Trottet, passion du café et discipline financière
Créée en 1947, la maison genevoise est dirigée aujourd’hui par la 3e génération. Qui vante la vente en direct.
François Trottet, 45 ans, représente la troisième génération à la tête des Cafés Trottet . Le directeur général de la maison genevoise se réjouit: «Le marché du café est très difficile, mais nous avons fait des choix payants. Nos ventes sont en progression constante et nous nous finançons entièrement.»
Lire aussi: Le café, un marché en plein boom en Suisse
C’est son grand-père Théophile qui est à l’origine de cette saga familiale. Alors qu’il travaille au sein de l’entreprise Demaurex Frères, bien avant le lancement d’Aligro, il repère un torréfacteur d’occasion en vente dans une échoppe des Eaux-Vives. Comme son employeur vend des «denrées coloniales» (café, huile, chocolat, etc.), il lui propose de racheter la machine en question, datant des années 1930. Sauf que cela n’intéresse pas les Demaurex. - - Du coup, Théophile décide, à 38 ans, de se mettre à son compte en s’offrant ce torréfacteur pouvant traiter 80 kilos. Il connaît bien le marché puisque depuis 1932 il sillonne les pays producteurs de café à la recherche des meilleurs grains qu’il trouvait notamment en Amérique centrale et du Sud (Colombie, Honduras, Brésil, Mexique, etc.) et en Afrique (Kenya et Tanzanie). A l’époque, l’entreprise Demaurex se chargeait d’aller livrer en camionnette les épiciers en denrées coloniales.
Théophile installe son torréfacteur aux Pâquis, à la rue Amat. Avec ses deux employés, il reconditionne le café avant de le vendre sous sa propre marque à partir du 1 er septembre 1947. Il importe et vend également du thé. En 1965, Gabriel Trottet rejoint son père dans l’entreprise qui emploie alors huit personnes. «J’ai tout appris avec mon père. J’ai commencé par la torréfaction, puis j’ai tourné chez les clients et pris les commandes», relate le représentant de la deuxième génération. La même année, la PME s’équipe de deux nouveaux torréfacteurs (l’un de 120 kilos de charges, l’autre de 50 kilos). C’est sur ce dernier que François s’entraînera au milieu des années 1980, alors qu’il a à peine 12 ans. «J’adorais faire cela pendant mes vacances», confie-t-il.
Dès 1970, Gabriel Trottet, père de l’actuel directeur, prend la direction de l’affaire familiale. Il reste dans la continuité de son père, tout en modernisant l’outil de production, sans s’endetter. En 1988, les locaux du centre-ville sont abandonnés au profit d’une vaste et moderne usine sise dans la zone industrielle de Meyrin. C’est alors l’une des usines de torréfaction et d’ensachage de café parmi les plus modernes d’Europe. Gabriel va mettre au point sa fameuse cave à café au sous-sol équipée d’une hydrométrie toujours stable. A peine quatre ans plus tard, François, âgé alors de 20 ans, rejoint la société. Son père continue de parcourir le globe à la recherche de l’or brun, tandis que son fils se consacre au marketing et à la vente.
En quête de grands crus -
Quand François Trottet rejoint l’entreprise fondée par son grand-père, plus de la moitié de la production d’alors (laquelle s’élevait à environ 1500 tonnes par année, ce qui représente 180 millions de tasses) était vendue à travers la grande distribution et les grossistes, «sans que cela rapporte quoi que ce soit à l’entreprise». Très rapidement, après son accession aux rênes de Cafés Trottet en 1996, il décide d’arrêter de travailler avec des intermédiaires et des grossistes pour favoriser la vente directe. Désormais, la PME commercialise 700 tonnes de café vert en vente directe, avec ses 25 employés. «Avant, on vendait un produit et cela suffisait. Aujourd’hui, le marché a changé. On va chercher le café à la source, chez nos petits producteurs. Et on édite beaucoup de documentation sur ces petits producteurs (lire l’encadré). Tout est fait chez nous avec une traçabilité totale et aucune sous-traitance.»
La majeure partie des effectifs de la PME a suivi une formation complète. Elle s’est rendue chez les partenaires et surtout sur le terrain. En janvier prochain, trois d’entre eux partiront durant huit jours en Amérique centrale.
