«Choisir ce qu'on mange est une desplus importantes décisions de la journée.» Nous ne sommes pas chezle diététicien, ni le nutritionniste, mais dans les sallestemporaires du Victoria & Albert Museum de Londres. Non loin deson restaurant, du reste, chef-d’œuvre victorien récemmentrestauré. L'exposition s'intitule «Food». Ses commissairesCatherine Flood et May Rosenthal Sloan ont ratissé large. Elles nese sont pas limitées à la table, et à ce qui se trouve en généraldessus. Les deux femmes ont voulu suivre la chaîne alimentaire«jusqu'au compost». Une fin qui forme aussi un début. Que nepeut-on pas, que ne pourrait-on pas faire avec ce qui passaitrécemment pour d'irrécupérables rebuts? Des rebuts rebutant, enplus.
Située au rez-de-chaussée, lamanifestation se déploie dans deux vastes salles du rez-de-chaussée,dont le parcours suit un monumental rideau plissé, d'un rose trèscharcutier. Cette draperie révèle et unit des objets pour le moinsdisparates. Le scientifique se conjugue ici avec l'artistique. Lanourriture du futur se voit confiée à des designers, qui tiennentpour une fois un sujet concret. Carolein (non, ce n'est pas une fauted'orthographe!) Niebling a ainsi conçu la saucisse de l'avenir. Ellecontient comme il se doit un minimum de viande. Il s'agit de ménagerles espaces verts comme les âmes sensibles. Nous allons sinon versle «vegan», du moins en direction d'une consommation animalemodérée. Du moins chez les intellectuels. J'ai encore vu que lapublicité de Migros était axée en Suisse cet été sur lesgrillades, genre populaire s'il en est. Notez qu'il y a eu desprécurseurs dans le genre ami des bêtes. Le V & A propose uneaffiche de 1905, signée H.W. Caffyn, pour un pot de Bovril. Un bœufle regarde d'un air truste en disant: «Oh, mon pauvre frère!»
Au Shit Museum
Le visiteur avance progressivement. Ilpasse d'un film de Marisssa Keating sur la chaîne alimentaire auxtoilettes du futur. Il en existe deux versions. L'une, très chic,reste sans eau «trop précieuse pour se voir gaspillée ainsi».L'autre est en Merdacotta. Qu'est-donc que cela? Une matière tiréede la bouse de vaches. Une idée de l'architecte Luca Cipelletti, àl'origine de The Shit Museum. Les deux directrices du projet aimentapparemment ce genre de retournements. Il y a bien, quelque part, destasses à café en capsules compressées. «Nous en utilisons 2000chaque jour à la cafétéria du musée. Il serait temps d'en fairequelque chose.» De joli si possible. J'éprouve cependant desréserves esthétiques face aux vases composés de papier detoilette, d'éclats de nourriture et de sang des abattoirs. Drôle demélange, même si la cuisine anglaise a longtemps étonné leContinent par ses audaces culinaires!

A chaque étape, le public subit ainsiune remise en questions. Un changement présenté de la manière laplus flatteuse possible, tout de même. Ingénieux, comme la bièred'ananas brésilienne produite à l'énergie solaire. Ambitieux,comme avec le projet pour parler aux plantes d'Hélène Steiner. Ouanthropophage, pourquoi pas. Il me semble avoir vu dans un coin unfromage créé à l'aide de bactéries humaines. Voilà quirenouvellera la diversité! Un tableau nous a montré auparavant,preuves en mains, que le poulet est aujourd'hui si standardisé qu'ila perdu environ la moitié de sa palette génétique... Il faut doncimaginer une alimentation différente pour les décennies àvenir. Une alimentation pour maigres, bien loin des «fast food».Notez qu'elle a déjà bien changé chez les gens qui réfléchissent, la bouffe.Il y a des jours où j'éprouve la nostalgie des énormes plats de gratinsde pomme de terre à la crème, qu'on vous jetait comme partombereaux sur votre assiette. Que voulez-vous? Tout ce qui paraît bon est soit immoral, soit illégal ou alors fait grossir... C'est en tout cas ce que j'entendais dire dans les années 1960.
Pratique
«Food», Victoria & Albert Museum,Cromwell Road, Londres,jusqu'au 20 octobre. Tél. 0044 20 79 42 2000, site www.vam.ac.uk Ouverttous les jours de 10h à 17h45, le vendredi jusqu'à 22h.
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.
Cet article a été automatiquement importé de notre ancien système de gestion de contenu vers notre nouveau site web. Il est possible qu'il comporte quelques erreurs de mise en page. Veuillez nous signaler toute erreur à community-feedback@tamedia.ch. Nous vous remercions de votre compréhension et votre collaboration.
Le Victoria & Albert Museum de Londres se penche sur la nourriture du futur avec "Food"
L'exposition londonienne, confiée à des designers, brasse très large. Elle embrasse toute la chaîne alimentaire. Nous irons peut-être un jour aux toilettes sur des sièges en compost.