
Les galeries effectuent leur rentrée, puisque nous nous en sommes plus ou moins bien sortis pour le moment. Pas question cependant de vernissages lorsque les Bains genevois ont été planifiés fin avril. Ni même de portes ouvertes. Le mot «ouvert» terrifiait littéralement les autorités locales. Celles-ci ont fini par accorder aux marchands (appelons tout de même les choses par leur nom!) un minuscule quota de visiteurs. Cinq personnes. Tout compris. «Comme nous sommes déjà une équipe de cinq», explique Barth Wilde, «il faudra nous retrouver par moments dans la rue. Heureusement que notre espace de la rue du Vieux-Billard est double!»
Comment les choses se présentent-elles depuis jeudi à 11 heures? Eh bien comme pour un magasin, puisque c’est à cela qu’ont assimilé les organes genevois compétents! Les gens entrent par deux ou par trois, en attendant leur tour. Cela dit, je vous rassure tout de suite. Jeudi après-midi, je n’ai noté aucune ruée sauvage entre la rue des Bains, celle des Maraîchers et celle du Stand. Tout d’abord, il y a là de vieilles choses. Nous restons dans un no man’s land temporel. Les participants pouvaient du coup agir à leur guise au sein de leur association. Mezzanin a ainsi maintenu à ses cimaises la vétérante Isabella Ducrot. La Napolitaine va sur ses 89 ans. Xippas, dont je vous ai déjà parlé, recevait déjà sur rendez-vous pendant le confinement. Pierre Geneston y propose une collective placée sous le signe de ces animaux qui ne sont pas tous malades de la peste, comme dans la fable de La Fontaine. Idem pour Wilde avec Vydia Gastaldon.
Jean-Luc Manz tout en couleurs
En revanche, Skopia et Joy de Rouvre ont retiré les papiers ou les plastiques empêchant de voir ce qui ne nichait derrière les vitrines. Un désir de surprise. Chez Skopia, Pierre-Henri Jaccaud nous montre de plus un Jean-Luc Manz inattendu. Connu pour ses géométries austères, le Romand se laisse aller à des compositions presque baroques. Il y a un frémissement dans ces œuvres joyeuses et colorées, qui restent de tailles et à des prix raisonnables (j’ai jeté un regard oblique sur la feuille où tout se voit clairement annoncé). Une présentation très réussie. Chez Joy, le Genevois Christian Robert-Tissot n’a en revanche pas bougé d’un millimètre de sa ligne artistique. Vous trouverez ma conversation avec lui une case plus bas dans le déroulé de cette chronique.

Jean-Luc Manz chez Pierre-Henri Jaccaud. Très coloré! Photo Jean-Luc Manz, galerie Skopia, Genève 2020.
Rue du Stand, Joseph Farine accueille, dans une mise en scène comme toujours imaginative et soignée, un autre créateur local. Thierry Leclerc travaille en noir et blanc. Je vous en parlerai bientôt. C’est donc une bonne cuvée pour les plasticiens d’ici. Sans faire de chauvinisme, il s’agit à mon avis là d’une bonne chose. Ces gens n’ont pas, ou plus beaucoup, de lieux pour se montrer. On ne peut par ailleurs pas dire que les collectionneurs se précipitent sur leurs œuvres. Ils les jugent sans doute trop peu valorisantes. Les fonds d’acquisition de la Ville et de l’État de Genève ne peuvent pourtant pas devenir les pompiers universels.
Les traces des performances
Rue du Vieux-Billard, Patrick Cramer montre une nouvelle fois Antonio Saura. Il a édité pour l’occasion un très joli catalogue sur ce maître espagnol du noir et gris. Là aussi, j’y reviendrai. Pour l’instant, je vais encore vous dire que Laurence Bernard a elle aussi conçu une exposition sans couleurs. Ou presque. Il s’agit de photographies. «Ces pièces sont liées à des performances, dont elles conservent des traces. Comme le dit le titre de l’exposition, ces images forment des preuves.» Il y a bien sûr aux murs Roman Signer. Comment pourrait-on faire sans lui en Suisse? C’est Monsieur Performance. Mais j’ai aussi noté deux noms que la galeriste propose régulièrement. Il s’agit de Bernard Voïta (encore quelqu’un du cru) et de Koka Ramishvili.

Isabella Ducrot chez Mezzanin. Photo Isabella Ducrot, Galerie Mezzanin, Genève 2020.
Voilà. Je vous signalerai encore que la liste des «galeries et institutions» du carton d’invitation tient beaucoup du cache-misère. Elle comporte dix-sept numéros, bien sûr. Mais seuls neuf d’entre eux correspondent à ce que j’appellerais une galerie. Il s’agit là d’un petit monde menacé et se renouvelant peu. Je vous expliquerai un de ces jours une des causes. Le reste se compose de musées comme le Mamco, de centres subventionnés, de la fondation Fluxum de Cynthia Odier ou de lieux scolaires avec LiveinYourHead. Cela dit tout le monde ne fait pas partie de l’Association faîtière, qui regarde par exemple d’un sale œil la Galerie des Bains.
Prochaine Nuit le 3 septembre
Ah, j’oubliais! Il y a aussi les restaurants. Là, je dois vous révéler que le Café des Bains n’a pas rouvert après les premiers assouplissements d’après la pandémie. Une feuille collée derrière la vitre explique le pourquoi du comment. Je ne sens personnellement aucun manque, mais le Café passait sinon pour l’âme du moins pour l’estomac du Quartier. On verra ce qu’il en est pour la prochaine Nuit, qui se déroulera, elle, le jeudi 3 septembre en espérant que les allègements prononcés le 27 mai se voient maintenus.
La date peut sembler précoce. Elle a pourtant sa raison profonde. «Nous voulions arriver avant Art/Basel, qui devrait constituer l’événement contemporain de la rentrée», explique Joy de Rouvre. La méga foire a été repoussée on le sait de juin à septembre. Après deux jours de vernissages, elle se déroulera du 17 au 20 septembre. Si tout va bien. Mais ne risque-t-elle pas, même dans ce cas, de sembler un peu trop «méga» aux autorités, bâloises cette fois, en cette année de contrition 2020? L’avenir, qui sait tout, nous le dira.
Pratique
Visites aux Bains. Encore ce samedi 30 et ce dimanche 31 mai de 11h à 18h. Il y a souvent du gel et des masques à disposition. Pour des horaires détaillés, des adresses et tutti quanti, je vous donne le nom du site général. C’est www.quartierdesbains.ch
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Les Bains s'entrouvrent aux Genevois avec quatre jours de visites en petit comité
Pas de vernissage. Les mots "portes ouvertes"ont fait peur. Il faut donc aller ce week-end de 11 heures à 18 heures quasi seuls dans les galeries et autres lieux d'art contemporain.