Le léman, la monnaie locale sous la loupe
La monnaie locale et responsable a célébré récemment sa première année d’existence. De l’agence de graphisme à la menuiserie en passant par le cabinet de psychologie, les lieux où la dépenser se multiplient. Décryptage avec l’un de ses créateurs, Jean Rossiaud.

Pour bien comprendre ce qu’est le Léman, il faut d’abord bien saisir en quoi elle est une « monnaie »…
La « monnaie » dont nous parlons ne doit pas être comprise comme un instrument d’échange, mais telle une devise. Elle n’est pas émise par une banque centrale.
Remplacera-t-il un jour le franc et l’euro ?
Non, cela n’est pas son objectif. Il s’agit de se réapproprier l’économie locale de biens et services en influençant le marché réel et pas financier. Ce projet montre combien l’économie actuelle est fragile face aux crises systémiques. Sans un tissu local solide, elle ne peut pas résister. En ce sens, le léman est davantage un moyen de qualifier l’acte économique (en le rendant responsable, démocratique etc) que de le mesurer.
D’autres avantages ?
Le léman, par sa fonction de crédit mutualisé, réduit les frais bancaires et de publicité. Les taux d’intérêt disparaissent et la force du réseau de partenaires suffit à assurer l’autopromotion des membres.
Et des inconvénients ?
On rencontre parfois encore des problèmes de circulation, notamment parce que le léman n’est pas accepté partout. On peut alors régler une partie de la facture en lémans pour soutenir le système mais ne pas à la fois pénaliser le commerçant qui ne pourrait pas en écouler la totalité ailleurs.
Comment finance-t-on le léman ?
Par nantissement. Pour chaque léman en circulation, il y a un franc suisse ou un euro en réserve sur un compte de la Banque Alternative Suisse (BAS). Cet argent provient des cotisations des membres qui doivent adhérer à l’association. Et de subventions publiques.
Y a-t-il une taille critique pour la communauté d’utilisateurs ?
A priori, non. Les utilisateurs doivent s’identifier au bassin de vie que représente la région lémanique. C’est la seule condition. Les limites sont en quelque sorte contenues dans la logique même d’économie de proximité.
Peut-on s’enrichir avec des lémans ?
Oui, parce que le léman crée de la valeur dans la mesure où il incite à consommer localement. Il provoque un enrichissement collectif puisqu’il fait augmenter le PIB.
S’agit-il d’une monnaie éthique ?
Oui, puisque les partenaires doivent accepter une charte qui assure entre autres des conditions de travail décentes, qui promeut l’agriculture biologique ou encore les entreprises créatrices d’emploi et de lien social.
Que cherche à contourner le léman dans le système financier ?
L’association ne contourne rien, elle propose. Elle est une alternative locale et complémentaire qui peut exister sans que ce soit en opposition à autre chose.
Comment s’est-il diffusé depuis ses débuts ?
Deux bureaux de change ont ouvert à Lausanne en plus de ceux de Meyrin et d’Evian. De trente, nous sommes passés à trois cents prestataires pour mille deux cents consommateurs.
Si le léman est convertible à la sortie pour les prestataires, est-il encore utile ?
A priori, ce n'est pas possible pour les individus. Pour les entreprises, le léman peut être rechangé en francs ou en euros parce qu’il ne serait pas pédagogique d’empêcher ça. Mais il vaut mieux l’éviter. On démarche constamment des fournisseurs pour agrandir le cercle d’utilisateurs. Si la monnaie circule beaucoup, pas besoin de la changer. La quantité de monnaie en circulation a été multipliée par quatre environ.
Peut-on thésauriser le léman ?
Non. Pour créer un fonds d’investissement, il faudrait un autre mécanisme. On devra peut-être y réfléchir pour la suite, lorsque les entreprises auront besoin de crédits qu’elles souhaiteront contracter en lémans.
Les transactions effectuées en lémans sont-elles imposées ?
Oui. Nos partenaires tiennent malgré tout une comptabilité soit en euros soit en francs suisses. Leurs revenus sont alors imposés sur cette base.
Comment sera le léman de demain ?
Une version électronique est en préparation pour 2017. Aussi, on planche sur un projet de crédit mutuel B2B entre les membres, le Lemanex.
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