Après les départs en masse, Baselworld se réinvente
Après les départs de nombreuses marques au cours des derniers mois, les organisateurs de Baselworld ont dû repenser le concept de la grande foire dédiée à l'horlogerie et à la joaillerie de Bâle.

Critiques de longue date sur le modèle de l'événement, concurrence du SIHH à Genève, défis lancés par les canaux numériques, désaffection pour les foires et autres grand-messes du genre,... Baselworld faisait face à de nombreuses contestations et remises en cause depuis des années. Les départs de marques emblématiques comme Hermès , Corum , Girard-Perregaux , Swarovski et d'autres avaient lancé un avertissement aux organisateurs. Mais c'est le départ du Swatch Group avec sa dizaine de marques qui a définitivement ébranlé le rendez-vous bâlois. Face à un tel coup, MCH Group , organisateur de Baselworld, allait-il enfin réagir?
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En ouvrant l'édition 2019 de Baselworld, le nouveau directeur Michel Loris-Melikoff (ancien directeur général de MCH Beaulieu Lausanne SA ), qui a succédé à Sylvie Ritter, a voulu dynamiser les halles de la foire. «Nous nous sommes demandé ce qu’il manquait aux exposants et aux visiteurs. Il manquait un restaurant, un lieu de convivialité ouvert à tous: en Romandie, les moments passés à table sont cruciaux car ils participent aussi de l’expérience avec les marques, l’événement et le business. Nous avons aussi voulu donner plus de place et une place plus centrale pour les médias et leurs représentants au cœur de la foire. Pour eux et les influences, nous avons aussi créé des blogspots de disposer d'espaces de création audiovisuelle. J’insiste sur le fait que ce n’est qu’une première étape. D’autres changements viendront dans les éditions à venir», expose le nouveau directeur.
La restauration rapatriée dans les halles

En lieu et place des anciens pavillons Omega, Blancpain, Tissot, Harry Winston, Longines, Breguet, Jacquet Droz, Glashütte, Certina, Hamilton ou encore Rado, une vaste et large allée a été tracée, pour le plus grand bénéfice de Chanel , Bell & Ross ou encore Breitling , qui ont largement gagné en visibilité. Plusieurs espaces de restauration, publics ou appartenant à des marques (Breitling, Gucci,...) ont vu le jour.
Une volonté de garder les visiteurs à l'intérieur des halles qu'assume Michel Loris-Melikoff: «Nous avons multiplié ces lieux de convivialité à travers les halles, en les plaçant désormais au centre des allées et non plus en les reléguant contre les parois des halles, et nous avons voulu améliorer la qualité proposée avec une vraie offre gastronomique». Un Meilleur ouvrier de France (en partenariat avec l' école hôtelière de Glion ) est ainsi aux fourneaux aux étages de la halle 1, «en attendant un chef étoilé l'an prochain», confie le directeur de Baselworld.

De nouvelles offres de restauration à l'intérieur même des halles de la foire, donc des nouveaux revenus pour les organisateurs, mais Michel Loris-Melikoff ne le cache pas: «Cela ne compensera de loin pas les revenus que généraient les stands du Swatch Group». L'objectif de la nouvelle équipe aux manettes de l'événement est davantage de ré-insuffler davantage de vie au sein des halles de la foire.
Une démarche qui se traduit aussi par la mise en place d'une scène au deuxième étage de la halle 1, avec des défilés et présentations au fil de la semaine que dure Baselworld. «Nous voulons davantage d’espaces de ce type dans les années à venir car nous voulons davantage de talks, d’événements, de rendez-vous, afin d’animer la foire et d’avoir du contenu. Nous avons dix sociétés qui vont présenter leurs collections pendant ces fashion shows. Nous verrons ce que ça donne pour une première année et nous souhaitons que d’autres marques se rajoutent», espère le directeur.
Une meilleure place pour la joaillerie

