Il est parfois permis sinon depolémiquer, du moins d'émettre des idées divergentes. Avec ce quecela peut avoir de constructif. Je viens ainsi de lire en ligne dans«La Tribune de l'art» que «Le porte-étendard» de Rembrandtvenait de se voir classé «trésor national». Le Ministre de laculture Franck Riester l'a annoncé. L’œuvre pourra se voiracquise pour l'Etat en utilisant la carte du mécénat. Notez que lessuper-riches ont déjà beaucoup donné cette semaine avecNotre-Dame. Tout cela pour se faire taper sur les doigts en raisonsdes possibles déductions fiscales. Il faudraits'attendre ici à une petite facture supérieure à 100 millionsd'euros.
Exécutée en 1636 alors que l'artisteavait 30 ans, la toile (que j'ai eu l'occasion de voir en 2003 àAmsterdam, puis à Londres lors du tricentenaire de la naissance del'artiste) appartient aux Rothschild. Mais pas à la même brancheque les ex-propriétaires des portraits en pied de Marten et OopjenSoolmans de 1634, dont l'un a finalement été acheté par leRijksmuseum d'Amsterdam et l'autre par le Louvre après des pataquèspas possibles. Il n'y avait alors pas eu d'interdiction de sortie.Notons à ce propos que si les Français ont alors crié à la fuitedu patrimoine, les Néerlandais l'avaient fait avec des motifs plussérieux au XIXe siècle, quand les deux vastes tableaux ont quitté la Hollande pour entrer chez les Rothschild parisiens...
Un droit du sol
L'article de «La Tribune de l'art»pense que dans ce cas une «sortie de notre territoire ne peut êtreenvisagée», comme pour le portrait de Betty de Rothschild. Unsouvenir de famille, qui n'est lui pas encore classé. Pour l'Ingres,je veux bien l'admettre. Mais en quoi «Le porte-étendard» est-illié à la France, à part le fait de s'y trouver depuis le XIXesiècle? Auparavant, il a appartenu à George IV d’Angleterre, dontl'ensemble des collections n'a pas fini chez Elizabeth II. Le simplefait d'avoir mis les pieds dans un pays durant un certain tempsconstitue-t-il un motif suffisant? Dans ce cas, la Suisse n'enfinirait plus de refuser des visas de sortie, avec ce que recèlentles collections alémaniques. Après tout, le Kunsthaus de Zurichabrite venus de dépôts privés de prestigieux Picasso ou Van Goghdepuis des décennies.
Et puis, pourquoi le tableau devrait-ilfatalement finir au Louvre en cas d'achat? Parce que le pays voisinse meurt de son jacobinisme centralisateur. Avec la «Bethsabée»,«Les pèlerins d'Emmaüs», le magnifique autoportrait de vieillesseacquis pour Louis XIV, «Le bœuf écorché» ou «Saint Mathieu etl'ange», il me semble que c'est bon. Le Louvre a. Il seraitmaintenant temps d'en déposer un beau, un grand («Leporte-étendard» mesure 120 centimètres de haut!) dans une grandeinstitution de région. Je veux bien que Lyon, Epinal ou Tours aientdéjà leur Rembrandt. Mais ne serait-il pas le moment de confier àRennes, à Rouen ou à Montpellier des chefs-d’œuvre au lieu deleur accorder, du bout des doigts, le menu fretin? Jesignale enfin à tout hasard, si la toile finissait par sortir, queLeyde attend toujours son vrai Rembrandt. Or Rembrandt est nédans cette ville en 1606.
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La France classe "Le porte-étendard" de Rembrandt "trésor national" Que faut-il en penser?
Cette grande toile de 1636 appartient depuis le XIXe siècle aux Rothschild. Le Ministère de la culture ouvre la porte au mécénat privé. Mais pourquoi la France et pourquoi le Louvre?