Les nouveaux fléaux helvétiques: le repli, le court terme et le refus de l'autre
Consultant alémanico-romand actif dans les deux régions depuis plusieurs décennies, je constate une tendance au repli de plus en plus lourde aux échelons national, régional et local, dans la société civile comme chez bien des pme.
Las de se battre contre une concurrence internationale, mais aussi nationale et régionale qu’ils jugent de plus en plus rude, de nombreux chefs et cadres de pme sont tentés de soutenir une politique du cloisonnement, contre les intérêts du reste de l’économie, dont ils dépendent cependant. Cette tendance se trouve renforcée par des travailleurs suisses qui cherchent à tirer avantage de leur nationalité dans la concurrence d’avec leurs collègues étrangers.
Le protectionnisme est un motif puissant. Ne pouvant ou ne voulant s’adapter à une situation nouvelle, l’on fait tout pour maintenir celle que l’on voit se dégrader. D’où il résulte une politisation croissante de l’économie en Suisse, à l’échelon national comme à l’échelon régional, le cloisonnement devenant un instrument d’optimiser les coûts ou d’améliorer les rendements, à court terme seulement, bien sûr, car au long terme, les conséquences en sont néfastes, citons seulement en exemple les délocalisations supplémentaires qui s’en ensuivront. Mais le long terme ne semble plus intéresser personne.
Le tout est imprégné d’une idéologie du refus de l’autre qui se présente comme un système de valeurs suisses et qui ne sert, au fond, qu’à camoufler le protectionnisme vil. Or, le cloisonnement pratiqué ne se tourne pas seulement contre les voisins étrangers, mais aussi contre les autres régions linguistiques du pays.
L’actuelle guerre des langues vient de loin. Elle a ses origines dans les convulsions d’une Suisse exposée à des changements qu’elle refuse encore d’accepter.
Vous trouverez une analyse approfondie et l’esquisse d’une issue dans mon article sur l’évolution du rapport aux langues dans l’économie helvétique, parue dans le dernier numéro de la revue Babylonia.