«Ils vont prendre pas moins de neuf fois l’avion et aller à la rencontre d’une quarantaine de fermiers, au moment de la récolte, pour sélectionner tous les cafés que nous recevrons entre mars et mai 2018», confie François Trottet. Autant dire que cela représente un coût non négligeable. La spécialiste Fanny Turin partira également en Equateur où elle a déniché des fermes exceptionnelles. Tous ces voyages peuvent être suivis que ce soit sur le blog de l’entreprise ou sur sa page Facebook.
Lire aussi: Le café équitable, un grain qui vaut de l’or
Outre cette quête indispensable des meilleurs grands crus, la PME familiale s’est engagée également en faveur du développement durable. «Nous avons réfléchi à faire quelque chose pour favoriser le développement dans les pays producteurs avec lesquels nous travaillons. Quand nous allons visiter ces petits producteurs, nous étudions la manière de concrètement aider la communauté locale sur place. C’est à petite échelle, dans la limite du raisonnable, mais nous apportons notre pierre à l’édifice et cela motive énormément nos collaborateurs et donne du sens à leur travail au quotidien.»
Cafés Trottet a ainsi décidé de soutenir une école au Costa Rica. 20% du chiffre d’affaires réalisé avec la vente du café Korica, soit environ 6000 francs, sera mis de côté afin de financer certains achats. «En 2009, l’école primaire de Pavas de Carrizal avait été détruite par un tremblement de terre. Après huit ans d’enseignement dans l’église du village, l’école a rouvert ses portes cette année. En collaboration avec Carole Zbinden, propriétaire de la plantation El Quizarra, nous souhaitons aider cette école et ces élèves.» A ce jour, près de 2000 francs ont été récoltés.
Le fond et la forme - -
Voilà trois ans, l’entreprise a également pris d’autres virages, dont celui du numérique, avec la mise sur pied d’un site internet très complet, permettant la vente en ligne. Les résultats sont prometteurs: entre la période allant du 1 er janvier au 31 juillet 2016 et la même période en 2017, la progression des ventes online s’est élevée à 78%. «En 2017, cela va représenter plus de 3 millions de chiffre d’affaires, en ayant commencé à zéro voilà deux ans et demi», observe le directeur. Précisons que le chiffre d’affaires global de la PME est estimé entre 10 et 12 millions de francs (en progression de 9% en 2016).
L’autre virage pris est celui des capsules compatibles Nespresso. «Nous avons investi il y a trois ans dans une ligne de production dernier cri pour créer nos propres capsules de café compatibles avec le système Nespresso. Et le succès est au rendez-vous avec 2% du marché acquis en plus de deux ans.» En 2016, les ventes de capsules ont grimpé de 56%.
Et le futur? Pourquoi ne pas envisager d’ouvrir une arcade au centre-ville, par exemple? «Si l’arcade est dans une rue passante, cela représenterait un investissement beaucoup trop élevé, et si l’arcade est dans une rue avec un flux trop faible, alors nos ventes ne seraient pas suffisantes. De plus, je souhaite rester en contact avec notre clientèle quand je ne suis pas à la torréfaction. C’est très enrichissant. J’apprends beaucoup avec nos consommateurs.»
Cafés Trottet travaille aussi en direct avec des hôtels, des restaurants et quelques entreprises auxquels elle fournit une grande gamme de machines en tout genre. «Mais je refuse de participer à la majorité des soumissions pour ne pas aller dans le créneau du mass market. Nous voulons rester dans les grands crus.»
Le rituel du matin -
La PME s’appuie sur deux maîtres torréfacteurs: Fanny Turin (active chez Trottet depuis près de quatre ans) et Patricio Gomes, qui torréfie depuis vingt-cinq ans dans l’entreprise. Fanny Turin arpente tous les pays producteurs afin de dénicher les meilleurs producteurs. Avec ces derniers, François et Gabriel Trottet participent tous les matins dès 7 h à une longue séance de cupping durant laquelle sont testés entre 10 et 50 cafés différents. - - 14 grammes de café grossièrement moulu sont disposés dans un bol dans lequel de l’eau à 90 degrés (mais n’ayant pas bouilli) est versée. Après dix minutes, lorsque le marc de café remonte, la croûte est brisée, puis enlevée, le café est alors dégusté. Un rituel immuable.
Lire aussi: Starbucks lance des capsules compatibles avec Nespresso
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.
Cet article a été automatiquement importé de notre ancien système de gestion de contenu vers notre nouveau site web. Il est possible qu'il comporte quelques erreurs de mise en page. Veuillez nous signaler toute erreur à community-feedback@tamedia.ch. Nous vous remercions de votre compréhension et votre collaboration.