Anne-Marie Auriault: «un nécessaire besoin de mieux reconnaître nos compétences»
Cette semaine rencontre avec Anne-Marie Auriault, Managing Director de Pimlico Asset Management, administratrice indépendante et membre de conférences. Titulaire d’un MBA de l’Ecole Hôtelière de Lausanne, elle est experte en gestion d’investissements, gestion de portefeuilles immobiliers et hôteliers, stratégie et transactions, ainsi que le pilotage de performance et financier. Elle est membre du Cercle Suisse des Administratrices (CSDA).

Parce que plus d’égalité hommes-femmes c’est aussi plus de femmes dans les instances représentatives et dirigeantes, Femmes Leaders by Bilan vous propose chaque mois une rencontre avec une femme membre d’un conseil d’administration. De quoi inspirer de nouvelles candidatures ? Un texte réalisé en partenariat avec le Cercle Suisse des Administratrices .
Comment êtes-vous devenue administratrice ?
Comme beaucoup de femmes à l’aube de leurs 40 ans, je me suis posée la question de l’orientation que je souhaitais donner à ma carrière et des défis qui me motivaient. Déjà forte d’une riche expérience dans le milieu financier, j’ai décidé dans un premier temps de créer mon entreprise avec en tête de pouvoir assumer plus de responsabilités dans la planification stratégique à long terme, de la surveillance, ainsi que l’analyse des risques.
En faisant le bilan de mes compétences et ayant accompagné de nombreux investisseurs (privés ou institutionnels), chefs d’entreprise ainsi que des caisses de pension dans leurs décisions d’investissement, l’appel à candidatures pour postuler au sein du conseil d’AVENA – Fondation BCV 2 e pilier a raisonné comme une évidence. Une fois ce premier mandat commencé, d’autres propositions ont suivi en Suisse, et également à l’international.
Qu'est-ce qui vous intéresse le plus dans cette fonction?
La première exigence du rôle d’administrateur est d’être omniscient ; il faut non seulement maitriser la vision stratégique mais aussi d’en contrôler et surveiller la mise en œuvre. Cette conjugaison de réflexions et d’actions est sans aucun doute ce qui me plait le plus en tant qu’administratrice.
Il y a une exigence de responsabilités, de bonne gouvernance et de transparence, tâches fixées par le code des obligations. Cette exigence est également une motivation forte car elle demande de connaitre certains fondamentaux comme la gestion des risques et avoir une certaine agilité dans la prise de décision en période d’incertitude.
Enfin, il faut avouer que sur un plan humain, les échanges sont d’une richesse incroyable.
Quelles sont les compétences clés, et la valeur ajoutée que vous apportez au CA?
Bien évidemment, avoir un parcours pluridisciplinaire comme le mien, ayant tour à tour travaillé pour une grande banque de la place, des family offices, cabinets de conseil, ou encore dans le secteur immobilier et hôtelier m’apportent les compétences métiers et opérationnelles nécessaires.
Ensuite, il est bon de souligner que le rôle d’un Conseil d’Administration n’est pas là pour se substituer à la direction de l’entreprise, mais pour interagir sur ses propositions, et ainsi définir les objectifs et les moyens nécessaires pour les atteindre. Être capable de comprendre comment implémenter sur le terrain une vision stratégique est un atout essentiel.
Je ne cacherai pas qu’avoir créé ma propre structure m’a amplement aidé à me projeter dans ce rôle d’administratrice.
Quelles sont les difficultés de cette fonction, les défis que vous avez rencontrés?
On arrive souvent avec beaucoup de certitudes mais également de questions, car on doit appréhender en très peu de temps l’histoire et l’héritage de l’institution que l’on représente. On doit également apprendre à rapidement connaître et collaborer efficacement avec le président et les autres membres du conseil.
Les enjeux et le temps raccourci nous amènent souvent à devoir prendre des décisions stratégiques dans les premières semaines d’un mandat, il faut donc avoir confiance en ses compétences et ses collègues. Cet aspect se trouve démultiplié par la situation exceptionnelle que nous vivons en raison de la pandémie.
Quelle est votre meilleure bonne pratique en termes d’obtention de mandat dans les CA?
Encore une fois, on doit se rappeler que l’on a été élu pour ses compétences et son expertise. Trop souvent les femmes ont tendance à douter de leur potentiel, il est pourtant impératif d’être convaincue de ses capacités.
Le souci de transparence et de responsabilité sont des termes qui reviennent souvent lors des séances et nous évoluons désormais dans un monde dans lequel l’opacité des décisions n’a plus sa place. Un bon conseil en quelque sorte serait de «dire ce que l’on fait et faire ce que l’on dit».
Au-delà de ses propres compétences, il faut enfin être convaincu de ses opinions et respecter les différentes positions, mêmes minoritaires. La clé sera ensuite d’apprendre à communiquer clairement pour qu’une bonne culture d’équipe règne au sein du conseil d’administration, pour maintenir un échange ouvert et mener un travail efficace avec les autres membres.
Quelles sont les grandes préoccupations actuelles des organes stratégiques des entreprises ?
Il est impossible de répondre à cette question sans évoquer la pandémie qui a profondément transformer la façon de travailler mais surtout réduit le cycle de décision. Le Conseil d’Administration et ses membres font désormais face à des décisions stratégiques qu’ils ne peuvent repousser. Cette crise du Covid a accéléré la transformation de bon nombre d’institutions qui doivent continuer à s’adapter sans subir.
Les initiatives ESG et CSR sont également au cœur des préoccupations du CA. Il faut faire mieux tout en étant plus responsable, plus éthique, plus égalitaire, plus inclusif, bref en un mot, gouverner en répondant aux exigences de la société actuelle.
Que manque-t-il pour que les CA d'entreprises suisses comptent davantage de femmes?
C’est la question à laquelle nous aimerions toutes trouver une réponse… Je dirais qu’il y a un nécessaire besoin de mieux reconnaître nos compétences mais nous devons également plus nous affirmer, être acteur de cette transformation plutôt que d’attendre que les choses changent.
D’une manière plus générale, il y a peu de communication faite autour des mandats disponibles, se positionner et postuler relève aussi du défi. Mais les choses évoluent, beaucoup d’entreprises et d’institutions réalisent que compter plus de femmes au sein de leur CA est un réel avantage. C’est le sens de l’histoire et on arrive progressivement à une situation plus équilibrée même si certains reflexes sont encore trop présents.
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.
Cet article a été automatiquement importé de notre ancien système de gestion de contenu vers notre nouveau site web. Il est possible qu'il comporte quelques erreurs de mise en page. Veuillez nous signaler toute erreur à community-feedback@tamedia.ch. Nous vous remercions de votre compréhension et votre collaboration.