Un site ne donne pas la même idée d'une vente qu'un catalogue papier. A fortiori, une vision avec ses deux yeux (et non comme la plupart de nos contemporains médiatisée par un écran) change encore davantage la donne. Ainsi en va-t-il pour l'actuelle présentation, avant vacation, de Piguet, ex-Hôtel des Ventes. J'y étais jeudi soir, avec les invités. Les Anglo-saxons parleraient de «preview». Bernard Piguet se contente d'un «cocktail».
Tout d'abord, la maison a fait un gros effort de présentation. Il y a cette fois moins de lots, d'où une mise en scène plus aérée. Que voulez-vous? La firme se gentrifie. Je me demande parfois si j'ai atteint le niveau de respectabilité voulu. J'avoue garder un bon souvenir du côté souk de l'ex-Hôtel. Comme les anciens amateurs, j'aime bien farfouiller.
Beaucoup d'objets Givaudan
Il est vrai que ce genre décontracté conviendrait mal aux objets de la collection Léon et Xavier Givaudan, dont le catalogue m'a révélé qu'ils étaient largement plus nombreux que ce que le site laissait supposer. Quand mes parents avaient dit Givaudan, ils fermaient les yeux. C'était pour eux le comble du goût. Un goût qui a bien évolué depuis. Nous ne sommes plus au temps de l'hôtel particulier de la rue de la Cloche (à côté du Kempinski), abandonné en 1969 et démoli depuis pour faire place à un immeuble de haut "standing" particulièrement médiocre. Ni à celui du domaine de Bessinge, acheté par Xavier aux Tronchin en 1938 (il en était le locataire depuis 1917). Ses 50 hectares constituent aujourd'hui le golf de Cologny.
Parmi les objets Givaudan, le dessin de Fragonard, le tableau de Lucien-Léopold Boilly, les candélabres en porcelaine de Meissen et quelques pièces d'argenterie font grand effet. Bien d'autres pièces, mises en ventes par de lointains héritiers, apparaissent en revanche datées, à l'image du portrait de Louis XIV. Elles le sont finalement comme la photo du salon de la rue de la Cloche reproduite dans le catalogue. Parmi les objets autres, une énorme gourde chinoise en émail cloisonné de la fin du XVIIIe siècle frappe le visiteur. Les photos d'Ellen von Umwerth se révèlent vraiment énormes. Et tapageuses. Il y a en revanche une très amusante coiffeuse moderne en cuir rose shocking due au sellier genevois Gautier. On imaginerait davantage Dita von Teese que Penelope Fillon devant cet objet un peu cocotte. Un objet patrimonial pour notre ville et à prix d'amis. Trente cinq mille francs à la commande. Estimation entre mille et mille cinq. J'avoue par contre avoir détesté les Vlaminck, même s'il s'agit ici de "highlights".
Les surprises de la découverte
Et puis, la dernière surprise c'est toujours de découvrir des objets semblant émerger alors que le regard cherche ceux qu'il avait remarqué sur le papier. C'est ce que j'appellerais «l'effet réalité». Il y a ce qui est photogénique et ce qui ne l'est pas. J'ai ainsi remarqué à la rue Prévost-Martin de bons sièges du XVIIIe siècle, recouvert de frais et agréables pour d'asseoir (j'ai testé pour vous). Prix attendus? Dérisoires. Avec un peu d'imagination (je sais que c'est beaucoup demander), on pourrait faire avec eux un intérieur original et finalement vivable. Qui a envie de poser son fragile séant sur les banquettes capitonnées en poulain noir de IPE Visionnaire (modèle de 1959 de Pompeo et Vittorio Cavalli), également proposées chez Piguet?
Pratique
On visite aujourd'hui vendredi 10 mars, samedi 11 mars et dimanche 12 mars de 12h à 19h. Piguet, 51, rue Prévost-Martin, tél. 022 320 11 77, site www.piguet.com Ventes dès le mardi 14 mars.
Photo (Piguet): La coiffeuse de Gautier, un peu tronquée par le recadrage.
Texte intercalaire.
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GENÈVE/On visite chez Piguet avant les ventes de la semaine prochaine