Vous avez sûrement déjà entendu parler du « personal branding », une association de termes qui signifie à peu près « l’art de faire sa promotion personnelle ». Evidemment, cette nouvelle compétence a connu une croissance et une adhésion exponentielles avec le développement des divers réseaux sociaux, qu’ils soient d’ordres professionnel ou privé.
Sauf que. Sauf qu’à ce jeu-là, et étant donné le décloisonnement des deux sphères , il devient difficile de maintenir ou de considérer un espace comme réellement privé à partir du moment où l’information que l’on donne est partagée. Même avec nos amis. Car oui, j’en croise qui argumentent sur le paramétrage hautement confidentiel de leur(s) profil(s), persuadés d’être ainsi à l’abri des chasseurs de têtes perfides ou des collègues trop curieux. Sur le fond, c’est assez juste : cela constitue une première barrière entre ce que vous êtes et ce que vous voulez que l’on pense que vous êtes (vous me suivez ?). Néanmoins, derrière vos amis se cachent de vrais êtres humains, des gens qui parlent, y compris de vous, même si ce n’est pas avec malice, mais potentiellement pas uniquement à vos amis et pas uniquement dans le monde digital.
S’ensuivent logiquement les questions suivantes : qu’ai-je réellement à me reprocher ? Qu’ai-je posté que je n’assume pas ou plus ? En quoi cela peut-il me porter préjudice demain, ou à ma future entreprise ? Consciencieusement, après vous être posé la question, vous repassez le film de vos aventures virtuelles dans votre tête. Face à votre potentiel futur patron ou client, vous voyez soudain, tel un condamné à mort, défiler votre vie digitale sous vos yeux, essayant de ne rien oublier, de ne rien laisser au hasard.
A priori, deux éléments s’opposent alors : votre ligne de conduite personnelle et votre ambition professionnelle. Bien sûr, à l’époque où vous aviez ouvert votre blog perso de testeur de jeux vidéos , vous étiez parfaitement en accord avec vous-même. Et, d’ailleurs, vous l’êtes toujours. Malgré tout, cet interlocuteur – plus proche de la génération X que de la Y, Z ou C d’ailleurs – vous sentez bien qu’à la lumière de vos retours d’expérience de gamer, il vous verra d’un œil nouveau. Et probablement pas du bon.
Idem pour certains de vos statuts Facebook, dont l’ironie ou le deuxième degré pourraient bien lui échapper, malgré le fait qu’ils ont participé de votre succès en ligne, du nombre de vos connaissances, followers, etc. Je n’aborde même pas vos prises de position bien réelles sur des sujets légers ou épineux, qui entreraient à coup sûr en collision avec, au mieux, l’image qu’il se fait de vous, au pire, celle qu’il se fait de qui vous devriez être.
Pour les plus éveillés et les plus informés, il reste alors une solution : l’ épuration digitale de votre image . Le nettoyage de printemps de l’ancienne représentation de vous-même, l’anéantissement d’une part de ce qui fait, pourtant, votre particularité.
Adepte et première bénéficiaire du « personal branding », je me permets d’émettre quelques craintes sur les dérives de cette nouvelle promotion d’ un soi qui, pour être admis, doit se séparer de tout ce qui le caractérise . En psychanalyse, on distingue le « faux self » du « vrai self » , le paraître et l’être. Evidemment, le paraître a une fonction : il nous permet de nous faire accepter et nous protège du jugement de l’Autre. Pourtant, en définitive, l’être est bien plus pérenne: il nous permet de nous accepter nous-mêmes, donnant au jugement de l’Autre sa juste place.
A ceux qui me demanderaient s’il faut « cacher » des choses de soi en ligne par crainte de représailles, je réponds que le plus difficile n’est pas de mentir aux autres : c’est surtout de se mentir à soi-même…
*Chasse le naturel à coups de fourche, il reviendra toujours.
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Naturam expelles furca, tamen usque recurret.*