Beaubourg s'est mis en état de sièges. Il présente Pierre Paulin, qui a conçu quelques-uns des plus célèbres fauteuils (du «Mushroom» de 1960 au «Tongue» de 1963) du design contemporain. Des icônes régulièrement rééditées. L'exposition parisienne, que signe Cloé (sans «h») Pitiot se termine tout soudain. Autant dire qu'il faut se dépêcher d'aller la voir. Organisée dans la mezzanine, là où se trouvent souvent présentés les architectes de Renzo Piano à Frank Gehry, la rétrospective est une réussite. Mort en 2009 à 82 ans, Paulin parle en plus remarquablement de lui-même et de son œuvre. Revenu en grâce au début des années 2000, après avoir été brutalement mis à la retraite en 1993 par Havas Euro, qui avait racheté sa petit agence ADSA (1), l'homme a souvent eu l'occasion de s'exprimer devant une caméra.
Pierre Paulin, dont un oncle était déjà «designer» automobile dans les années 1920, a incarné le goût des années 1960 en France. Cela ne lui a pas été facile. Comme il l'explique bien, le pays restait incroyablement rétif, après la guerre, à la création contemporaine. Une seule maison, celle de Marcel Gascoin, se risquait du coup à éditer des meubles sur le modèle scandinave ou américain. Du bois clair. Des tissus unis et colorés. Pratiquement aucun décor. Des prix abordables. Il s'agissait en Suède ou aux USA de travailler pour le grand public, sur le principe de la série. Les prix hallucinants demandés aujourd'hui par certaines galeries parisiennes pour du Paulin «vintage» constituent un contre-sens. Leur auteur les présentait dans les années 1950 au Salon des Art ménagers...
A l'Elysée
Paulin s'est retrouvé officialisé en 1969, quand Georges et Claude Pompidou lui ont demandé de redécorer les appartements privés de l'Elysée. Le nouveau président se voulait hyper branché. Sa mort prématurée a épargné à la capitale d'être coupée par une autoroute. Le «designer» se retrouvera l'année suivante à l'exposition universelle d'Osaka, puis dans les manufactures d'Etat. Il perdra un peu de son évidente simplicité au Mobilier National ou à Sèvres, où il fallait faire jouer la virtuosité des artisans. Sa table «cathédrale» des années 80, inspirée par le gothique et réalisée au laser, me laisse ainsi perplexe, comme le fauteuil un peu trop sophistiqué de François Mitterrand. J'avoue préférer ses sièges unis, qui ont souvent incarné la modernité dans les films de Mireille Darc ou de Louis de Funès.
Ce sont d'ailleurs ces derniers (les sièges, pas les films) qui se remarquent le plus au Centre Pompidou, et sans doute à New York où le montre le galeriste Emmanuel Perrotin. Les créations sont alignées sur un grand plateau, dans un ordre plus ou moins chronologique, après une entrée dans un coin cinéma où se voit projeté un long entretien accordé par Paulin. Le visiteur constate que, par achats et par dons récents, le musée est bien pourvu en créations du maître. Notons que les visiteurs de la Grande Galerie du Louvre posent aussi, sans le savoir, leurs culs sur des banquettes rondes signées Paulin et côtelées comme des tomates. La fin du parcours se révèle comme je vous l'ai déjà dit un peu décevante. On ne peut pas demeurer au mieux de sa forme tous les jours. Paulin s'en rendait compte. Dans son interview, il regrette de n'avoir pas suivi la ligne dure des Américains Charles et Ray Eames. Aucune fioriture. «Un peu de puritanisme ne fait parfois pas de mal.»
(1) Cet épisode se voit bien sûr oblitéré ici.
Pratique
«Pierre Paulin», Centre Pompidou, place Georges-Pompidou, Paris, jusqu'au 22 août. Tél. 00331 44 78 12 33, site www.centrepompidou.fr Ouvert tous les jours, sauf mardi, de 11h à 21h.
Photo (DR): Une ottomane de Pierre Paulin avec son tissu très années 1960.
Texte intercalaire.
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PARIS/Pierre Paulin revient avec ses sièges "design" au Centre Pompidou