Franc: vers l’abandon du taux plancher?
Les perspectives d’un franc à 1,30 face à l’euro en 2014 ôtent la pression à la Banque centrale helvétique. Pourrait-elle se diriger vers un abandon de l’ancrage à la monnaie européenne?
Depuis le début du mois de mai, le cours du franc s’est encore détendu face à l’euro, tombant jusqu’à 1,2651, niveau qu’il n’avait plus atteint depuis mai 2011. Le taux plancher de 1,20, fixé par la Banque nationale suisse (BNS) en septembre 2011, paraît déjà bien loin.
Le 21 mai, Thomas Jordan, président de la BNS, a renforcé la tendance en indiquant que «l’ajustement du cours plancher appartient, au même titre que celui des taux d’intérêt négatifs, au champ des possibilités». La Banque centrale helvétique pourrait-elle modifier la limite du taux plancher, ou se diriger vers un abandon du peg (ancrage à l’euro)? C’est depuis le début de 2013, avec l’accalmie sur le front de la crise des dettes souveraines en zone euro, que la détente du taux franc-euro a commencé, le franc fluctuant entre 1,21 et 1,25, sans plus tester les 1,20.
Pour Alain Broyon, CEO de la banque de négoce de devises Dukascopy Bank, la BNS restera vigilante ces prochains mois. «L’euro n’est pas tant remonté. Il est un peu prématuré de s’attendre à ce que la BNS suspende son taux plancher à 1,20.» Pour le spécialiste de la banque Forex genevoise, «il suffit d’un mouvement de 3 à 4% et on retouche le taux plancher».
Or les marchés des devises ont pour habitude de fluctuer: c’est un marché qui varie de 0,5 à 1% par jour, et un retour du franc à 1,20 se situerait encore dans une marge de fluctuation normale. «Hier, nous étions à 1,26, aujourd’hui nous sommes à 1,2450, et donc nous voyons qu’en vingt-quatre heures le franc a pu fluctuer de plus de 1%.»
En effet, malgré la stabilisation de l’euro, d’autres facteurs peuvent encore avoir un effet haussier sur le franc, qui incitent la BNS à la prudence. Ainsi, les commentaires de Ben Bernanke, gouverneur de la Réserve fédérale américaine, sur une possible réduction de la stimulation monétaire aux Etats-Unis ont poussé les investisseurs à rechercher des actifs refuge comme le franc, d’où sa hausse soudaine le 22 mai, à 1,2450.
La tendance reste toutefois clairement baissière pour le franc. Si bien qu’Alain Broyon estime que la BNS dispose aujourd’hui d’une plus grande marge de manœuvre. «Il est plausible qu’elle ait ralenti ou stoppé ses rachats d’euros, car elle peut se permettre de cesser d’intervenir.» Ce que la BNS ne fera certainement pas, en revanche, «c’est de vendre des euros maintenant, souligne-t-il, même si elle a engrangé beaucoup de bénéfices non réalisés sur ses achats d’euros à 1,20. Des ventes d’euros remettraient la pression sur la monnaie unique, met en garde le patron de Dukascopy Bank.
L’arrivée de 200 à 300 milliards d’euros sur le marché ferait immédiatement remonter le franc en mettant le cours plancher sous pression. Si toutefois le franc devait descendre à 1,30-1,35, le taux plancher sera de facto éliminé et la BNS pourrait peut-être alléger son bilan.»
Le retour des options - -
L’heure est donc au statu quo pour l’institut d’émission monétaire. Car même à 1,25-1,30, il serait trop tôt pour la BNS. En termes de perspectives, le taux plancher pourrait, d’ici à un an, voir confirmer son utilité réduite, si l’on en croit les estimations de Bank of America Merrill Lynch, qui voit le franc suisse à 1,30 d’ici à juin 2014.
Pour l’heure, note Alain Broyon, «on observe que les opérateurs et les entreprises se sont remis à se hedger sur l’euro». C’est là un signal que le marché n’est plus figé sur le taux de 1,20 et que les fluctuations récentes ont rouvert les possibilités d’utiliser des options et des stratégies de volatilité pour tenter de se couvrir contre le risque de change euro-franc. «Les banques sont de nouveau actives dans le conseil aux sociétés d’import-export, qui reviennent aux stratégies de couverture sur le franc suisse, en raison des mouvements accrus sur cette paire», observe Alain Broyon.
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