Piraterie fiscale des entreprises
L’optimisation fiscale excessive est un thème qui intéresse depuis un certain temps les investisseurs responsables, notamment pour des principes d’équité sociale. Elle représente aujourd’hui un risque financier de plus en plus important pour les entreprises qui l’exploitent.
Ces mécanismes, légaux au demeurant, permettent à certaines entreprises d’éviter de payer des impôts par le biais de transferts d’actifs entre différentes filiales du groupe ou de la relocalisation de sièges sociaux dans des états à la fiscalité favorable. Ces multinationales peuvent ainsi déclarer leurs bénéfices dans des régimes faiblement taxateur ou dont les déductions consenties sont les plus importantes. Les cas d’Apple, Starbucks ou Amazon, et plus récemment la fusion entre Holcim et Lafarge, motivée en partie par des raisons fiscales, suscite un certain ras-le-bol. Ces pratiques soustraient en effet des recettes importantes aux Etats dans lesquelles elles opèrent.
Une pratique répandue
Federal Finance gestion a fait l’exercice et a analysé l’ensemble des entreprises du STOXX 600 en comparant la moyenne des taux d’imposition sur 10 ans avec celle du secteur et du pays de leur siège social. Ces résultats ont ensuite été mis en perspective des frais de consultant non liés à l’audit des comptes. Le résultat est sans appel, 20% d’entre elles, actives dans une dizaine de secteurs différents, sont considérées comme ayant une structure fiscale abusive. Ces pratiques infligent un manque à gagner pour les Etats et réduisent de fait les investissements d’intérêt général. Elles peuvent même induire une certaine fragilisation des rémunérations de leurs salariés. Raison pour laquelle cette thématique interpelle l’investisseur responsable. Seulement au-delà du risque réputationnel qu’encourent ces entreprises, le risque matériel prend également de l’ampleur.
Renforcer la transparence fiscale
Pour mettre un frein à cette concurrence fiscale entre Etats, la pression politique oblige certains pays au régime favorable à revoir leur copie sur la fiscalité des entreprises, à l’instar de la Suisse. La Commission européenne renforçait, en juin dernier, la directive européenne dite « mères-filiales » que certaines entreprises exploitaient pour éviter toute forme d’imposition à travers des montages fiscaux appelés « prêts hybrides ». Le phénomène « tax inversion » intéresse également les Etats-Unis. Le congrès planche actuellement sur une réforme législative qui obligerait les sociétés américaines, dont le siège social serait à l’étranger, d’être détenues majoritairement par des étrangers ! Belle ironie !
Dans ce type d’environnement réglementaire en mutation, l’impact sur les résultats annoncés de certaines sociétés pourrait s’avérer négatif. Une des pistes évoquées serait d’exiger des entreprises la publication par pays, de leur chiffre d’affaires, leur résultat, ainsi que l’impôt qu’elles paient. Dans tout les cas une démarche d’optimisation doit pouvoir être justifiée auprès de l’ensemble des parties prenantes, des employés aux actionnaires.