J'ai failli n'y laisser prendre et je n'en ai pas honte. Je ne suis en effet pas le seul. L'exagération se révèle si faible et la démonstration si probante que l'affaire passe comme une lettre à la poste (ou plutôt mieux, vu l'état actuel des PTT). «Le Courrier» a annoncé que le Musée Rath, fermé depuis quelques jours et en attente d'un avenir radieux, deviendrait dès 2019 un «Musée de la nuit». Reste la date de ce gros article de Samuel Schellenberg (1), paru sur le seul site du journal, ce qui lui a fait échapper à tout démenti de la part d'une revue de presse adéquate. Le texte porte en effet la date du 1 er avril.
Tout se tient en effet. Le musée se verrait modifié «sensiblement» à l'intérieur avec 7 millions fournis par l'inépuisable Fondation Wilsdorf. Le projet se baserait sur le succès des «afters» du Musée d'art et d'histoire, qui drainent effectivement des milliers de personnes. Le Rath deviendrait donc un Art Club, avec des soirées thématiques dans le sous-sol, avec DJs, voire concerts «live». Si le lieu ne serait ouvert de le soir, dès 18 heures, il y aurait cependant dès midi un café-bar Rathatouille, avec apéros d'art. «Via son smartphone, le public pourra choisir la peinture ou la sculpture à l'honneur le lendemain.» L'étage resterait certes un musée, mais... La notion d'exposition serait revue avec la chaire de l'EPFL dédiée aux nouvelles formes de muséographie. Or chacun sait ce qu'il fut penser de l'école lausannoise. Inutile de préciser que l'endroit set privatiserait à la demande.
Propos plus vrais que nature
L'auteur de l'article en a profité pour réaliser des entretiens plus vrais que nature avec Sami Kanaan ou Jean-Yves Marin, dont on reconnaît les discours, bien dans le ton actuel. Il s'agit de s'adresser à toutes les générations, d'attirer un public nouveau et d'organiser des événements médiatiques. Suivent les réactions logiques des partis, pour autant que ceux-ci gardent une quelconque influence. Le plus mécontent du projet resterait cependant Lausanne, qui aurait développé le même plan pour la partie du Palais de Rumine laissée vide après le départ du Musée cantonal des beaux-arts à la gare en 2019. Il y aurait notamment là une piste de danse commandée à Sylvie Fleury.
J'apprécie beaucoup Samuel Schellenberg. Il avait déjà donné un poisson d'avril prémonitoire, en 2015, sur le retrait de Jean Claude Gandur de la scène culturelle genevoise («Le mécène Gandur évincé du Musée d'art et d'histoire?»). Cette fête des fous que reste le 1 er avril permet des audaces interdites dans la vie courante. La réalité se révèle hélas encore plus délirante. Il y a quelques jours, «Le Monde» se faisait l'écho de chasses au trésor réelles organisées le mercredi soir par le Louvre. Pris de panique (il a perdu deux millions de visiteurs par an), le musée fait aujourd'hui n'importe quoi sous la houlette de Jean-Luc Martinez. Ce dernier fut pourtant, avant de devenir directeur, un excellent professeur et conservateur. Le 2 mars, on apprenait que l'immense rapport sur les musées du XXIe siècle commandé par la France, avait oublié de parler des collections, comme le rappelle ce 1 er avril «La tribune de l'art». Le 11 mars enfin, la France toujours soutenait, voire imposait, la candidature de la nullissime ministre de la culture Audrey Azoulay à la tête de l'Unesco.
Bruit proche
Autre bruit, plus proche. Après celle, précisément consacrée aux musées du XXIe siècle, notre Musée d'art et d'histoire n'a plus d'exposition au programme pour le bâtiment de la rue Charles-Galland. Rien! Les nominations en remplacement des conservateurs partis s'enlisent. D'aucuns, au MAH, se demandent si le siège du musée ne va pas fermer au public, afin de mieux permettre le fameux (et interminable) «chantier des collections» dont je vous ai récemment parlé. Sauf pour organiser quelques «afters», bien évidemment!
(1) "Absent jusqu'au 10 avril", me dit son adresse mail...
Pratique
https://www.lecourrier.ch/148212/le_rath_deviendra_un_musee_de_la_nuit pour l'intégralité de l'article du «Courrier».
Photo (Site du Musée d'art et d'histoire): La façad du Musée Rath, futur Musée de la nuit.
Texte intercalaire.
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1er AVRIL/"Le Courier" fait du Musée Rath un futur Art Club bobo et branché