demeure néanmoins en surchauffe et excède de 2,1% le PIB potentiel en termes réels.»
Or, un durcissement trop rapide des conditions financières augmente le risque de récession économique. La probabilité d’un tel scénario augmente mais n’est pas notre scénario central. Nous anticipons une croissance de 3.2% en 2022. Les indicateurs avancés sur l’activité tels que l’ISM et le PMI montrent une économie toujours en expansion, tandis que les modèles de prévision de la FED d’Atlanta signalent toujours une croissance de 1,1% au 1er trimestre. L’économie américaine demeure néanmoins en surchauffe et excède de 2,1% le PIB potentiel en termes réels. Cela se traduit actuellement par une forte inflation qui témoigne d’une trop forte expansion de l’économie et augmente mécaniquement la probabilité d’assister à la fin du cycle d’expansion.
Cet environnement nous amène à discriminer entre les actions. Une plus forte inflation, la recherche d’entreprises de qualité et le cycle haussier sur les matières premières nous conduisent à prioriser des expositions aux actions dans des secteurs stables, si possible à l'abri de la récession. Parmi ceux-ci, nous comptons les fournisseurs de produits de consommation courante, le secteur pharmaceutique et médical, mais aussi les fabricants de machines agricoles et de tracteurs, qui profiteront de la hausse de la demande en techniques agricoles. L’environnement offre toujours des opportunités, à n’importe quel prix.

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Perspectives économiques – À n’importe quel prix
Une plus forte inflation, la recherche d’entreprises de qualité et le cycle haussier sur les matières premières conduisent l’expert à prioriser des expositions aux actions dans des secteurs stables.