C'est l'autre Biennale. Je parle icides antiquaires, pas d'art contemporain. Alors que celle de Pariss'est terminée au Grand Palais avec 38 500 visiteurs (plus les 10000 invités du vernissage), Florence s'est lancée samedi 21septembre dans la course au Palazzo Corsini. Je précise que lamanifestation se déroule ici, comme le veut la logique, une foistous les deux ans. Elle dure par ailleurs dix jours, ce qui luipermet d'englober deux week-ends. Des moments supposés plusfréquentés par le public. Un public sans rapport avec les hordes detouristes envahissant la ville à toute saison. A côté, Venise ouBarcelone ont l'air en ce moment l'air de déserts. J'y reviendraidans une autre chronique.
La Biennale Internazionaledell'Antiquariato possède un glorieux passé. Elle remonte à 1959,soit à trois ans avant son homologue parisienne. L'idée était dansl'air depuis un certain temps. Mario Bellini l'avait émise dès1953. La cité pansait alors ses blessures de la guerre. On sait queles Allemands ont fait sauter un quartier entier, épargnant juste lePonte Vecchio. 1953, c'était donc un peu tôt, même si le PalazzoPitti avait fédéré la haute couture italienne dès 1951. Mais lamode est une industrie, ce que ne peut se targuer le métier desantiquaires, même si la fabrication de faux en restait une à cetteépoque. Il a donc fallu patienter pour avoir une édition timide auPalazzo Strozzi en 1959, suivie en 1961 d'une seconde mouture tombanten plein «boom» économique. On a alors vu au Strozzi des capitaines d'entreprise comme Greta Garbo, Silvana Mangano ouSophia Loren. Un peu de glamour ne fait jamais de mal dans letableau.
Les années impaires
Pendant longtemps, il est resté admisque Florence gardait les années impaires, tandis que Paris prenaitles paires. La place florentine demeurait alors internationale, cequ'elle n'est plus aujourd'hui. Il faut dire que les Italiens onttoujours davantage serré la vis pour ce qui est des exportationsd'antiquités. Le Strozzi, où je me souviens d'être allé, a donc peu à peu servi de point deralliement aux seuls marchands nationaux, géographiquementdispersés. Puis la manifestation a changé d'air, à moins que ce nesoit d'ère. Quittant le Strozzi, elle s'est installée en 1997 chezles Corsini. Ceux-ci possèdent un immense palais au bord de l'Arno.Une demeure si vaste que la famille princière ne l'habite plusguère, voire plus du tout. Elle en loue des bouts pour des fêtes etdes foires. La trente et unième édition de la Biennale occupe ainsiaujourd'hui un bout du rez-de-chaussée et un autre au premier étage,du côté du fleuve. Des salles à fresques du XVIIe siècle, plus unsublime nymphée. Les sculptures se marient aux coquillages dans cerêve baroque. Une œuvre d'art totale, dont la restauration,commencée en 2017, vient de se terminer.

Qui est venu cette fois? Soixantedix-sept participants, avant tout transalpins. Les rares étrangers(Peter Finer, Sismann, Nicholas Hall...) tentent ici leur chance pourla première fois, à moins qu'ils gardent de solides racinesitaliennes comme Maurizio Nobile de Paris ou Cesare Lampronti deLondres. La part contemporaine reste réduite. Si Continua de SanGiminiano (qui fait quasi toutes les foires) est bien là, j'ai aussinoté la présence de Tornabuoni ou de Poggiali, ce dernier seconcentrant sur Gilberto Zorio. Un artiste «pauvre» pour le moinsdéplacé dans un cadre aussi riche. D'une manière générale, lesstands demeurent plutôt petits, ce qui a hélas incité certainsexposants à faire de la surcharge. Que voulez-vous? Ils doiventrentrer dans leurs frais. Tout le monde n'a pas en stock un objetphare, comme le «Saint Jérôme» d'Orazio Gentileschi chez Robilant& Voena, le «Portrait d'homme en gris» de Ghislandi chezCanesso ou le tondo en marbre de Benedetto da Maiano de Longari. Unecréation de la Renaissance dans un état de conservation si parfaitqu'elle en fait tousser certains. Le doute s'infiltre vite, dans lemilieu des antiquaires...
Généralistes et spécialistes
D'une manière générale, le niveausemble bon. Correct, en tout cas. L'accrochage trop serré dessert eneffet nombre de stands. Il y a comme toujours les généralistes, quifont un peu de tout, et des spécialistes. Certains tentent même demonter une exposition de type muséal. Je citerai Apolloni, dont lesmurs sont consacrés à la néo-classique famille des Sabatelli ouTiziana Sassoli, qui se penche sur celle des Gandolfi. De beauxpeintres bolonais de la fin du XVIIIe siècle. Dans un tout autregenre, Dario Ghio de Monte-Carlo montre uniquement des bijoux encorail. Robertaebasta, dont la tenancière ressemble toujoursdavantage à une cartomancienne sur le retour, propose pour sa partde l'Art Déco un brin mussolinien. Voilà qui amène un peu dediversité dans un ensemble tournant autour de l'Italie des XVIe,XVIIe et XVIIIe siècles. Un domaine gardant ses amateurs. Il suffitde regarder les points rouges. Mais, comme l'explique un desexposants, il s'agit là de gens discrets, dont les intérieurs derisquent pas de finir dans les magazines de décoration.

A ce propos, Florence attire-t-elle unpublic âgé? Une question qui se pose toujours à l'heure desrelèves nécessaires. Eh bien, pas davantage qu'ailleurs! Le goûtreste plus traditionnel en Italie. En Europe, l'ancien gardeautrement ses niches. Deux preuves. J'ai croisé des jeunes gensvoulant ouvrir un jour leur magasin. Les exposants les ont bienaccueilli. Normal. C'est rassurant pour eux. Et puis, chez PeterFiner de Londres, j'ai été accueilli par la très jeune génération. Compétente. Motivée. Commerçante. Mon interlocuteura fini par m'avouer avoir 23 ans. Et il a bien l'intention dereprendre, un jour, les rênes de la maison.
N.B. Les Offices ont acquis "La Vierge et l'Enfant, saint Jean-Baptiste et sainte Barbe" de Daniele da Voltera, un important artiste romain du XVIe siècle, chez Benapppi. Je viens de l'apprendre via "La Tribune de l'art". L'oeuvre restait à vendre lors de mon passage.
Pratique
«Biennale dell'Antiquariato», PalazzoCorsini, 10, Lungarno Corsini, Florence, jusqu'au 29 septembre. Site www.bia f .it Ouvert de 10h à 20h, le jeudi 26 septembre jusqu'à 19h. Entrée 15euros. On reste loin des 35 euros de la Biennale de Paris!!!
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Le somptueux Palazzo Corsini abrite à Florence la 31e "Biennale dell'Antiquariato"
La première édition a eu lieu en 1959. La foire est devenue moins internationale en raison des limitations à la circulation des oeuvres. Elle réunit cette fois 77 participants.