PARIS/Gérard Garouste brille au Musée de la chasse et de la nature

Il n'est pas fréquent en 2018 qu'un artiste connu reçoive la commande d'un tableau avec un thème fixé. Surtout s'il s'agit d'une mythologie. Les créateurs d'aujourd'hui, qui se prennent volontiers pour des penseurs, voire des philosophes, veulent rester libres de leur cerveau et de leurs mains. Pas Gérard Garouste! Depuis que cet ancien scénographe ayant aussi bien travaillé pour Le Palace que Jean-Michel Ribes a passé à la peinture figurative, à la fin des années 1970, il répond à la demande. On a aussi bien vu cet homme au style pour le moins tourmenté (Garouste a avoué dans ses mémoires «L'intranquille» de nombreux troubles psychiatriques) à l'Elysée qu'au Châtelet, à la Bibliothèque nationale de France ou dans les ateliers de tapisserie d'Aubusson. La chose ne l'empêche pas de se voir (parfois) montré à Beaubourg.
Aujourd'hui âgé de 72 ans, le Français a donc été approché par le Musée de la chasse et de la nature qui, comme on le sait, n'a jamais peur de rien. Je vous ai déjà expliqué comment sa direction a imposé un nouveau style éclectique faisant fait aujourd'hui l'admiration de ceux qui parlent des «musées du XXIe siècle», alors même qu'il semble (je dis bien «semble») tourner le dos au présent. Ne bourre-t-il pas jusqu'à la gueule deux hôtels particuliers parisiens du XVIIe siècles d’œuvres en tous genres allant de l'antiquité à nos jours?
Le chasseur dévoré par ses chiens
Son directeur Claude d'Anthenaise a donc prié Garouste de réfléchir autour du thème de Diane et Actéon. Un sujet parfait pour la maison. Selon le poète Ovide, qui avait 43 ans en l'an 0, la déesse vierge avait été surprise nue par le chasseur Actéon. Outragée, elle l'avait transformée en cerf afin de le faire dévorer par ses chiens. L'histoire est comme il se doit tirée des «Métamorphoses», une série de contes cruels où l'homme se retrouve toujours victime des dieux qui souvent le jalousent. Normal. Les divinités antiques régnaient par la peur qu'elles inspiraient. «Amour divin» restait une expression parfaitement inconnue à l'époque.
Garouste s'est donc mis au travail. Le Musée de la chasse et de la nature peut aujourd'hui présenter une grande toile se situant dans la tradition du Titien (qui a peint plusieurs «Diane et Actéon») ou de Rubens. Il y a là quelque chose de généreux et de baroque, avec des distorsions qui évoqueraient davantage Le Greco. Le chasseur a pris les traits de l'artiste. Diane ceux d'Elisabeth Garouste, son épouse, bien connue comme créatrice de meubles (longtemps conçus en partenariat avec Matteo Bonetti). Un jeu de miroirs fréquemment utilisé par la peinture classique. Le Caravage a fait son autoportrait en tête de Goliath, tandis que le Florentin Cristofano Allori a montré sa maîtresse en Judith, se réservant lui aussi le rôle de la tête tranchée, en l'occurrence celle d'Holopherne.
Nombreuses variantes
L’œuvre définitive se voit entourée de variantes, parfois en hauteur, et de dessins préparatoires. Il s'agit, au rez-de-chaussée de l'institution privée, d'une petite présentation. Elle n'occupe du reste pas entièrement les salles temporaires. Jusqu'au 10 mai, elle s'appuyait sur la présentation des nouvelles pièces de galeriste chez son galeriste Daniel Templon. Je vous rassure tout de suite. L'exposition tient très bien toute seule. Après tout pourquoi faire toujours énorme?
Pratique
«Gérard Garouste, Diane et Actéon», Musée de la chasse et de la nature, 62, rue des Archives, Paris, jusqu'au 1er juillet. Tél. 00331 53 01 92 40, site www.chassenature.org Ouvert du mardi au dimanche de 11h à 18h, jusqu'à 21h le mercredi.
Photo (Gérard Garouste/Musée de la chasse et de la nature): Le tableau définitif, qui restera au Musée de la chasse et de la nature.
Texte intercalaire.