C'est à lire. Tous les genres se voient ici représentés. Cela fait évidemment beaucoup de pages. Mais si la vente des bouquins semble stabilisée (en France, du moins) après une forte descente, la production ne cesse de prendre l'ascenseur, pour un étage de plus. Même dans le domaine des arts...
L'architecture à toute vitesse. En 2001, Philippe Trétiack faisait sensation en publiant «Faut-il pendre les architectes?». Sa conclusion se révélait pourtant lénifiante. Etaient tout aussi coupables qu'eux les maires mégalomanes, les organisateurs de concours biaisés et le public poujadiste. A 62 ans, l'homme publie aujourd'hui un ouvrage où tout devient architecture. Les 56 règles énoncées découlent en effet de voyages. Le lecteur y assiste aussi bien au passage de Poutine dans un Moscou tétanisé qu'à une danse du ventre au Caire islamisé ou à des tirs de «snipers» à travers Abidjan. Dans ce dernier cas, des corridors d'hôtel sans fenêtres peuvent se révéler bien utiles. Les textes se parcourent agréablement. Ils se terminent tous par une morale en forme d'axiome. Je vous en cite juste deux. «En architecture, la compétition phallique continue.» «Bombarder une ville, c'est promouvoir l'architecture moderne.» (Seuil, 304 pages).
Ahae mécène gangster. Blogueur de «Louvre pour tous», Bernard Hasquenoph étend ses curiosités. Il est ainsi amené à rapprocher des faits apparemment distincts. En avril 2014, un «ferry» coulait en Corée, faisant 300 victimes et causant un traumatisme national. Un an avant, un photographe amateur coréen, dont les images se vendent dans les 10.000 euros pièce, exposait à Versailles dont il s'était fait le mécène. Ahae et le vrai responsable de la catastrophe ne font qu'une seule personne. Pire, ce milliardaire est mêlé à la mort en 1987 de 32 membres d'une secte dont il tire des bénéfices. Le vrai nom est toujours le même, Yoo Byung-eun. Hasquenoph est contacté par des journalistes Coréens, alors qu'il se heurte à une «omerta» en France. Nul ne veut se souvenir de ce symbole de toutes les dérives dans la recherche d'argent par des musées abandonnés des pouvoirs publics. Reste pourtant le nom d'Ahae gravé dans la pyramide du Louvre... Max Milo, 319 pages)
Peindre à Troyes au XVIe siècle. A l'automne 2014 se tenait à l'Université de Genève un colloque dont le sujet pouvait sembler pointu. Divers intervenants, dont Cécile Scailliérez et Dominique Cordellier du Louvre ou François Avril de la Bibliothèque nationale parlaient de la peinture en Champagne à la Renaissance. Ce colloque faisait partie d'un projet ayant déjà touché Fontainebleau et Lyon et qui devrait un jour concerner Dijon. Troyes n'est pas une mégapole. Il se fait cependant que sa production du XVIe siècle reste assez bien conservée. Le relatif déclin de la cité par la suite y a sans doute aidé. Il se fait aussi que des créateur importants, dont Jean Cousin ou Grégoire Guérard, ont eu des liens avec la cité ou une origine troyenne. Géré par Frédéric Elsig, qui s'est aussi chargé de l'édition du livre, le colloque a évité tout verbiage. Nous demeurons ici dans une histoire purement factuelle. C'est donc facile à lire aussi. (Silvana, 269 pages).
Hans Bellmer, Petite anatomie de l'image. Né en 1902, décédé en 1975, Hans Bellmer reste l'auteur d'admirables dessins et de tout un corpus d’œuvres axé sur une poupée sans tête. L'Allemand (dont la ville natale se trouve aujourd'hui en Pologne) a aussi écrit des textes, liés comme il se doit à l'érotisme. En 1957, il rédigeait ainsi sa «Petite anatomie de l'inconscient physique» ou «Anatomie de l'image», qui faisait la somme de ses introspections avec lucidité. Bellmer y explorait son inconscient, en mêlant Freud aux expériences hallucinogènes vécues par son ami, l'écrivain Joë Bousquet, qui vivait reclus à Carcassonne depuis sa paralysie. Le désir doit aller pour lui au-delà de son objet, par une savante désorientation des sens. «Un pied féminin n'est réel que si le désir ne le prend pas fatalement pour un pied», dit le quatrième de couverture de cette réédition, illustrée de six dessins du plus sexuel des surréalistes. (Allia, 79 pages)
Le red boy. Emmanuel Perroud est professeur d'histoire de l'art. On lui doit aussi plusieurs livres sur la peinture, dont un sur Edward Hopper. L'homme propose aujourd'hui des nouvelles de fiction dans la précieuse collection «1er mille» d'Arléa. Leurs longueurs se révèlent pour le moins inégales. La première, qui donne son titre au livre, est un petit roman d'environ cent pages. On y voix un homme presque fantomatique errer d'un supermarché à un vieil appartement, en passant par une bibliothèque. Ce protagoniste obsédé par la peinture rougit avec une fréquence maladive, qui finit par l'isoler du monde. Il entamera pourtant une relation féminine... Les autres histoires se révèlent courtes, voire microscopiques. Parfois deux pages à peine. Elles ont en commun de traiter de peinture, ancienne ou fraîche. Un artiste s'apprête ainsi à lacérer son œuvre, dont il ne sauvera qu'une seule toile. Un ouvrage étrange et assez dérangeant, (Arléa, 180 pages).
Texte intercalaire suivant un article sur le livre consacré à Alexandre Séon.
Photo (Site de l'Université de Genève): D étail du Triptyque de l'Eucharistie peint en 1515 pour la cathédrale d'Autun (aujourd'hui au Musée Rolin) par le peintre hollandais Grégoire Guérard. Nou sommes à Troyes au XVIe siècle.
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LIVRES/L'architecture folle, le mécénat, Bellmer ou la peinture à Troyes