Il était une foi
Capitaine, coach, leader: ces dernières années, le chef d’entreprise est de plus en plus souvent associé à l’univers du sport. Au-delà des métaphores sur le rôle du patron, ce sont les valeurs du sport qui sont unanimement saluées: esprit d’équipe et loyauté, émulation, dépassement, respect de l’autre… Sans nier ce qu’elles apportent à une équipe, ces vertus peuvent être complétées par d’autres: vérité, équité, intégrité, modération, solidarité… Et ces valeurs sont portées par la foi.
Source de tensions... ou d’élévation
Au XXIe siècle, le sport bénéficie d’une image incontestablement positive, y compris dans sa dimension de modèle pour l’entreprise. La religion au contraire est vue avec méfiance. Dans nos sociétés occidentales sécularisées, la croyance renvoie (à tort?) vers des réflexes communautaires, des tensions sociales, voire des conflits. Ces dernières années, le fait religieux en entreprise a souvent été ramené aux revendications de certains salariés pour des aménagements liés à des rites (menus confessionnels, jours de congé issus de calendriers cultuels…).
Cependant, loin d’être un facteur de division, la religion est surtout une source d’élévation. Deux étymologies latines sont possibles: relegere et religare, respectivement relire et relier. La première renvoie, comme l’indique Cicéron, à la réflexion, au questionnement, à l’intelligence. La seconde, appuyée par Lactance, au lien entre l’humain et le divin mais aussi entre les humains entre eux (sans compétition). La réflexion et le lien, deux valeurs déterminantes pour un entrepreneur.
De même pour la foi: étymologiquement, le terme latin fides est tiré de la même racine indo-européenne (beidh-) que le mot foedus (accord, pacte, contrat). Loin d’être antinomique avec l’économie, la foi lui était étroitement associée à l’origine. Et dans les contrats actuels, l’usage de l’expression «de bonne foi» reste courant.
Plus fort encore: avec L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme, le sociologue Max Weber explique l’avènement de l’économie de marché par l’ethos protestant. Une thèse critiquée? Certes, mais même ses contradicteurs lient le capitalisme et le contexte religieux: avec Les Juifs et le capitalisme moderne, Werner Sombart place le judaïsme aux racines du modèle économique actuel, tandis que Michael Novak insiste sur le rôle de la doctrine catholique dans l’essor du capitalisme avec L’éthique catholique et l’esprit du capitalisme.
Viser le mieux plutôt que le plus
Au-delà de ce débat sur les origines et alors que les crises successives ont mis à mal le capitalisme financier, les valeurs portées par des patrons chrétiens, quand leurs actes sont en accord avec leur discours, peuvent contribuer à restaurer la confiance dans ce système. En incitant à viser la qualité plutôt que la performance, le mieux plutôt que le plus. Optimus en alternative à citius, altius, fortius (plus vite, plus haut, plus fort)?