Les jeunes Suisses sont-ils condamnés à la location ?
Devenir propriétaire d’un bien immobilier en Suisse n’est pas donné à tout le monde. D’autant plus pour les acheteurs de moins de 30 ans qui, faute de moyens financiers, se font de plus en plus rares.

Tout vient à point à qui sait attendre…ce proverbe prend tout son sens lorsque l’on observe le marché immobilier suisse. Selon une étude publiée en octobre dernier par Swiss Life , une famille suisse doit épargner en moyenne durant huit ans avant d’acquérir son bien. Sans compter que sur l’ensemble des ménages, seuls 30% disposeraient du capital nécessaire pour s’offrir une maison individuelle moyenne.
Si ces chiffres justifient la stagnation du taux de propriétaires en Suisse (environ 40% depuis 2014), «l’un des plus bas d’Europe», souligne Stefan Heitmann, CEO de MoneyPark , cela permet également de pointer du doigt un autre phénomène: l’absence d’acheteurs âgés de moins de trente ans.
Des biens quasi inaccessibles

S’il n’a jamais été facile de devenir propriétaire en Suisse, pour les jeunes tout est devenu plus compliqué ces dernières années. En effet, entre 2012 et 2014, les critères d’octroi pour les prêts hypothécaires se sont resserrés. En particulier avec la généralisation d’un apport de 10% de fonds propres ne provenant pas du 2 e pilier. «Ce durcissement des règles bancaires a raréfié l’accession des moins de 30 ans à la propriété. Entre le peu de temps pour se constituer un patrimoine et des revenus plus faibles en début de carrière, ils sont davantage pénalisés que le reste de la population», constate Kevin Rossier , CEO d’ Hypo Advisor .
De quoi réduire drastiquement la capacité d’acquisition de cette tranche d’âge. «Mais le facteur qui a le plus d’influence est celui de l'évolution des prix», indique Thomas Veraguth , stratégiste en immobilier chez UBS . Là aussi, le vent n’a pas tourné en faveur des acheteurs à petit budget. Puisqu’au cours des dix dernières années, les prix des logements ont augmenté presque cinq fois plus vite que le revenu des ménages, selon une étude UBS. La banque Raiffeisen abonde également dans ce sens en affirmant que «tant les maisons individuelles que les appartements en propriété n’ont jamais été aussi chers.»
Ainsi, du fait des restrictions financières couplées à des prix contraignants sur le marché, «rares sont les personnes de moins de 30 ans qui sont propriétaires en Suisse», assure Thomas Veraguth. Une réalité qui se confirme dans les publications de Credit Suisse où la moyenne d’âge des propriétaires de biens immobiliers se situerait plutôt autour de 58 ans. L’âge d’acquisition estimé par les spécialistes interrogés par nos soins se situe quant à lui dans une fourchette allant de 35 à 45 ans..
Mais pourtant si avantageux

Les experts sont unanimes: la génération Y n’est de loin pas la catégorie d’âge prédominante parmi les propriétaires de bien immobiliers en Suisse. Et pourtant, selon eux, l’achat est largement plus rentable que la location. «Si on a la chance de posséder des fonds propres, je conseille d’acheter sans hésiter car c’est la garantie d’économiser et de se projeter dans le futur», déclare Kevin Rossier, CEO d’Hypo Advisor. Un avis partagé par Stefan Heitmann, CEO de Moneypark: «La location coûte 40 à 50% plus cher que d'acheter son propre bien.»
De son côté, le membre de la direction de Schmidt Immobilier à Martigny, Cédric Suchy , promeut lui aussi l’acquisition dès le plus jeune âge. «Nous incitons les jeunes à monter le plus vite possible dans l’autobus de la propriété mais il y a deux éléments importants qui doivent être pris en compte. L’éducation, car si les parents étaient locataires ou possédants, cela aura une incidence», précise le courtier valaisan. Avant d’ajouter: «Ensuite, l’intelligence financière sera décisive pour devenir propriétaire. Le jeune devra faire des économies, des compromis, explorer les pistes du 3 e pilier ou encore de l’aide intergénérationnelle.»
A savoir, que les donations entre vifs portent sur un volume estimé par la banque Raiffeisen entre 15 et 20 milliards de francs par année. Ce qui facilite grandement la satisfaction des exigences en fonds propres des intéressés. Néanmoins, le stratégiste en immobilier chez UBS, Thomas Veraguth, est quant à lui moins optimiste sur la question de rapidité d’acquisition. «Les conseillers en finance incitent à la prudence. Les coûts de transactions sont très élevés si on veut se payer un bien. Devenir propriétaire n’est pas souhaitable pour tous. Ce n'est donc pas plus mal que les jeunes se décident plus tard pour acheter au lieu de commencer trop tôt et de devoir ensuite vendre par contrainte».

Heureusement des solutions existent
Risqué ou pas, si la personne qui n’a pas encore atteint la trentaine souhaite à tout prix se procurer un bien, voici les alternatives qui se présentent à elle. La plus évidente est de s’éloigner des centres afin de profiter des prix les plus abordables. «Selon les régions, on paie du simple au double. Les prix du m2 sont en moyenne autour des 6’000.- chf en Suisse mais dans les villes principales on s’approche rapidement des 10’000.- chf le m2», décrit Thomas Veraguth. Les économistes d’UBS ont d’ailleurs mesuré que les propriétaires qui acceptent jusqu'à 30 minutes de temps de trajet pour se rendre vers un centre urbain pouvaient faire chuter leurs coûts d'environ 20%.
«En Suisse, les possibilités de construire dans les centres sont très restreintes, il est donc difficile de générer des nouvelles offres, répondre à la demande excédentaire et la pénurie de biens fait exploser les prix», poursuit le stratégiste chez UBS. Mais tout est une question d’éclairage pour le courtier Cédric Suchy: «Je vous parlais d’intelligence financière, nous alertons les jeunes sur le fait qu’aujourd’hui avec 1 heure de transport on peut facilement trouver des opportunités intéressantes.»

Une autre solution peut être de se diriger vers les zones en développement, «comme il y en a de nombreuses à Genève», soutient Kevin Rossier, CEO d’Hypo Advisor.
Enfin, dernière possibilité pour investir sans se ruiner: le crowdfunding. Idéal pour les «petits épargnants» en quête de placement dans la pierre. «On achète des parts d’immeuble en commun, c’est un bon moyen de partager les frais», explique Cédric Suchy. Pour les experts de Raiffeisen, le crowdfunding immobilier n’a encore qu’un volume modeste sur le territoire suisse mais ses taux de croissance seraient impressionnants.

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