Quelles sont, Lionel Bovier, vos relations actuelles avec les autres musées genevois? - Historiquement, notre partenaire principal demeure le Cabinet des art graphiques, qui a un important fonds contemporain. Mais aujourd'hui, il faudrait désenclaver. Trouver des synergies. Parvenir à des accords pratiques supposant le moins d'administration possible. On vit dans un monde compliqué de fiches de prêts à remplir. Après tout, nous servons le même public. L'idéal serait un droit d'usage. Il permettrait aux pièces de circuler. On prêterait et on emprunterait dans un esprit de collégialité.
Entretenez-vous des rapports avec le Musée d'art et d'histoire qui conserve aussi de l'art contemporain? - Oui. Mais il y a visiblement deux problèmes au MAH. Le premier est l'absence de projet muséographique. Le second tient à sa gouvernance. Il y a des questions qui se posent en voyant sa direction montrer de telles difficultés à remplir sa tâche avec une dotation annuelle de 34 millions.
A part les musées, avec qui voudriez-vous lancer des ponts? - Nous collaborons avec la HEAD (Haute Ecole d'Art et de Design), ce qui me semble normal. Il faudrait maintenant tisser des lien avec l'Université. Nous avons besoin de projets communs pour que Swisstourisme vende enfin Genève comme une ville de culture. Ceci à l'étranger comme en Suisse, où il convient d'encourager la mobilité dans l'autre sens. Après tout, les Genevois vont bien à «Art/Basel», chez les Beyeler ou au Kunsthaus de Zurich! On pourrait au moins organiser des voyages de presse communs. Celle-ci n'a pas assez d'argent pour faire bouger ses journalistes. Cela suppose un effort collectif. Mais il y a une porte entrouverte. La Ville semble aller dans cette direction, avec quelqu'un comme Carine Bachmann du Département de la culture et du Sport.
Qu'est devenu «Le Voyageur», qui promenait le Mamco dans les communes genevoises? - Ah! «Le Voyageur», qui fonctionnait à la manière d'un cirque, avec chapiteau à dresser et à démonter, avait été imaginé pour les 20 ans du Mamco en 2014. Il aurait dû y avoir, à ce moment-là, la matérialisation d'une promesse de rénovation du musée. Il avait été ouvert en 1994 en faisant de simples travaux d'urgence à l'intérieur de l'ex-SIP (Société des Instruments de Physique). Cette promesse a beau avoir été signée, elle n'a pas été tenue. «Le Voyageur» est donc devenu un appendice à gérer. Il y avait les accords à trouver avec les communes. Les déplacements. Une exposition nouvelle à créer pour chaque étape. C'était ruineux et en plus chronophage pour une petite équipe. Il est donc vite apparu des problèmes de programmation et de gestion, ceci d'autant plus que l'initiative avait été nettement sous-évaluée. Certains éléments se démontaient mal. Il fallait aplanir les terrains. Ajoutez l'eau. L'électricité. Bref, «Le Voyageur» coûtait sept fois plus que prévu. Il fallait dès le départ que les communes participent aux frais. Elles se sont du coup mises à reculer. Tout s'est retrouvé bloqué. Je n'ai aujourd'hui plus qu'un seul candidat, Meyrin. Mais ce candidat ne dispose pas de la parcelle libre voulue...
Vous allez donc pouvoir vous recentrer sur un bâtiment, où bien des choses sont à revoir. - Achetée par la Ville en 1989, l'ex-SIP a, comme je vous l'ai dit, été rénovée à la va-vite. Le bâtiment pose aujourd'hui des problèmes d'électricité (un comble!), d'accès clair (il en existe quatre!), de convivialité (pas la moindre cafétéria!) et surtout de sécurité. Le BAC (Bâtiment d'art contemporain) n'est absolument pas aux normes. Il se trouvera toujours des gens pour dire que qu'il en va de même en Italie ou en Espagne. L'ennui, c'est que c'est faux! De gros efforts ont été accomplis, là-bas. Il y a des choses qu'on ne verra bientôt plus qu'à Genève, où la Ville semble un peu nous confondre, sous l'étiquette «jeunes», avec une Usine servant à des concerts de rock. Ce n'est pas que les projets de transformation aient manqué. Bien au contraire. J'en ai retrouvé sept dans nos archives. Du travail y a été fait. Il s'y est déployé de l'énergie. Mais les propositions sont venues se heurter au mur de l'argent. Il ne suffit pas de bonnes intentions.
Avez-vous une politique frontale avec les autres occupants du BAC (Bâtiment d'Art Contemporain)? - J'essaie. Il faut faire front commun. Je me suis d'abord entendu avec Andrea Bellini du Centre d'art contemporain (CAC). Avec les autres, je tente maintenant de m'entendre sur une situation à débloquer petit à petit. Un sponsor s'est offert à nous offrir un «lobby» commun afin de vendre quatre institutions. Les choses avancent.
Et où en êtes-vous, en attendant des jours meilleurs, dans le réaménagement du Mamco? - Là aussi, les choses bougent. Tout ne doit pas laisser place aux expositions. Il n'y a aucune raison de prétériter le permanent. Celui-ci doit juste s'intégrer dans ce que j'appellerais «l'exposition globale». Cela signifie que des changements peuvent intervenir à tous les étages. Deux de ceux-ci partent des collections, historiques ou non. Des textes de présentations clairs situent les œuvres et les artistes. Le premier, où se trouve aujourd'hui Wade Guyton, constitue dans mon esprit un plateau flexible. L'espace doit s'adapter au contenu, et non pas le contraire. Pour Wade, on en a fait un lieu inondé de lumière naturelle. Pour «Zeigeist», qui sera verni le 21 février, nous reconstruirons des murs. L'important, pour moi, est de disposer dans tous les cas d'une surface de mille mètres carrés. Mille mètres, c'est un peu partout le format actuel d'une exposition C'est donc celui qui s'impose pour créer des coproductions. Guyton nous est du reste venu du Consortiuum de Dijon.
Et le quatrième? - Le siège de nos particularités genevoises. Je compte ici regrouper nos espaces spécifiques, à l'exception de «L'appartement», qui restera où il est. On trouvera donc sous le toit Sarkis, la Poésie concrète, Fluxus, Ecart.
Et qu'y apportez-vous de supplémentaire? - Rien de personnel. Je n'entends pas montrer ma patte. Mon ego ne se situe pas là. Un musée d'art contemporain me semble un conservatoire de pratiques. Plus un travail avec les artistes. Des artistes dont le directeur ne fait pas partie.
Vous avez pourtant décidé de supprimer les murs de couleur. - C'est vrai.
Photo (Mamco): "L'appartement", qui fait partie des lieux identitaires du Mamco.
La première partie de cet entretien avec Lionel Bovier se trouve une case plus haut dans le déroulé.
Prochaine chronique le mardi 10 janvier. La Fondation Alberto et Annette Giacometti de Paris ouvre un institut de recherches sur les Modernes
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GENÈVE/Lionel Bovier, après un an à la tête du Mamco. Suite et fin