Ce deuxième étage fait désormais office d'écrin pour les marques de joaillerie. La nouvelle équipe souhaitait rapprocher ces activités des grandes marques de l'horlogerie et l'espace jusque-là assez vide du deuxième étage de cette halle s'y prêtait. Conséquence de ce choix: la halle 2 est vide cette année, de même que la place de la foire est déserte, vidée de ses espaces de restauration, kiosques, pavillons visiteurs et autres parterres fleuris. «Nous avons atteint le fond avec cet étiage d'exposants. Mais ce chiffre-là n'est pas crucial: si nous avons 600 exposants qui font un excellent chiffre d'affaires pendant Baselworld, nous serons contents», assure Michel Loris-Melnikoff.
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Mais la réaction ne passe pas seulement par le comblement des espaces libérés par ces marques ayant déserté Baselworld. Pour faire face aux défis et rester le salon de référence dans le domaine, les organisateurs ont voulu améliorer l'offre à l'ensemble des visiteurs: «les revendeurs ont désormais un lieu où ils peuvent rencontrer des spécialistes du marketing avec de faciliter les passerelles et faire naître des idées et les diffuser. Car les revendeurs n’ont pas toujours les moyens pour cela. Nous leur proposons des services comme des conseils web, de la vidéo, des contenus réseaux sociaux. Ce sont des services additionnels que nous facturons mais qui correspondent à une demande des revendeurs», détaille Christian Jecker, en charge de la communication corporate pour le salon.
Du côté des exposants qui ont choisi de rester, les réactions sont positives mais prudentes. «Cette année, il semble que l'organisation a pris la mesure des enjeux et apporté des réponses qui vont dans le bon sens. D'autres nous sont annoncées pour les prochaines éditions et nous les observerons avec attention. Une marque comme la nôtre a besoin d'un salon de référence comme celui-ci et a besoin qu'il soit dynamique et attractif. Baselworld a fait ses devoirs dans un laps de temps record, Michel Loris-Melikoff a été au fond des choses en écoutant le client, ça laisse présager qu'on va dans la bonne direction», glisse Karl-Friedrich Scheufele, co-président de Chopard .
Le prix des emplacements en mutation
Subsiste la question du prix des emplacements. Un point qui est dénoncé de longue date par de nombreux exposants: pour Eric Bertrand, président des exposants de Baselworld, «La question des prix est la question la plus difficile car c'est la base de nombreux problèmes des salons aujourd'hui: ça coûte extrêmement cher car ça s'additionne aux frais de transport, d'hébergement, de sécurisation des pièces,... donc le coût des espaces était une préoccupation de longue date. La nouvelle direction a pris des premières mesures essentielles. L'ensemble des acteurs du salon s'attend à plus d'efforts et je les comprends. La direction doit comprendre que c'est la raison de nombreux départs, même si d'autres raisons sont parfois mises en avant», souligne-t-il.
«La question du prix a immédiatement été abordée dès mon arrivée, et nous réfléchissons à un nouveau modèle de fixation des prix. Nous invitons d'ailleurs aussi bien les exposants actuels que ceux qui sont partis à venir en prendre connaissance. Dans certains secteurs, on a abaissé les prix. Dans d'autres il fallait une analyse poussée. Mais en 2020, tous les prix vont évoluer», promet en écho le nouveau directeur du salon.
Autre changement notable, mais pas encore vécu car il n'interviendra qu'à partir de 2020: l'harmonisation des dates avec le SIHH: les deux salons se suivront désormais au mois de mai.
«Il était très important pour les détaillants, revendeurs, journalistes d'avoir un seul voyage vers la Suisse pour découvrir les nouveautés des marques de l'horlogerie helvétique», assène Thierry Stern, directeur général de Patek Philippe . Un avis partagé par Karl-Friedrich Scheufele, qui, s'il trouve que «les dates 2020 sont un peu tard mais toutes les maisons présentes ici pourront s'organiser et nous pourrons tous nous organiser». Et de noter que cette harmonisation des dates «est une décision eco-friendly car on économise des voyages lointain, et on sait à quel point ces enjeux environnementaux sont cruciaux aujourd'hui».
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Et les attentes des exposants pour l'avenir? Giuseppe Picchiotti, directeur général de la maison de joaillerie Picchiotti voit le verre à moitié plein: «La présence des joaillers par rapport aux horlogers n'était pas satisfaisante ces dernières années, on peut encore faire mieux mais ça va dans la bonne direction». Pour Karl-Friedrich Scheufele, «Baselworld doit être la meilleure plateforme afin de nous laisser faire notre travail afin de présenter nos créations, mais il faut trouver le bon équilibre entre un salon B2B et un salon B2C. Il est bien que le salon ait toujours été ouvert au public, ce qui n'a longtemps pas été le cas ailleurs. L'accueil doit juste être impeccable». Et cela, Hans-Kristian Hoejsgaard, CEO ad intérim MCH Group, le promet: «l'expérience vécue est au coeur de notre modèle désormais». Ce sera donc aux exposants et visiteurs de cette année de confirmer ou infirmer cette affirmation. -
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