Je me demandais ce qui allait se passer. La dernière fois que j'ai passé par Florence, en octobre 2017, le Palazzo Bartolini Salimbeni, qui jouxte la piazza Santa Trinita, se trouvait sous bâches. Restauration. Le chef d’œuvre Renaissance de Baccio d'Agnolo ne me semblait pourtant pas en si mauvais état. Pourquoi donc ce coup de «polish» supplémentaire?
La réponse vient de tomber avec un communiqué de presse venu d'Italie. Dès le mois de mars 2018, l'étage noble accueillera une partie de la Collezione Roberto Casamonti. Il s'agit là, selon le critique Bruno Corà, d'un des ensembles «les plus importants d'art moderne et contemporain de la Péninsule.» Il se verra ainsi mis à disposition du public. J'avoue cependant, en retournant chaque mot du prière d'insérer, que je ne suis pas parvenu à déterminer l'actuel statut juridique de la Collezione. Il semble cependant s'agir d'une association privée, même si Roberto Casamonti assure vouloir «la partager avec les Florentins.» Il faut dire que dans son pays, on ne se montre jamais trop prudent. A Florence même, la Collezione Contini Bonacossi, théoriquement partie intégrante des Offices, n'a été montrée au public que quelques mois en trente ans...
Une galerie présente partout
Casamonti est connu comme le loup blanc dans le marché de l'art. Né en 1940, ce fils de collectionneur a fondé en 1981 la Galleria Tornabuoni dans la rue du même nom à Florence. Il s'agit de l'artère la plus élégante de la cité, avec le défilé des principales boutiques de mode, dont le très historique Emilio Pucci. La boutique a prospéré au-delà des espérances. En 1993, elle installait une antenne à Crans-Montana. D'autres succursales ont suivi à Milan, Fonte dei Marmi, Paris et Londres. Inutile de préciser (mais précisons quand même) que la Tornabuoni est présente dans les grandes foires, dont l'inévitable «Art/Basel». Avec Continua de San Giminiano, plus axé sur le contemporain, c'est le poids lourd du monde de l'art moderne transalpin.
Que contiendra le Palazzo Bartolini Salimbeni dès le 24 mars? Essentiellement de l'art italien. Les Florentins comme les Romains ou les Milanais ont aujourd'hui encore beaucoup de peine à acheter étranger. La première présentation, prévue pour un an, restera très historique. Elle ira des débuts du «novecento» (autrement dit le XXe siècle) aux années 1960. Il y aura aux murs des œuvres de Boldini, Balla, Viani, Sironi, Severini, Marino Marini (qui possède son musée à Florence, un peu déserté), Morandi, Chirico, son frère Savinio, Prampolini, Casorati, Magnelli, Dorazio, Vedova, Burri, Fontana, Manzoni ou Afro. La touche internationale sera donnée par Picasso, Yves Klein, Chagall, Max Ernt ou Kandinsky. Dès l'été 2019, les visiteurs pourront passer à la partie contemporaine, dont le contenu exact reste à dévoiler.
Accès gratuit, mais sur réservation
Dirigée par Sonia Zampini, qui a pendant longtemps collaboré avec la Galleria Tornabuoni, l'institution ne se limitera pas à des accrochages semi-permanents. «L'objectif est aussi d'organiser des expositions et des événements pluridisciplinaires. Ils devront valoriser le dialogue culturel sur la création moderne et contemporaine.» L’accès au lieu semble à la fois généreux et compliqué. Si l'entrée restera gratuite, l'accès se fera sur «simple réservation». Autant dire que l'entrée ne sera pas si simple pour les gens extérieurs à Florence, qui n'y penseront jamais. On ne réserve ordinairement que pour des endroits surpeuplés comme les Offices ou l'Accademia. Les petits musées de Florence restent à peu près vides... Notons cependant que le Palazzo Bartolini Salimbeni se dresse dans un endroit favorable. Il se trouve face au Museo Ferragamo sur la piazza Santa Trinita et dans la même rue que le Palazzo Strozzi.
Avec cette nouvelle entité, l'Italie complète son réseau moderne et contemporain, si déficient il y a deux ou trois décennies. Il n'y avait alors guère d'important que le Castello di Rivoli, près de Turin. Aujourd'hui, Rome possède deux grands musées dédiés au passé proche et au présent. Florence a déjà un musée du XXe siècle, mais tourné sur la ville-même. Milan et Venise accumulent les fondations privées, la Ca'Pesaro de cette dernière ville devenant par ailleurs un lieu municipal important. Cela dit, tout se rediscute. Le Castello di Rivoli a hérité, comme je vous l'ai dit en juillet dernier, de l'énorme collection Federico Cerruti, qui va du XIVe siècle à nos jours. La directrice Carolyn Christov-Bakargiev a du coup décidé d'un faire un musée généraliste «vu avec l'optique du XXIe siècle». Ouverture en janvier 2019.
Photo (DR): Le galeriste Roberto Casamonti devant un Alighero Boietti.
Un texte suit sur la fondation créée par le milliardaire français Edouard Carmignac.
Prochaine chronique le vendredi 20 janvier. Un roman, pour changer. Et même deux!
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.
Cet article a été automatiquement importé de notre ancien système de gestion de contenu vers notre nouveau site web. Il est possible qu'il comporte quelques erreurs de mise en page. Veuillez nous signaler toute erreur à community-feedback@tamedia.ch. Nous vous remercions de votre compréhension et votre collaboration.
FLORENCE/La collection d'art moderne de Roberto Casamonti devient musée