PARIS/Jean Nouvel montre ses meubles d'architecte. A la taille de son ego!

Chassez-le par la porte, il revient par la fenêtre. Une grosse fenêtre, cette fois. Jean Nouvel est en effet l'hôte du Musée des arts décoratifs de Paris, qui lui a donné toute la place voulue. L'architecte s'étale donc sans vergogne dans les salles permanentes, mais aussi à l'intérieur des collections graphiques. C'est en effet lui qui a «relooké» en 1998 l'aile du Louvre consacrée à la publicité et à son histoire. Un bide aussi noir que la couleur apposée sur ses murs. Il n'y passe quasi jamais personne.
Depuis 1987, le Français «a vu éditer plus de cent des ses créations.» Comme il s'agit d'un Artiste, avec A majuscule, ces pièces uniques se voient éditées à six exemplaires (sic!) par des galeries comme Gagosian ou Patrick Seguin, le monsieur qui a un nom de chèvre. Ces réalisations sont bien sûr à la taille de l'ego de leur auteur, autrement dit monumentales. Dans une salle médiévale, il a fallu mettre un canapé de travers, tant il s'est révélé large (le public a tout de même le droit de s'y asseoir). Le hall consacré à la première Renaissance abrite, lui, une table en bois clair de huit mètres de long. Je n'invente rien. La mesure figure sur l'étiquette.
"Sens et essence"
Pour ce faire, il a bien sûr fallu dégager le plancher et une partie des vitrines. On sait que les artistes contemporains «interviennent» de la sorte, puisqu'ils agissent avec un mot naguère réservé à à la police ou aux pompiers. Poussez-vous de là que je m'y mette. Les Sèvres voisinent du coup avec le service à café inventé par Nouvel, et il a bien fallu évacuer bien des choses pour installer les mannequins (noirs) arborant les bijoux corporels du maître. Ce sont cependant les miroirs, en triptyques, qui prennent finalement le plus de place. Les visiteurs découvrent ainsi la version énorme, et colorée, de ce qui leur fait tous les jours face (et sans prétentions) dans leur salle de bains.
Inutile de dire que la phraséologie ne donne pas dans la modestie. Nouvel, qui s'était fait la main en commentant les meubles royaux, pour lesquels il avait imaginé une scénographie au château de Versailles, s'épanouit. Dites-vous bien que l'exposition elle-même s'intitule «Sens et essence». C'est dire. Il s'agit «d'engager ainsi un dialogue avec le lieu, son histoire et ses collections». Je suis désolé pour le grand homme. Mais nous en demeurons ici au dialogue de sourds, silence en moins.
Pratique
«Jean Nouvel, Mes meubles d'architecte, Sens et essence», Musée des arts décoratifs, 107, rue de Rivoli, Paris, jusqu'au 12 février 207. Tél. 00331 44 55 57 50, site www.lesartsdecoratifs.fr Ouvert du mardi au dimanche de 11h à 18h, le jeudi jusqu'à 21h.
Photo (Aline Coquelle/AFP): Jean Nouvel et le miroir. Il s'agit ici de triptyques colorés.
Texte intercalaire.