Il y a eu divorce, mais par consentement mutuel. Depuis mai 2000, la Tate Modern vit sa vie, loin de la Tate Britain. L'ex-centrale électrique aménagée par les duettistes Hezog et De Meuron tend depuis à monopoliser les visiteurs. C'est le grand musée d'art moderne que les Anglais attendaient. La preuve! L'institution prévoit une extension dont le coût fait frémir. Trois milliards et demi de francs suisses, c'est tout de même beaucoup...
Paradoxalement, pour un Continental, la Tate Britain apparaît plus intéressante. Plus roborative. La Tate Modern brille en effet par son absence d'originalité. Des stars et encore des stars du contemporain. Le bâtiment de Millbank reste lui voué à un art anglais qu'on ne voit nulle part ailleurs à une telle échelle. Même en Grande-Bretagne. Qui d'autre que le musée londonien peut se targuer de dérouler toute la création nationale depuis 1550?
Le goût de Penelope Curtis
C'est Penelope Curtis qui dirige la chose depuis 2009. La dame (dont l'âge reste tenu secret) était auparavant à l'Henry Moore Institute. Autant dire qu'il s'agit d'une spécialiste de l'art moderne (mais non contemporain), avec un faible pour la sculpture. C'est d’ailleurs elle qui avait monté «Modern British Sculpture» à la Royal Academy en 2011. Cette énorme exposition, que j'avais trouvée remarquable, avait été si vue si mal reçue par la presse que les mauvaises critiques se voyaient exposées sur un mur de la dernière salle. Une attitude très british...
L'an dernier, Penelope avait choqué. Remisant l'habituel fonds de commerce de la Tate, elle avait offert une année entière au XXe siècle, pour l'essentiel sorti des caves. C'était ardu, mais passionnant. Londres n'a pas à rougir d'une époque ayant aussi bien donné Graham Sutherland que Victor Pasmore, Alan Davie, Ben Nicholson ou d'autres gens dont j'ai hélas oublié les noms. Cette année, la directrice redéploie les collections dans un espace repensé par un architecte au nom admirable: Caruso St-John. Le parcours va du XVIe siècle à nos jours dans un ordre strictement chronologique.
Une avancée par décennie
Qu'est-ce que cela signifie? Eh bien, décennie par décennie, Penelope Curtis montre des œuvres peintes les mêmes années, avec les contradictions que cela suppose. Chaque génération connaît ses pionniers, ses courants dominants, ses attardés et ses marginaux. C'est un chaos perpétuel, que les historiens de l'art transforment trop souvent par la suite en un flot harmonieux. Il ne faut pourtant pas oublier, pour prendre un exemple continental, que les grands nus adipeux de Renoir sont postérieurs aux Picasso cubistes.
Le tout conduit les visiteurs (hélas trop peu nombreux) à s'interroger. Les Anglais d'une manière différente que les Continentaux. Pour ces derniers, la question reste en fait bien simple. Comment se fait-il qu'à part Francis Bacon aucun peintre anglais du XXe siècle ne soit représenté dans les musées français, allemands... ou suisses?
Notons que la Tate Britain propose en ce moment une grand exposition monographique. Elle se voit consacrée à L.S. Lowry (1887-1976), un paysagiste du genre misérabiliste. Mais un misérabilisme très populaire. Il y a foule pour voir cet artiste, dont nul ou presque ne connaît le nom de ce côté du Channel.
Pratique
Tate Britain, Millbank, tél. 004420 78 87 88 88, site www.tate.org.uk Ouvert tous les jours de 10h à 18h. L'exposition Lowry dure jusqu'au 20 octobre. Photo (DR) Penelope Curtis, la directrice de la Tate Britain.
Prochaine chronique le lundi 16 septembre. L'automne des expositions suisses.
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LONDRES II / La Tate revisite tout l'art l'anglais