Un an déjà. Un an seulement. On ne sait pas comment définir les débuts de Lionel Bovier à la tête du Mamco genevois. Tout s'est passé discrètement. Avec le nouveau directeur, qui a succédé en janvier 2016 à cet accapareur de projecteurs qu'est Christian Bernard (ceci dit en toute amitié), il n'y a pas eu de grandes déclarations d'intentions. Pas de promesses d'une révolution immédiate. Les faits se sont simplement succédé. Un autre rythme apparent d'expositions. La disparition de certaines structures de salles. Un accent nouveau sur la collection. Un autre type de mise en scène aussi. La couleur a par exemple disparu des murs.
Le plus facile était d'en discuter avec l'intéressé. Un rendez-vous long, mais pas assez pour faire le tour du ou des problème(s). Il ne sera ainsi pas question de livres, puisque le Mamco constitue aussi une maison d'éditions, jusqu'ici indépendante des présentations temporaires offertes par ce musée d'art moderne et contemporain qui a, je le rappelle ouvert en septembre en 1994.
Commençons par les débuts, Lionel Bovier. - Je me suis installé dans mon bureau le 24 décembre 2015 afin de me sentir prêt le 4 janvier 2016. On attendait de moi quelque chose. Je sentais une inquiétude de la part des autorités genevoises. Il n'y avait pas de nouvel horizon clair en vue. Je bénéficiais juste d'un contrat de droit privé, valable cinq ans et renouvelable deux fois. Cinq ans, c'est peu pour un mandat allant bien au-delà de l'organisation d'expositions régulières. Mais cela constitue une limite symbolique après le très long règne d'un directeur-fondateur.
Qu'est-ce que cela représente pour vous d'être un continuateur et non un fondateur? - Une position bien évidemment différente. Il y a la génération qui a mis en place des structures qu'elle veut pérennes. Elle éprouve pour elles un attachement paternel. Et puis la suivante, qui voit l'institution d'un regard un peu plus détaché. Cela dit, il faudrait aussi une fois parler des pionniers qui ont mené depuis 1974 des combats pour qu'il existe enfin à Genève un musée d'art moderne. Il ne faut pas les oublier! Eux remontent bien plus loin encore que Christian Bernard. Ils ont tout connu, des premières réunions à la fondation de droit public en 2005, la Fondamco.
Vous en comptez parmi nos «Amis». - Absolument. Le Mamco possède environ 1000 «Amis», dont certains datent des origines, alors que d'autres sont tout récents. Ce sont des gens qui participent à notre vie. Il suivent des cours, font des visites commentées, partent en voyage. Certaines de ces personnes investissent ici de leur temps, comme bénévoles, avec un bureau dans nos locaux. Leur déléguée Delphine Folliot les représente. Elle fait véritablement partie de notre équipe. Et puis, parce qu'il faut bien parler argent, nous avons des amis donateurs.
C'est le moment, Lionel, d'aborder la question du financement du Mamco. - Les chiffres sont publics, et donc publiés. Nous fonctionnons avec un budget de cinq millions, acquisitions comprises. Le financement bipartite entre les entités publiques et la Fondation nous en garantit environ 4,5. L'apport de la Ville et du Canton représente le tiers de cette somme. Un million de la Ville, ce qui est peu. C'est aujourd'hui le budget d'une simple festival. Il nous faut donc chercher le reste. Mécénat.
On est frappé par la rapidité avec laquelle les collections du Mamco s'accroissent. - Il est permis d'y voir une preuve de notre dynamique. Un musée n'acquerrant plus rien s'endort. Nous avons reçu deux gros legs en 2016. Notre fonds propre en arrive ainsi à 2500 pièces, ce qui représente un patrimoine estimé à 60 millions. Et ceci, grâce au privé et à ses largesses. Il y en avait à peine une centaine de pièces en 1994, quand le Mamco a reçu à sa création les collections de l'AMAM (ou Association pour un Musée d'art Moderne). En imaginant des expositions, nous pouvons ainsi puiser dans nos collections. En choisissant.
J'ai cependant remarqué que nombre d’œuvres, longtemps déposées au Mamco, n'étaient plus là. - J'ai décidé de mettre fin à beaucoup de dépôts. C'est cher à entretenir, un dépôt, et certains d'entre eux étaient chez nous depuis vingt ans sans espoir de don final. Il faut se dire que nous sommes en Suisse, où existent d'importants ensembles d'art contemporain. Emprunter temporairement me semble une solution plus économique. J'ai fait des exceptions pour ce qui nos ensembles cohérents, comme l'art américain des années 1980. Il m'a fallu reconsidérer chaque cas en me posant sans cesse la question: «De quoi avons-nous vraiment besoin?». J'avais la chance de garder encore un œil frais.
Alors, de quoi le Mamco a-t-il besoin? - De «L'appartement» par exemple, proposé comme une entité «habitée »sur une partie d'étage. C'est là un choix très caractéristique des années 60 en matière d'art minimal. Rien n'a été touché depuis. Les choses sont restées telles que Ghislain Mollet-Viéville les avait pensées à l'époque. C'est un ensemble si important que des thèses ont été consacrées à cet ensemble. Nous n'allions pas nous en séparer. Seulement voilà! Mieux vaut maintenant tenter de l'acheter. Il y a aussi des artistes qui nous sont devenus identitaires. Je citerai Franz Erhard Walther. Ils font partie de la maison.
Vous êtes donc un continuateur. - Je ne vais pas tout faire exploser! Je maintiens, tout en enlevant ce qui nous coûte trop cher et ce que je considère comme indigne d'un musée possédant un caractère très particulier. Nous avions raison d'en rester à Walther, que montre maintenant en suiveur le Reina Sofia à Madrid. C'était bon de soutenir Siah Armadjani, que l'on retrouve aujourd'hui à Minneapolis. Le milieu de l'art, dans son ensemble, a compris la pertinence de tels artistes. L'important pour une institution, de nos jours, est de se définir une spécificité. Un champ de compétences.
La suite de l'entretien une case plus bas dans le déroulé. Les rapports avec les autres musées. Les projets de réaménagement.
Photo (Tribune de Genève): Lionel Bovier, bien sûr, dans les salles du Mamco.
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GENÈVE/Evoluer sans heurts. Lionel Bovier après un an à la tête du Mamco