On a beaucoup glosé autour de la collection Cornelius Gurlitt, qu'a fini par accepter le 24 novembre 2014 le Kunstmuseum de Berne (1). Il a été question d'héritage nazi, de spoliations éventuelles et de restitutions probables. En revanche, le flou le plus total a été maintenu autour des œuvres elles-même. Qu'y a-t-il réellement dans ce fonds de quelques 1500 œuvres, découvertes d'abord à Munich, puis à Salzbourg?
La réponse est simple à trouver. Il existe un lien, ou plutôt deux, quelque part sur le site du Kuntsmuseum, devenu l'héritier du marchand allemand. Oh... Il ne faut pas s'attendre à quelque chose de précis et de détaillé. On s'étonne même que le chantier ne soit pas plus avancé, à moins qu'il ne s'agisse là d'un document de travail très précoce. Il n'y a aucunes dimensions. Beaucoup de tableaux, de dessins et de gravures ne sont accompagnés d'aucune photo. Assez misérables, celles-ci ne peuvent pas s'agrandir. Autant dire qu'il faut beaucoup deviner. Certaines questions que se posent les auteurs laissent néanmoins pantois. "Peut-être un pastel". Il me semble que ce genre de choses se voit à l’œil nu.
Les tableaux
La première chose frappante est le peu de tableaux. Il s'en trouve, bien sûr, mais ils restent infiniment minoritaires par rapport aux pièces sur papier: gravures, aquarelles et dessins. J'ai quand même noté la présence d’œuvres données à Gustave Courbet (5 toiles, rien qu'à Salzbourg!), de Monet , de Monticelli , de Degas , d' Otto Dix , de Pierre-Paul Prud'hon , d' Eugène Delacroix , d' Henri Matisse (un lumineux portrait de femme), de Cézanne (un paysage), de Corot , d' Auguste Maillol , de Manet , de Pissarro , de Renoir , de Lautrec ou de Signac. C'est déjà pas mal! Notez qu'il n'y aura pas que le problème de leur trouver d'éventuels propriétaires légaux. Le travail d'authentification semble gigantesque. Il faudra prouver, avec la collaborations d'experts et peut-être de scientifiques, l'autographie de toutes ces toiles. Des années de travail...
Les dessins et aquarelles
L'ensemble de dessins apparaît en revanche très important. Il y a des feuilles isolées, mais aussi de grands ensembles. Je pense à Max Liebermann , le principal impressionniste allemand, déclassé après sa mort en 1935 en raison de ses origines juives. Il se niche aussi, dans ce trésor, de nombreux Delacroix (ou supposés tels). Enormément de Rodin , dont une sculpture a également été trouvée. La liste ne s'arrête bien sûr pas là. Millet , Otto Dix , Degas , Corot , Renoir , Tiepolo (le père et le fils), Macke , Gauguin , Watteau , Boucher , Paul Klee , Henry Moore , Pechstein , Pissarro , Ingres , Franz Marc , Max Ernst , Kirchner , Cézanne , Fragonard , Géricault , Oskar Schlemmer (avec des aquarelles qui ont l'air fort belles), Seurat (un "noir" apparemment magnifique), Lautrec , Nolde , Picasso ou Hubert Robert sont là. On constate ainsi une forte représentation de l'art du XVIIIe siècle français et italien. Une surprise!
Le fonds d'estampes
Le plus cohérent se situe au niveau de l'estampe. L'amateur remarque là une stupéfiante série de pièces expressionnistes, tirées à partir des bois originaux. Elles poseront d'affreux problèmes en cas de demande de restitution. Il s'agit par définition de multiples. De quel exemplaire s'agit-il là, et comment le prouver s'il n'y a pas eu de numérotation? Il n'empêche que Kirchner , Heckel , Schmidt-Rottluff , Grosz , Dix , Nolde , Kokoschka ou Edvard Munch se voient ici représentés par des pièces majeures, rares et donc très recherchées. Il y a aussi quelques classiques, de Dürer à Tiepolo en passant par Rembrandt et Cranach . Un cabinet graphique qui semble de grande qualité.
Les pièces isolées
Citons autrement des isolés. Une peinture chinoise sur soie. Un reliquaire Kota africain. de petits vases grecs. Un bol à thé japonais en céramique. Des estampes d'Utamaro ou de Harunobu. Ils ont l'air presque égarés. D'autres ensembles étonnent moins. Ils ne se verront nullement contestés. Il s'agit en effet des fonds d'atelier des Gurlitt peintres. Il s'en trouve trois, actifs entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe. Heinrich, Louis et Cornelia n'ont été dérobés à personne. Il faut considérer leurs réalisations comme un fonds familial. Un mémorial.
(1) Un procès, intenté par une cousine, reste encore pendant. Elle conteste le testament.
Pratique
www.kunstmuseumbern.ch Photo (DR): Cornelius Gurlitt avec deux de ses oeuvres expressionnistes, photographié peu avant sa mort en 2014.
Prochaine chronique le vendredi 2 janvier. La photo de presse suisse à Prangins.
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BERNE/Qu'y a-t-il dans l'héritage Gurlitt?