Place aux femmes!
Sallie Krawcheck, ancienne star de CitiGroup et de Bank of America, s’est lancé un défi de taille: combler le fossé financier entre les hommes et les femmes grâce à une plateforme numérique d’investissement dédiée. Inspirant.

Sallie Krawcheck a été classée sixième femme la plus puissante du monde par Forbes en 2006.
Crédits: Brad Barket/Getty imagesQuand une femme gagne 100 francs, un homme gagne en moyenne 140 francs, soit 40% de plus. En Suisse, la différence est encore plus marquée, si l’on en croit l’étude du cabinet de conseil Accenture intitulée «Getting to Equal 2017».
Comment réduire cet écart? Faut-il patiemment attendre un nouveau projet de loi mettant un terme définitif aux inégalités salariales liées au genre, étant précisé que la révision de la Loi fédérale sur l’égalité entre hommes et femmes entrée en vigueur le 1er juillet 2020 ne concerne que 0,9% des entreprises?
Sallie Krawcheck répond par la négative. Cette femme d’affaires de 57 ans, classée sixième femme la plus puissante du monde par Forbes en 2006, rappelle qu’actuellement, les femmes n’investissent pas autant que les hommes, ce qui nuit davantage à leur épargne que l’écart des salaires.
De nombreuses femmes continuent à douter de leurs capacités
En cause, d’une part, «le domaine de la finance dominé à 86% par des hommes. Les femmes ne s’y reconnaissent pas. Tout y est question de gagner, de battre les indices, de pulvériser les concurrents, analyse-t-elle. Quel est le symbole de Wall Street? Un taureau! Peut-on trouver symbole plus phallique?»
D’autre part, les femmes ne se sentent pas assez intelligentes pour gérer leur argent, raison pour laquelle elles le confient à leurs frères, pères ou époux. De façon intéressante, une étude menée par l’International Journal of Bank Marketing indique que les fonds d’investissement gérés par des femmes ont une meilleure rentabilité (+9%) que ceux gérés par des hommes (+6%). La multinationale Fidelity Investments a quant à elle examiné 8 millions de comptes de placement. Verdict: les femmes ont fait mieux que les hommes en matière d’investissement de 40 points de base.
Malgré ces chiffres éloquents, de nombreuses femmes continuent à douter de leurs capacités. Sallie Krawcheck n’a pas fait exception à la règle. «Pendant des années, j’ai confié la bourse familiale à celui qui est devenu mon ex-mari. Cela a fonctionné jusqu’à ce qu’il me trompe avec une amie. Bien sûr, votre partenaire ne fera jamais cela mais après tout, même Beyoncé a été trompée, plaisante-t-elle. Deux paires d’yeux valent mieux qu’une pour quelque chose d’aussi essentiel à votre avenir.»
Susciter l’intérêt des femmes pour la finance
A toute chose malheur est bon puisque cet échec personnel a donné naissance à une mission de vie: susciter l’intérêt des femmes pour la finance. En 2016, Sallie Krawcheck a fondé Ellevest, une plateforme d’investissement dédiée aux femmes dont l’objectif est de combler le fossé entre les hommes et les femmes dans le monde du placement. «Il n’y aura pas d’égalité hommes-femmes tant que les femmes ne seront pas aussi riches que les hommes», martèle-t-elle.
Ellevest adapte les investissements aux réalités de leurs carrières non linéaires – leurs salaires atteignent un pic plus tôt que ceux des hommes, elles connaissent de longues interruptions pour élever leurs enfants, etc. – et prend en considération leur espérance de vie. «Les femmes vivent en moyenne cinq ans de plus. Cela signifie qu’elles peuvent prendre davantage de risques afin de financer leurs retraites plus longues.»
A cet égard, le rôle du robot conseiller Ellevest n’est pas de battre l’indice S&P, mais d’atteindre les objectifs financiers des investisseuses: acheter une maison, créer leur entreprise, financer les études des enfants, et bâtir un avoir qui permettra de vivre une retraite confortable. Une question demeure: à quand un Ellevest suisse?