Daniel Hope, un virtuose de l’archet rempli d’espoir
Daniel Hope, directeur musical de l’Orchestre de chambre de Zurich, est l’un des plus grands violonistes de notre temps. Retour sur sa vie et son œuvre. Herbert Büttiker
L’Orchestre de chambre de Zurich est probablement la petite sœur de l’Orchestre symphonique de la Tonhalle, mais il n’a pas à rougir. L’OCZ l’a prouvé depuis septante-cinq ans en jouant un rôle important dans la vie des concerts zurichois. Les nombreuses tournées et résidences de festivals témoignent de la réputation internationale de l’ensemble, qui compte actuellement 28 membres. Depuis la saison 2016-2017, Daniel Hope, violoniste vedette, est un chef de file imaginatif dans le domaine de la musique classique et un médiateur musical exceptionnel.
Son engagement a suscité des attentes, notamment dans le cadre du 75e anniversaire de l’orchestre. « Nous marquerons l’événement en collaborant avec de grands solistes. Mais surtout, en célébrant l’orchestre et les personnalités de l’ensemble », déclare Hope. Il est également prévu de se rendre à la Philharmonie de Cologne, au Musikverein de Vienne et, plus à l’est, à Odessa en Ukraine. La tournée sera consacrée au dernier album dédié à la musique de la Belle Epoque que Daniel Hope a sorti avec l’OCZ. La période artistiquement excitante et voluptueuse qui précède la Première Guerre mondiale plaît particulièrement à l’artiste britannique d’origine sud-africaine. Celui qui vit à Berlin depuis plusieurs années collectionne les œuvres qui sont liées à ce temps-là.
Tournées annulées à cause du Covid-19
La moitié de la saison en cours a été perdue à cause de l’actuelle pandémie de Covid-19. L’OCZ venait de terminer la tournée, « jour après jour dans les plus grandes salles d’Allemagne », lorsque tout s’est arrêté. Sans attendre, le violoniste a lancé [email protected], des capsules vidéo de ses performances musicales. Après quelques jours seulement, le rendez-vous musical est devenu incontournable grâce à une présence quasi quotidienne sur internet ainsi que sur Arte et la chaîne de télévision allemande ZDF. Au total, ce ne sont pas moins de 70 enregistrements qui ont été diffusés comptabilisant 5 millions de vues.
Pendant ce temps, l’OCZ a dû faire une pause. A terme, il pourrait profiter des nouvelles expériences de son directeur. « Le monde est obligé de faire une remise à zéro. Avec cette crise, il faut des idées neuves, de nouveaux formats pour l’avenir de la musique classique, explique Hope. J’en suis. » Avec un nom porteur d’espoir, le virtuose est loin d’être pessimiste. Mais la crise lui a aussi fait prendre conscience de cela : « La musique permet d’être proche des gens. Les règles de distance sont certes nécessaires au niveau sanitaire mais vont à l’inverse de mon idée que la musique doit rester intime, surtout au niveau d’un orchestre de chambre. »
Hope et Menuhin
Hope connaît l’OCZ depuis qu’il est enfant. Sa mère était secrétaire et directrice du violoniste et chef d’orchestre américain Yehudi Menuhin, dont l’orchestre jouait chaque année au Gstaad Menuhin Festival. « C’est là que j’ai fait une grande partie de mon chemin vers la musique. Je me remémore avec nostalgie des concertos pour violon, Bach, Vivaldi, Mozart, Mendelssohn joués par l’OCZ et son merveilleux fondateur, le maestro suisse Edmond de Stoutz. »
Mais le chemin n’a pas été facile même si la star mondiale Yehudi Menuhin l’a pris sous son aile comme élève. Certes, Hope en est fier et reconnaissant. Cependant, « grandir à l’ombre d’un géant est assez difficile ». Il explique avoir dû travailler durant des décennies pour être à la hauteur de cette situation. Aujourd’hui, Hope est un musicien accompli. Seul comme soliste avec son Guarneri del Gesù ou comme chambriste avec de nombreux grands amis artistes, sa mission reste « de transmettre les valeurs de la musique classique, son élan et sa beauté. Cet art doit vivre – et survivre – à travers nous. »
La musique, un facteur de paix
Ecrivain à ses heures, Hope aime raconter des anecdotes et faire des recherches sur l’héritage culturel juif et ses antécédents douloureux. Ses centres d’intérêt sont les musiques de films hollywoodiens influencées par les compositeurs en exil et par ceux du ghetto de Theresienstadt. Mais également par sa propre histoire familiale marquée par la persécution, retracée en partie dans le film documentaire « Daniel Hope – le son de la vie ». Les incidents antisémites et racistes, surtout en Allemagne, où il est devenu récemment citoyen, l’effraient. Il ne veut pas faire de sa scène musicale une plateforme politique, mais voit en la musique un facteur de paix et de tolérance. « La musique apporte des expériences impressionnantes. » Hope reçoit quotidiennement des lettres de fans, dont cette femme souffrant d’un cancer, soulagée par sa musique. « Quand vous lisez cela, vous comprenez que la musique n’est pas seulement importante, mais elle est aussi pertinente pour la vie. »
Les points forts du programme de la saison anniversaire de l’Orchestre de chambre de Zurich
27 octobre 2020
Ouverture à la Tonhalle Maag, Zurich.
19 novembre
Retrouvailles avec Roger Norrington, ancien directeur musical de l’OCZ.
11 et 12 décembre
Concert d’anniversaire de l’OCZ avec une première mondiale de Cécile Marti.
15 décembre
Concerto grosso à l’époque baroque et moderne avec le pianiste Simon Bürki.
31 décembre
Concert de la veille du Nouvel-An avec Maurice Steger (flûte à bec et chef d’orchestre) et Rachel Harnisch (soprano).
12 janvier 2021
L’OCZ joue avec le Marcus Roberts Jazz Trio. Au programme, Gershwin, Bernstein et Weill.
14 mars 2021
L’OCZ et les King’s Singers créent un concert accompagné d’un livre d’images d’animaux avec «The Wind in the Willows» de John Rutter.
4 mai 2021
Concert symphonique avec le pianiste Alexandre Tharaud.
8 juin 2021
Concert avec le jeune violoniste suisse Sebastian Bohre.
22 juin 2021
L’OCZ joue sous la direction du spécialiste du baroque Ton Koopman.
8 juillet 2021
Fin de la saison avec les premières mondiales de Luzia von Wyl, Daniel Schnyder et Christoph Baumann.